«Dehors, le vieux»: au Kazakhstan, la colère vise l'ex-président

Dans cette photo d'archive prise le 16 janvier 2018, l’ancien président kazakh Nursultan Nazarbayev s'exprime lors de sa rencontre avec le président américain Donald Trump dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC. (Nicolas Kamm/AFP)
Dans cette photo d'archive prise le 16 janvier 2018, l’ancien président kazakh Nursultan Nazarbayev s'exprime lors de sa rencontre avec le président américain Donald Trump dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC. (Nicolas Kamm/AFP)
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Publié le Dimanche 09 janvier 2022

«Dehors, le vieux»: au Kazakhstan, la colère vise l'ex-président

  • Aujourd'hui encore, le plus grand pays d'Asie centrale, qui compte 19 millions d'habitants et d'importantes réserves d'hydrocarbures, est associé à son ancien dirigeant
  • Se targuant d'avoir présidé à la forte croissance économique du Kazakhstan pendant deux décennies, M. Nazarbaïev a mis en place un véritable culte de la personnalité

ALMATY, Kazakhstan : Lorsque des centaines de manifestants en colère et munis de bâtons ont pris d'assaut cette semaine la mairie d'Almaty, capitale économique du Kazakhstan, un slogan était plus audible que les autres: «Dehors, le vieux !»

Il ne visait pas l'actuel président, Kassym-Jomart Tokaïev, 68 ans, mais son prédécesseur octogénaire, Noursoultan Nazarbaïev, qui a régné d'une main de fer sur le Kazakhstan de son indépendance, en 1989, à 2019.

Aujourd'hui encore, le plus grand pays d'Asie centrale, qui compte 19 millions d'habitants et d'importantes réserves d'hydrocarbures, est associé à son ancien dirigeant, qui a conservé une influence forte après son retrait du pouvoir.

S'il cultive l'image de vieux sage modéré, M. Nazarbaïev est accusé par des manifestants de s'être considérablement enrichi avec son clan au détriment de la population, confrontée à des difficultés économiques croissantes.

«Notre Kazakhstan a été transformé en société privée des Nazarbaïev», fustige ainsi Saule, une manifestante âgée de 58 ans à Almaty non loin de la résidence présidentielle, incendiée par les protestataires.

«Nazarbaïev aurait dû quitter (la politique) il y a quinze ans. Un clan vit bien et le reste de la population est pauvre», abonde Yermek Alimbaïev, un habitant sexagénaire d'Almaty.

- Statue déboulonnée -

Se targuant d'avoir présidé à la forte croissance économique du Kazakhstan pendant deux décennies, M. Nazarbaïev a mis en place un véritable culte de la personnalité qui semblait le mettre à l'abri des critiques.

Ce fils de berger, aujourd'hui âgé de 81 ans, s'est notamment octroyé le titre de «Guide de la nation» («Elbassy»). La capitale, autrefois nommée Astana, a en outre été rebaptisée Nur-Sultan en son honneur en 2019.

A l'étranger, une armée de consultants grassement rémunérés, comme l'ancien Premier ministre britannique Tony Blair, se sont efforcés de le dépeindre en homme d'Etat réfléchi, attaché à la diplomatie nucléaire et la paix mondiale.

Mais ces images flatteuses ont volé en éclats cette semaine lorsque les manifestations les plus massives depuis l'indépendance du Kazakhstan ont secoué le pays, partant d'une protestation contre la hausse des prix du gaz avant de se muer en émeutes violentes qui ont fait des dizaines de morts.

Scène autrefois inimaginable, des manifestants ont même déboulonné une statue de M. Nazarbaïev à Taldykourgan (sud-est).

Ces troubles se sont accompagnés de rumeurs largement diffusées sur les réseaux sociaux de luttes de pouvoir au sommet de l'Etat entre partisans de M. Nazarbaïev et son successeur.

M. Nazarbaïev, qui n'est pas apparu publiquement depuis le début des manifestations, a appelé samedi, par l'intermédiaire de son porte-parole, à soutenir M. Tokaïev et démenti avoir fui à l'étranger avec sa famille.

- «Réveillés» -

Signe toutefois de remous en coulisses, les autorités ont annoncé samedi l'arrestation pour «trahison» de l'ex-patron des services de renseignement Karim Massimov, allié de longue date de M. Nazarbaïev dont il fut le fut Premier ministre.

De plus, un communiqué publié sur le site de la présidence a annoncé le remplacement d'un neveu de M. Nazarbaïev, Samat Abish, au poste de vice-président du Comité national de sécurité.

Enfin, M. Tokaïev, qui a pris la direction cette semaine du puissant conseil de sécurité nationale, dirigé jusqu'alors par M. Nazarbaïev, n'a pas mentionné son prédécesseur lors de ses prises de parole ces derniers jours.

La colère populaire contre M. Nazarbaïev s'explique aussi en grande partie par les scandales impliquant son entourage.

Des fuites de documents et une procédure judiciaire à Londres ont ainsi mis en lumière l'étendue du patrimoine de la famille de la fille aînée du président, Dariga Nazarbaïeva, constitué notamment de propriétés luxueuses à l'étranger.

Roustam Nougmanov, un homme de 48 ans arrivé samedi à Almaty où la situation semblait s'être calmée depuis la veille, estime que les Kazakhs «se sont réveillés» et veulent tourner la page de l'ère Nazarbaïev.

«Il a beaucoup fait pour le pays, mais il aurait pu faire beaucoup plus», dit-il. «Peut-être en était-il simplement incapable, ou alors est-ce la cupidité, d'autres faiblesses humaines... Il n'a pas cessé de céder à ses faiblesses».

Plus de 5.000 arrestations depuis le début des émeutes

Plus de 5.000 personnes ont été arrêtées aux Kazakhstan en lien avec les émeutes qui ont secoué le plus grand pays d'Asie centrale cette semaine, ont rapporté dimanche les médias locaux, citant les autorités.

Au total, 5.135 personnes ont été interpellées dans le cadre de 125 enquêtes distinctes, a déclaré le ministère de l'Intérieur, cité par les médias.

Le Kazakhstan, un pays d'environ 19 millions d'habitants riche en hydrocarbures, a été ébranlé cette semaine par des émeutes sans précédent depuis son indépendance en 1989, qui ont fait des dizaines de morts.

La contestation a débuté en province dimanche dernier après l'augmentation des prix du gaz, avant de gagner des grandes villes, notamment la capitale économique Almaty, où des émeutes ont éclaté, la police tirant à balles réelles sur les manifestants.

Selon le ministère de l'Intérieur cité dimanche par les médias, le préjudice matériel causé par les violences a été initialement évalué à environ 175 millions d'euros. 

Plus de 100 commerces et banques ont été pillés et plus de 400 véhicules détruits, selon la même source.

"Aujourd'hui, la situation est stabilisée dans toutes les régions du pays", a déclaré le ministre de l'Intérieur Erlan Tourgoumbaïev, ajoutant toutefois que "l'opération antiterroriste se poursuit pour rétablir l'ordre dans le pays".

Un calme relatif semblait être revenu à Almaty, les policiers tirant parfois des coups de feu en l'air pour empêcher les habitants d'approcher de la place centrale de la ville. 

Signe d'un timide retour à la normale, une trentaine de supermarchés ont rouvert leurs portes à Almaty dimanche, ont rapporté les médias au Kazakhstan, alors que la population s'inquiète de pénuries.

De longues files d'attente de véhicules se sont notamment formées ces derniers jours devant les stations-service.

L'aéroport d'Almaty, qui avait été brièvement occupé par les manifestants, restera fermé "jusqu'à ce que la situation se stabilise", ont déclaré dimanche les autorités. Il devait initialement reprendre ses activités lundi.


Les Etats-Unis accusent la Russie d'avoir usé d'un agent chimique en Ukraine

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  • Washington a annoncé mercredi une nouvelle vague de sanctions visant des entreprises ou des personnes russes ou étrangères
  • Une centaine d'entreprises russes, parmi les plus de 200 également visées, opèrent spécifiquement dans les secteurs de la défense, du transport ou des technologies

WASHINGTON: Les Etats-Unis accusent la Russie d'avoir eu recours à un agent chimique, la chloropicrine, contre les forces ukrainiennes, en violation de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (CIAC), selon un communiqué mercredi du département d'Etat.

En outre, la Russie se sert d'agents anti-émeutes comme "méthode de guerre en Ukraine, également en violation de la convention", ajoute la diplomatie américaine dans ce texte.

"L'utilisation de ces produits chimiques n'est pas un incident isolé et est probablement motivée par le désir des forces russes de déloger les forces ukrainiennes de positions fortifiées et de réaliser des avancées tactiques sur le champ de bataille", écrit le département d'Etat.

Washington a annoncé en parallèle mercredi une nouvelle vague de sanctions visant des entreprises ou des personnes russes ou étrangères, accusées de participer à l'effort de guerre russe dans l'invasion de l'Ukraine.

Outre des entreprises russes de la défense, ainsi que des entités chinoises, ces sanctions concernent également plusieurs unités de recherche et entreprises impliquées dans les programmes d'armes chimiques et biologiques russes.

"Le mépris permanent de la Russie pour ses obligations au titre de la CIAC s'inscrit dans la même logique que les opérations d'empoisonnement d'Alexeï Navalny et de Sergueï et Ioulia Skripal avec des agents neurotoxiques de type Novichok", poursuit le département d'Etat.

Alexeï Navalny, ancien opposant au président russe Vladimir Poutine, décédé le 16 février, avait été victime d'un grave empoisonnement qu'il avait attribué au Kremlin,

L'ancien agent double russe Sergueï Skripal et sa fille Ioulia Skripal avaient été empoisonnés en Angleterre en 2018.

La Russie a déclaré ne plus posséder d'arsenal chimique militaire, mais le pays fait face à des pressions pour plus de transparence sur l'utilisation d'armes toxiques dont il est accusé.

Selon les Instituts nationaux de la santé (NIH), la chloropicrine est un produit chimique qui a été utilisé comme agent de guerre et comme pesticide et qui, en cas d'inhalation, présente un risque pour la santé.

«Contournement» des sanctions 

"Les sanctions prises aujourd'hui visent à perturber encore plus et affaiblir l'effort de guerre russe en s'attaquant à son industrie militaire de base et aux réseaux de contournement (des sanctions existantes, ndlr) qui l'aident à se fournir", a déclaré la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, citée dans un communiqué.

Parmi les entreprises étrangères visées, seize sont chinoises ou hongkongaises, pour la plupart accusées d'aider la Russie à se fournir en composants qui sont normalement interdits, mais aussi, pour deux d'entre elles, d'avoir procuré les matériaux nécessaires à la production de munitions.

Les sanctions concernent des entreprises issues de cinq autres pays: les Emirats arabes unis, la Turquie et l'Azerbaïdjan, ainsi que deux membres de l'Union européenne, la Belgique et la Slovaquie.

Une centaine d'entreprises russes, parmi les plus de 200 également visées, opèrent spécifiquement dans les secteurs de la défense, du transport ou des technologies.

Enfin, les sanctions concernent aussi les infrastructures de gaz et pétrole russes, alors que Moscou cherche à développer celles qui lui permettraient d'exporter plus facilement ses hydrocarbures, en particulier vers la Chine. Ces exportations se font actuellement par pétroliers ou méthaniers, faute d'oléoducs et gazoducs suffisants vers l'est.

Ces sanctions prévoient notamment le gel des avoirs des entreprises ou personnes visées et présentes aux Etats-Unis, ainsi que l'interdiction pour des entités ou citoyens américains de faire affaire avec les cibles des sanctions.

Les membres du G7 ainsi que l'UE et plusieurs pays proches, tels que l'Australie ou la Corée du Sud, ont multiplié les sanctions à l'encontre de la Russie depuis le déclenchement de l'invasion de l'Ukraine en février 2022.

Les dernières sanctions ont en particulier ciblé le secteur minier, notamment l'aluminium, le cuivre et le nickel, dont l'importation aux Etats-Unis et au Royaume-Uni sont désormais interdits.


Ukraine: une attaque russe de missiles à Odessa fait une dizaine de blessés

Un policier ukrainien se tient à côté du corps d'une victime sur le site d'une frappe, dans le village de Zolotchiv, dans la région de Kharkiv, le 1er mai 2024, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
Un policier ukrainien se tient à côté du corps d'une victime sur le site d'une frappe, dans le village de Zolotchiv, dans la région de Kharkiv, le 1er mai 2024, au milieu de l'invasion russe de l'Ukraine. (AFP)
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  • Odessa, un port sur la mer Noire vital pour les exportations ukrainiennes, est régulièrement visé par des attaques meurtrières de missiles et de drones
  • Tôt mercredi, les autorités locales avaient annoncé la mort d'au moins trois personnes, victimes d'une attaque russe de missiles sur la ville

KIEV: Une attaque russe de missiles a fait une dizaine de blessés à Odessa, une ville portuaire ukrainienne déjà ciblée en début de semaine par des attaques meurtrières, ont rapporté les autorités locales dans la nuit de mercredi à jeudi.

"Une nouvelle attaque russe de missiles balistiques" a touché Odessa, a rapporté le maire de cette ville du sud-ouest de l'Ukraine, Guennadiï Troukhanov, sur le réseau social Telegram.

"Des infrastructures civiles ont été détruites" et "13 personnes ont été blessées" dans l'attaque, a-t-il précisé, ajoutant que les pompiers combattaient "un incendie" d'ampleur, sans fournir davantage de détails.

Oleg Kiper, le gouverneur de la région d'Odessa, a de son côté affirmé qu'une "attaque russe de missile sur Odessa" avait blessé 14 personnes. "Des infrastructures civiles ont été endommagées, dont des entrepôts postaux", a-t-il ajouté.

Odessa, un port sur la mer Noire vital pour les exportations ukrainiennes, est régulièrement visé par des attaques meurtrières de missiles et de drones.

Tôt mercredi, les autorités locales avaient annoncé la mort d'au moins trois personnes, victimes d'une attaque russe de missiles sur la ville. Et lundi, une attaque similaire conduite par Moscou y avait tué cinq personnes, d'après des responsables locaux.

La Russie frappe sans relâche les villes ukrainiennes depuis des mois et avance sur le front est de l'Ukraine avant l'arrivée d'armes américaines cruciales pour Kiev.


Guerre à Gaza: la Colombie rompt ses liens diplomatiques avec Israël

Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza. (AFP).
Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza. (AFP).
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  • Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza
  • Israël a immédiatement accusé M. Petro de "récompenser" le mouvement islamiste palestinien Hamas qui a, de son côté, salué l'annonce du dirigeant colombien, la qualifiant de "victoire"

BOGOTA: Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza.

Israël a immédiatement accusé M. Petro de "récompenser" le mouvement islamiste palestinien Hamas qui a, de son côté, salué l'annonce du dirigeant colombien, la qualifiant de "victoire".

M. Petro avait vivement critiqué, à plusieurs reprises, la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza après les attaques sans précédent du Hamas dans le sud du territoire israélien le 7 octobre.

"Demain (jeudi), les relations diplomatiques avec l'Etat d'Israël seront rompues (parce qu'il a) un gouvernement, un président génocidaire", a déclaré mercredi le président colombien, lors d'un discours prononcé devant plusieurs milliers de partisans à Bogota à l'occasion du 1er-Mai.

En Israël, le chef du gouvernement est le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, tandis que le président, Isaac Herzog, a  un rôle avant tout symbolique.

"On ne peut pas revenir aux époques de génocide, d'extermination d'un peuple entier", a déclaré le président colombien. "Si la Palestine meurt, l'humanité meurt", a-t-il lancé, déclenchant les vivats de la foule.

Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz a aussitôt réagi en qualifiant Gustavo Petro d'"antisémite". "Le président colombien avait promis de récompenser les meurtriers et violeurs du Hamas, aujourd'hui il a tenu promesse", a écrit M. Katz sur X.

"Nous apprécions grandement la position du président colombien Gustavo Petro (...) que nous considérons comme une victoire pour les sacrifices de notre peuple et sa cause qui est juste", a déclaré pour sa part dans un communiqué la direction du Hamas, en appelant d'autres pays d'Amérique latine à "rompre" leurs relations avec Israël.