Macron déclenche une tempête en plein examen du pass vaccinal à l'Assemblée

Le Président Emmanuel Macron a averti les Français non-vaccinés contre la Covid-19 qu'il leur causerait des problèmes en limitant l'accès aux aspects clés de la vie dans le pays, le 5 janvier 2022. (Photo, AFP)
Le Président Emmanuel Macron a averti les Français non-vaccinés contre la Covid-19 qu'il leur causerait des problèmes en limitant l'accès aux aspects clés de la vie dans le pays, le 5 janvier 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 05 janvier 2022

Macron déclenche une tempête en plein examen du pass vaccinal à l'Assemblée

  • La tempête politique sévit au coeur de la 5e vague d'épidémie de Covid-19, et en plein examen tendu du projet de loi transformant le pass sanitaire en pass vaccinal
  • Les discussions au Palais Bourbon ont piétiné mardi soir et 450 amendements restent au menu

PARIS : "Electrochoc" pour le gouvernement, indignité pour ses opposants: en disant vouloir "emmerder" les non-vaccinés, Emmanuel Macron a déclenché un tumulte qui grossit mercredi, forçant au passage les oppositions à préciser leur avis sur le pass vaccinal débattu à l'Assemblée.

"Les non-vaccinés, j’ai très envie de les emmerder. Et donc on va continuer de le faire, jusqu’au bout. C’est ça, la stratégie", clame le chef de l'Etat dans un entretien au Parisien mardi. 

"Quand ma liberté vient menacer celle des autres, je deviens un irresponsable. Un irresponsable n’est plus un citoyen", a-t-il ajouté.

La tempête politique sévit au coeur de la 5e vague d'épidémie de Covid-19, et en plein examen tendu du projet de loi transformant le pass sanitaire en pass vaccinal. 

Les débats, qui avaient été suspendus une première fois dans la nuit de lundi à mardi après un vote à main levée salué par les oppositions, avaient finalement repris mardi soir. 

Les députés étaient alors parvenus à s'accorder sur l'épineuse question du pass vaccinal pour les mineurs, repoussé de 12 à 16 ans pour les sorties scolaires et activités péri et extrascolaires (mais pas pour les "activités privées" comme aller au restaurant).

L'interview du chef de l'Etat a remis le feu aux poudres, et après de multiples suspensions de séance et une demande, vaine, des oppositions de voir le Premier ministre Jean Castex venir dans l'hémicycle, les débats ont de nouveau été suspendus.

"Ils reprendront cet après-midi à 15H00 et j'espère que la raison l'emportera", a souligné le ministre des Relations au Parlement Marc Fesneau mercredi matin sur franceinfo, en confirmant qu'une entrée en vigueur du pass vaccinal au 15 janvier "reste un objectif".

Toutefois, le calendrier est toujours menacé de dérailler: les discussions au Palais Bourbon ont piétiné mardi soir et 450 amendements restent au menu. L'Assemblée devrait en théorie achever leur examen mercredi soir, puis le Sénat se saisir du texte jeudi en commission. Mais rien n'est moins sûr, les oppositions dénonçant, à l'instar de Sébastien Jumel (PCF), un "Benalla sanitaire".

«Dérapage contrôlé»

Pour Marc Fesneau, les propos d'Emmanuel Macron vont au contraire "produire un électrochoc" pour les non-vaccinés qui sera "salvateur". Et de rappeler le nouveau record de contaminations au Covid, à 271.686 cas mardi. Les hospitalisations continuent aussi de croître.

Dans cette situation, l'infectiologue Eric Caumes "comprend" en tant que médecin le "dérapage probablement contrôlé" d'Emmanuel Macron, soulignant l'"exaspération" des soignants face aux non-vaccinés.

"En tant que citoyen je suis un peu plus surpris, mais c'est la campagne électorale qui a débuté", a-t-il remarqué sur BFMTV et RMC.

Les candidats à la présidentielle et les oppositions fustigent, eux, les "propos insultants" du chef de l'Etat qui devrait "rassembler" plutôt que "cliver".

"Réunir la France", a laconiquement tweeté la candidate PS à la présidentielle Anne Hidalgo; "propos indigne et irresponsable" selon le candidat PCF Fabien Roussel; "faute politique" pour le candidat EELV Yannick Jadot, et pour le candidat LFI Jean-Luc Mélenchon, c'est un "aveu sidérant de Macron": "le pass vaccinal est une punition collective contre la liberté individuelle".

«Quinquennat du mépris»

A droite, la candidate Valérie Pécresse se dit "indignée" et appelle à "mettre fin au quinquennat du mépris".

A trois mois de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron "tombe dans le camps des populistes avec Mme Le Pen et M. Zemmour", a accusé mercredi matin sur Sud Radio le patron des députés LR Damien Abad.

"Je ne peux pas cautionner un texte qui a pour seul objectif d’emmerder les Français", abonde le président du parti Christian Jacob.

Des Républicains ciblés par le gouvernement qui les accuse de jouer double jeu, entre soutien public au pass vaccinal et critiques et vote contre une fois dans l'hémicycle.

Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait ainsi sommé mardi Valérie Pécresse de "clarifier sa position". "En responsabilité (...), nous ne nous opposerons pas à ce texte", avait répondu la candidate, qui a bondi dans les sondages ces dernières semaines et est désormais donnée au second tour de la présidentielle face à Emmanuel Macron.


Un homme armé tentant de mettre le feu à une synagogue à Rouen tué par la police

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
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  • Les policiers sont "intervenus sur un signalement de dégagement de fumée près de la synagogue", a indiqué une source policière
  • "L'homme était armé d'un couteau et d'une barre de fer, il s'est approché des policiers qui ont tiré, l'individu est décédé", a précisé à l'AFP une source proche du dossier

PARIS: Un homme armé qui tentait vendredi matin de mettre le feu à une synagogue à Rouen, dans le nord-ouest de la France, a été tué par la police, a annoncé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Les policiers sont "intervenus sur un signalement de dégagement de fumée près de la synagogue", a indiqué une source policière.

"L'homme était armé d'un couteau et d'une barre de fer, il s'est approché des policiers qui ont tiré, l'individu est décédé", a précisé à l'AFP une source proche du dossier.

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X.


Des Français musulmans s'exilent à l'étranger, fuyant la « morosité ambiante »

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
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  • Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ
  • Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre

PARIS: Après avoir échoué à 50 entretiens d'embauche pour un job de consultant, en dépit de ses qualifications et diplômes, Adam, Français de confession musulmane, a fait ses valises pour commencer une nouvelle vie à Dubaï.

"Je me sens beaucoup mieux ici qu'en France", estime désormais ce trentenaire d'origine nord-africaine.

"Ici on est tous égaux. On peut avoir comme patron une personne indienne, une personne arabe, un Français", témoigne-t-il à l'AFP, ajoutant que sa religion est "plus acceptée".

Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ dans des villes telles que Londres, New York, Montréal ou Dubaï.

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes".

En France, "vous devez faire deux fois plus d'efforts quand vous venez de certaines minorités", reprend Adam, qui ne donne pas son nom de famille, comme tous ceux interrogés par l'AFP.

Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre.

'Plafond de verre'

La France, ancienne puissance coloniale et pays d'immigration, compte une importante population d'origine maghrébine et africaine.

Les enfants d'immigrés venus chercher une vie meilleure ou appelés à constituer une main d'oeuvre bon marché dans les années 60 sont Français. Mais nombre d'entre eux se sentent étrangers dans leur propre pays, considérés comme des "citoyens de seconde zone". En particulier depuis les attentats jihadistes de 2015 en France.

"Le climat en France s’est largement dégradé. En tant que musulman on est pointé du doigt", estime sous couvert de l'anonymat un banquier franco-algérien de trente ans, qui s'apprête à quitter son pays en juin, direction Dubaï.

Il évoque notamment certaines chaînes d'info et éditorialistes assimilant tous les musulmans à des extrémistes religieux ou des fauteurs de troubles.

Ce fils d'une femme de ménage algérienne, titulaire de deux masters, estime en outre s'être heurté à un "plafond de verre" dans son parcours professionnel en France.

En France, les statistiques ethniques et religieuses sont interdites. Mais de nombreuses enquêtes documentent depuis des années les discriminations frappant les personnes d'origine immigrée dans la recherche d'emploi, de logement, les contrôles policiers...

Un candidat au nom français a près de 50% de chances supplémentaires d’être rappelé par un employeur par rapport à un candidat au nom maghrébin, rappelle ainsi l'Observatoire des inégalités dans son rapport 2023.

'Morosité'

Le rapport très particulier de la France à la laïcité, les polémiques récurrentes sur le voile musulman, provoquent aussi le malaise chez certains.

"Il y a une vraie spécificité française sur cette question. Dans notre pays, une femme qui porte le voile est reléguée à la marge de la société et il lui est notamment très difficile de trouver un emploi. Des femmes portant le hidjab qui veulent travailler sont donc assez logiquement amenées à quitter la France", explique Olivier Esteves, l'un des auteurs de l'étude, au Monde.

"On étouffe en France", raconte à l'AFP un Français de 33 ans d'origine marocaine, qui s'apprête à émigrer en Asie du sud-est avec sa femme enceinte, "pour vivre dans une société plus apaisée et où les communautés savent vivre ensemble".

Cet employé dans la tech veut fuir "la morosité ambiante" et les "humiliations" du quotidien liées à son patronyme et ses origines.

"On me demande encore aujourd’hui ce que je fais dans ma résidence", où il vit depuis plusieurs années. "Et c’est pareil pour ma mère quand elle me visite. Mais ma femme qui est blanche de peau n’a jamais eu cette question", raconte-t-il.

"Cette humiliation constante est d’autant plus frustrante que je contribue net à cette société en faisant partie des hauts revenus qui paient plein pot", s'insurge-t-il.

Paradoxalement, la société française est pourtant "plus ouverte qu'il y a vingt ans" et "le racisme recule", souligne le dernier rapport annuel de l'Observatoire des inégalités, notant que 60% des Français déclarent n'être "pas du tout racistes", soit deux fois plus qu'il y a 20 ans.

Et la part de ceux qui pensent qu’il y a des "races supérieures à d’autres" a été divisée par trois, de 14% à 5%.


Les députés érigent l'agriculture en « intérêt général majeur »

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  • "La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux"
  • L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein

PARIS: Les députés ont approuvé jeudi un article du projet de loi agricole qui prévoit de conférer à l'agriculture un caractère "d'intérêt général majeur", une innovation juridique censée répondre à une demande des agriculteurs, mais dont les oppositions contestent la portée.

"La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux", énonce cet article-clé du projet de loi.

L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein. "Sur le plan juridique, ça positionne l'agriculture en équilibre avec l'environnement", avait approuvé Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, premier syndicat agricole.

"Cela va venir produire, sur le long terme, des effets dans la manière dont vont pouvoir être pondérés différents objectifs de politiques publiques, et dans la manière dont, sur le terrain, des projets agricoles pourront être évalués, réalisés et développés", a affirmé le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau.

Plusieurs députés -- à l'instar de juristes --, doutent cependant de sa portée.

La mesure "crée le fantasme d'une remise en cause de la charte de l'environnement" et "donne l'illusion au monde paysan qu'on a répondu de façon démagogique à toutes ces attentes d'être au-dessus du reste des normes, du droit", a fustigé Dominique Potier (PS).

Nicole Le Peih, rapporteure Renaissance, a admis qu'il s'agissait d'une "innovation juridique" qui ne "modifie pas la hiérarchie des normes".

"Il n'y a pas de remise en cause du principe constitutionnel de la protection de l'environnement" mais "lorsque plusieurs dispositions législatives seront en présence, voire seront contradictoires, l'agriculture fera désormais l'objet d'une attention spécifique", a-t-elle soutenu.

« Intentions »

L'article propose également une longue définition de la souveraineté alimentaire et agricole de la France, reposant notamment sur sa capacité à "produire, transformer et distribuer" les produits nécessaires à "une alimentation suffisante, saine (et) sûre".

Il pose aussi le principe "d'ici au 1er juillet 2025 puis tous les dix ans d'une programmation pluriannuelle de l'agriculture".

Le reste consiste surtout en une longue liste de bonnes pratiques que les politiques publiques sont censées suivre pour assurer cette "souveraineté alimentaire".

L'article a surtout permis à chaque groupe de faire valoir sa vision de l'agriculture, et au camp présidentiel de jouer la carte de la co-construction.

Il a intégré certains objectifs proposés par Les Républicains (justifier et évaluer les surtranspositions avant de les mettre en place, valoriser les agricultrices) ou la gauche (améliorer les conditions de travail des agriculteurs, développer la prévention sanitaire).

Mais l'article "n'a aucune valeur normative" et n'apporte "aucune contrainte", a déploré Sébastien Jumel (PCF). Aurélie Trouvé (LFI), a dénoncé l'absence de mesures pour des "prix planchers".

"C'est caricatural", a rétorqué Henri Alfandari (Horizons), estimant que les agriculteurs demandaient aussi de la clarté sur leurs missions. L'article pose des "intentions qui encouragent", pour Julien Dive (LR).

Les députés RN ont eux fustigé le manque de soutien à leurs amendements.

Les règles de la procédure parlementaire ont aussi donné lieu à une fin de séance kafkaïenne, les députés passant près d'une heure et demie à voter ou rejeter près de 560 amendements, dont certains avaient été débattus de nombreuses heures auparavant.

"C'était complètement dingue", soupirait une députée en sortant, mi-amusée, mi-fatiguée.