L'Europe recherche nouveau leader, désespérément

Angela Merkel, remplacée début décembre par le social-démocrate Olaf Scholz à la tête du gouvernement allemand, a marqué l'Europe de son empreinte en aidant à maintenir sa cohésion dans une longue série de crises. (Photo, AFP)
Angela Merkel, remplacée début décembre par le social-démocrate Olaf Scholz à la tête du gouvernement allemand, a marqué l'Europe de son empreinte en aidant à maintenir sa cohésion dans une longue série de crises. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 28 décembre 2021

L'Europe recherche nouveau leader, désespérément

  • La compétition pour le leadership est ouverte en vue de 2022 mais, selon des experts, les attentes risquent d'être déçues
  • Aucun dirigeant ne semble en avoir à l'heure actuelle la capacité à lui seul, tant les défis auxquels l'UE fait face sont profonds, du recul de l'Etat de droit en son sein même, au risque de marginalisation géopolitique ou aux contrecoups du Brexit

BERLIN : Emmanuel Macron, Mario Draghi ou Olaf Scholz? Qui pour remplacer Angela Merkel comme locomotive de l'Europe après le vide laissé par le départ de la chancelière au terme de 16 années au pouvoir?

La compétition pour le leadership est ouverte en vue de 2022 mais, selon des experts, les attentes risquent d'être déçues.

Aucun dirigeant ne semble en avoir à l'heure actuelle la capacité à lui seul, tant les défis auxquels l'UE fait face sont profonds, du recul de l'Etat de droit en son sein même, au risque de marginalisation géopolitique ou aux contrecoups du Brexit.

Angela Merkel, remplacée début décembre par le social-démocrate Olaf Scholz à la tête du gouvernement allemand, a marqué l'Europe de son empreinte en aidant à maintenir sa cohésion dans une longue série de crises.

Elle "est perçue comme la leader +de fait+ de l'Union européenne et aussi celle du monde libre", juge Sebastian Reiche, professeur à l’université IESE de Navarre en Espagne, sur son blog.

Selon une récente enquête du think tank European Council on Foreign Relations, les citoyens européens, s'ils le pouvaient, voteraient à 41% pour Angela Merkel comme présidente de l'Europe, contre seulement 14% Emmanuel Macron. 

Opportunité pour Macron

Le chef de l'Etat français se voit néanmoins offrir un tremplin avec la présidence semestrielle de l'UE que Paris assurera à partir de janvier.

Il a affiché ses ambitions en disant vouloir oeuvrer pour "une Europe puissante dans le monde, pleinement souveraine, libre de ses choix et maître de son destin".

La départ de Merkel "pourrait permettre à la vision française" de l'Europe de s'imposer, confirme Alexandre Robinet-Borgomano, dans une note d'analyse publiée par l'Institut Montaigne.

Emmanuel Macron "mène la charge" pour reprendre le leadership européen, "alors que ses tentatives auto-proclamées de donner à l'Union européenne un objectif clairement politique ont été jusqu'ici freinées", juge en écho Helen Thompson, professeure à l'université de Cambridge, dans une tribune récente dans le New York Times.

Le traité franco-italien qu'il vient de signer avec Mario Draghi n'est dans ce contexte pas passé inaperçu, au moment où se nouent de nouvelles alliances dans l'Europe post-Brexit.

Les deux hommes viennent aussi de lancer un appel commun à réformer les règles budgétaires européennes afin de permettre davantage de dépenses d'investissement. Une initiative de nature à déplaire aux pays du Nord de l'Europe, plus orthodoxes sur les finances publiques.

D'autant que le chef du gouvernement italien, surnommé "Super Mario" après son passage à la tête de la Banque centrale européenne, est lui aussi considéré comme un candidat potentiel au leadership européen.

«Super Mario»

"Mario Draghi pourrait combler le vide laissé par Angela Merkel en tant que bâtisseur de consensus" dans l'UE "et contrairement à l'approche de Merkel il pourrait injecter un nouveau dynamisme en matière d'intégration européenne dans les domaine économique ou de défense", indique à l'AFP Nicoletta Pirozzi, du think tank Istituto Affari Internazionali de Rome.

Néanmoins, M. Draghi pourrait se rabattre en 2022 sur le poste de chef de l'Etat, fonction aux prérogatives limitées.

Le président français, lui, affrontera sur le plan intérieur une année 2022 difficile avec un scrutin présidentiel au printemps à l'issue très incertaine.

La France pourrait de ce fait être accaparée par ses convulsions politiques intérieures, freinant sa capacité à développer de grandes visions européennes.

Quid d'Olaf Scholz? En Allemagne, longtemps surnommée la "Grande Suisse" pour sa propension à se focaliser sur sa prospérité économique sans trop s'engager sur les grandes questions internationales, les lignes bougent.

"Nous voulons accroître la souveraineté stratégique de l'Union européenne", souligne ainsi le programme du nouveau gouvernement à Berlin. En outre Olaf Scholz va assurer à partir de janvier la présidence du G7.

Mais pour assumer le leadership européen, le nouveau chancelier, qui se présente en héritier de Merkel, devra se faire violence.

Il va lui falloir rompre avec le "Merkélisme", cette diplomatie de recherche permanente du compromis, d'attentisme dans les crises et de priorité donnée aux intérêts économiques, y compris avec les régimes autoritaires comme la Russie et la Chine.

Car ce système atteint ses limites. "Il ne devrait pas réussir à survivre à Merkel" car il ne permet pas de "régler bien des défis de l'Europe, telle que la pandémie, le changement climatique et la compétition géopolitique internationale", jugent Piotr Buras et Jana Puglierin dans leur analyse de l'ECFR (Conseil européen en relations étrangères).

Europe sans tête?

Emmanuel Macron, partisan de solutions plus vigoureuses, est-il dans ce contexte le mieux placé?

"Même si un leadership de Macron reste une option (...) elle est peu probable" en raison des difficultés qu'il aura à forger "les alliances" nécessaires, avertit le professeur Sebastian Reiche. Paris reste souvent soupçonné de vouloir utiliser l'Europe pour défendre surtout ses intérêts.

Helen Thompson se montre encore plus pessimiste. 

"Fragilisée par la rivalité entre les Etats-Unis et la Chine, profondément divisée sur le plan interne (...) l'Union européenne ne peut pas être dirigée à l'heure actuelle, personne ne va devenir le nouveau Mme Merkel", juge la professeure de Cambridge.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
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  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.


L'axe Pékin-Moscou, facteur de «stabilité» et de «paix» selon Xi et Poutine

Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping assistent à un concert marquant le 75e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine (Photo, AFP).
Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping assistent à un concert marquant le 75e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine (Photo, AFP).
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  • Tout juste de retour d'une tournée en Europe, Xi Jinping y a défendu le droit de maintenir avec son voisin russe des liens économiques normaux
  • Vladimir Poutine est arrivé jeudi matin à Pékin pour une visite de deux jours, son premier voyage à l'étranger depuis sa réélection en mars et son deuxième en Chine en un peu plus de six mois

PEKIN: Xi Jinping et Vladimir Poutine ont défendu jeudi l'axe Pékin-Moscou comme un facteur de "stabilité" et de "paix" dans le monde, le dirigeant russe espérant un soutien accru de la Chine à sa guerre en Ukraine.

La relation Chine-Russie "est non seulement dans l'intérêt fondamental des deux pays et des deux peuples, mais elle est également propice à la paix", a estimé Xi Jinping, lors d'une rencontre avec son homologue à Pékin.

Et "la Chine est prête à travailler avec la Russie pour (...) soutenir l'équité et la justice dans le monde". "La relation Chine-Russie aujourd'hui a été durement acquise et les deux parties doivent la chérir et la nourrir", a-t-il ajouté.

Cette relation est "un facteur de stabilité sur la scène internationale", a assuré de son côté Vladimir Poutine, selon le Kremlin. Elle "n'est pas opportuniste et elle n'est dirigée contre personne".

"Ensemble, nous soutenons les principes de justice et un ordre démocratique mondial reflétant les réalités multipolaires et fondé sur la loi internationale", a-t-il déclaré.

Après leur entretien bilatéral, les deux hommes ont signé un communiqué commun pour approfondir le "partenariat stratégique global" sino-russe, selon l'agence officielle Chine nouvelle.

«Reconnaissant»

Vladimir Poutine est arrivé jeudi matin à Pékin pour une visite de deux jours, son premier voyage à l'étranger depuis sa réélection en mars et son deuxième en Chine en un peu plus de six mois.

Quelques heures plus tôt, il s'était félicité des avancées de l'armée russe en Ukraine.

Dans leur communiqué commun jeudi, Pékin et Moscou jugent "nécessaire" d'éviter toute décision contribuant "à la prolongation des hostilités et à une nouvelle escalade du conflit".

Une formulation qui semble viser Européens et Américains, la Chine et la Russie affirmant régulièrement que ce sont les livraisons d'armes occidentales à l'Ukraine qui font durer la guerre.

Le géant asiatique est une planche de salut économique cruciale pour la Russie, en proie aux lourdes sanctions occidentales.

Tout juste de retour d'une tournée en Europe, Xi Jinping y a défendu le droit de maintenir avec son voisin russe des liens économiques normaux. La Chine bénéficie notamment d'importations d'énergie russe bon marché.

S'exprimant devant la presse au côté de Xi Jinping, Vladimir Poutine s'est dit jeudi "reconnaissant" envers la Chine pour ses "initiatives" de paix dans la crise ukrainienne, selon les agences russes.

La Chine appelle régulièrement au respect de l'intégrité territoriale de tous les pays (sous-entendu Ukraine comprise) mais exhorte aussi à prendre en considération les préoccupations de sécurité de la Russie.

Ligne rouge 

"Les deux parties sont d'accord sur le fait qu'une solution politique à la crise en Ukraine est la voie à suivre", a déclaré M. Xi face à la presse.

"La Chine espère que la paix et la stabilité seront rapidement rétablies sur le continent européen et continuera à jouer un rôle constructif à cette fin", a-t-il promis.

Par ailleurs, Vladimir Poutine a jugé "nuisible" toute alliance politique et militaire "fermée" en Asie-Pacifique, où son partenaire chinois est en concurrence avec les Etats-Unis, qui coopèrent avec l'Australie et le Royaume-Uni pour contrer l'influence de Pékin.

Le président russe a également rencontré jeudi après-midi le Premier ministre Li Qiang, lequel a déclaré que Pékin souhaitait "continuer à approfondir la coopération dans divers domaines" avec Moscou.

Ces liens sino-russes étroits sont vus avec une suspicion croissante en Occident.

Washington a fixé une ligne rouge à Pékin - ne pas fournir directement d'armes à Moscou - et dit n'avoir à ce jour pas eu la preuve du contraire.

Mais les Etats-Unis estiment que le soutien économique chinois permet tout de même à la Russie de renforcer sa production de missiles, de drones et de chars.

Banques prudentes 

Les échanges commerciaux sino-russes ont explosé depuis l'invasion de l'Ukraine, dépassant les 220 milliards d'euros en 2023, selon les douanes chinoises.

Les exportations chinoises vers le voisin russe ont toutefois baissé en mars et en avril, après la menace de sanctions américaines.

Car un décret signé en décembre par le président américain Joe Biden autorise désormais des sanctions secondaires contre les banques étrangères liées à la machine de guerre russe. Le Trésor américain peut les exclure du système financier mondial, fondé sur le dollar.

Plusieurs banques chinoises ont ainsi interrompu ou réduit leurs transactions avec leurs clients russes, selon huit ressortissants des deux pays impliqués dans le commerce bilatéral.

La Chine cherche parallèlement à renouer ses liens avec les Etats-Unis et devrait limiter le renforcement de sa coopération avec la Russie, selon des analystes.

Moscou et Pékin ont toutefois signé jeudi plusieurs accords commerciaux.

Vendredi, Vladimir Poutine doit se rendre à Harbin (nord-est) pour visiter une foire dédiée au commerce et aux investissements.


Le Premier ministre slovaque dans un état stable mais toujours «très grave»

Le Premier ministre slovaque Robert Fico transporté d'un hélicoptère par des médecins et ses agents de sécurité à l'hôpital de Banska Bystrica, en Slovaquie, où il doit être soigné, le 15 mai 2024. (Photo de AFP)
Le Premier ministre slovaque Robert Fico transporté d'un hélicoptère par des médecins et ses agents de sécurité à l'hôpital de Banska Bystrica, en Slovaquie, où il doit être soigné, le 15 mai 2024. (Photo de AFP)
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  • Le dirigeant de 59 ans a subi mercredi «une opération de cinq heures», a précisé la directrice de l'établissement Miriam Lapunikova
  • Selon le vice-Premier ministre, il s'agit d'«une attaque politique» à laquelle il faudra «réagir en conséquence»

BANSCA BYSTRICA: Le Premier ministre slovaque Robert Fico se trouve jeudi matin dans un état stable mais toujours "très grave", après avoir été blessé par balle la veille, a déclaré le vice-Premier ministre Robert Kalinak.

"Cette nuit, les médecins ont réussi à stabiliser l'état du patient", a déclaré M. Kalinak, qui est également ministre de la Défense. "Malheureusement, l'état reste très grave, car ses blessures sont compliquées", a-t-il ajouté lors d'un point de presse devant l'hôpital Roosevelt de Banska Bystrica (centre).

Le dirigeant de 59 ans a subi mercredi "une opération de cinq heures", a précisé la directrice de l'établissement Miriam Lapunikova, confirmant qu'il est toujours dans un état "vraiment très grave" et va rester en soins intensifs.

Robert Fico a été touché par balle "plusieurs fois", selon sa page officielle Facebook, mercredi en début d'après-midi après une réunion de cabinet à Handlova, dans le centre de la Slovaquie. L'attentat a suscité une vive émotion dans le pays d'Europe centrale et une vague de condamnations internationales.

Selon M. Kalinak, il s'agit d'"une attaque politique" à laquelle il faudra "réagir en conséquence".

La police a arrêté l'assaillant présumé, un homme de 71 ans identifié par les médias slovaques comme un écrivain local. Aucune information n'a été donnée à ce stade sur ses motivations.