BRUXELLES : La Belgique va arrêter comme prévu ses sept réacteurs nucléaires à l'horizon 2025, mais ne ferme pas la porte au nucléaire de nouvelle génération qui fera l'objet d'un programme de recherche, a annoncé jeudi le Premier ministre Alexander De Croo.
Un accord sur ce dossier ultra-sensible a été conclu à l'aube entre les sept partis partenaires de la coalition gouvernementale, à l'issue d'une nuit de négociations.
La sortie progressive du nucléaire est inscrite dans la loi depuis 2003, mais les gouvernements successifs ont tardé à développer les capacités susceptibles de compenser l'arrêt des sept réacteurs, d'une puissance cumulée de 6 gigawatts (GW).
La dernière échéance retenue pour un arrêt complet de ces vieilles centrales est 2025, une date que le gouvernement actuel s'est engagé à respecter en entrant en fonction en octobre 2020.
Malgré l'opposition des libéraux francophones du MR, un des sept partis de la coalition, qui réclame de conserver 2 GW, l'arrêt des sept réacteurs à l'horizon 2025 a été confirmé jeudi, sous certaines conditions.
Le gouvernement, un attelage de libéraux, socialistes et écologistes, veut garantir "la sécurité d'approvisionnement" énergétique du pays et "la maîtrise des prix", a réaffirmé Alexander De Croo lors d'une conférence de presse. Le nucléaire compte pour environ 40% de l'électricité produite en Belgique.
"Nous avons prévu plusieurs moments d’évaluation pour vérifier que nous sommes sur la bonne voie", a ajouté le dirigeant libéral flamand.
«Filet de sécurité»
Il a notamment évoqué un rendez-vous à la mi-mars pour vérifier qu'une solution alternative est bien possible si le permis de bâtir une nouvelle centrale au gaz près de Bruxelles n'est toujours pas octroyé.
Cette centrale, prévue sur la commune flamande de Vilvorde, est une installation clé dans le dispositif du gouvernement pour assurer la sécurité d'approvisionnement. Mais début novembre la ministre de l'Environnement de la région flamande avait refusé le permis au groupe français Engie, l'exploitant choisi au terme d'un système d'enchères mis au point au niveau fédéral.
Selon une source gouvernementale, il est envisagé, comme alternative, d'opter pour une autre installation non sélectionnée lors des enchères dès lors qu'elle disposerait déjà d'un permis.
Globalement, le compromis qui s'est dégagé au sein de la coalition retient "le plan A" de sortie du nucléaire défendu par la ministre de l'Energie Tinne Van der Straten: "L'accord confirme le mécanisme d'investissements mis en place pour remplacer le nucléaire actuel qui est obsolète", a ajouté cette source gouvernementale.
Le Premier ministre a évoqué, lui, "un plan A renforcé" avec un certain nombre de garde-fous dont cette alternative à la centrale de Vilvorde.
L'accord prévoit aussi un investissement d'environ 100 millions d'euros dans la recherche sur le nucléaire de nouvelle génération, à savoir les petits réacteurs modulaires (SMR) présentés comme "plus sûrs".
"C'est avec un regard ouvert vers l'innovation et les nouvelles technologies que nous envisageons le futur énergétique", a plaidé M. De Croo, rappelant l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050 auquel doivent aussi contribuer les renouvelables (solaire, éolien offshore).
De son côté, le chef des libéraux francophones Georges-Louis Bouchez n'a pas déposé les armes. Il est allé jusqu'à affirmer que "la sortie du nucléaire n'a pas été décidée", évoquant le délai de trois mois que le gouvernement se réserve par sécurité.
Le maintien de certaines capacités peut toujours être activé "comme filet de sécurité", a-t-il dit, soulignant que l'autorité belge de sûreté du nucléaire (AFCN) aurait elle aussi son mot à dire début 2022.