BEYROUTH: Des habitants de Beyrouth ayant subi des dommages après des affrontements meurtriers avec le Hezbollah ont déposé une plainte pénale jeudi contre le chef du groupe soutenu par l'Iran.
Les avocats ont déposé une plainte devant le bureau du procureur d'appel du Mont-Liban contre le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, et «tous ceux qui apparaissent dans l'enquête».
Cette intervention judiciaire fait suite à une position ferme adoptée par le Hezbollah contre le juge chargé de l’enquête sur l'explosion de Beyrouth en août 2020, provoquant un conflit qui empêche le cabinet du Premier ministre, Najib Mikati, de se réunir depuis le 12 octobre, alors même que les crises s'accumulent et que la pauvreté et la faim s'aggravent dans le pays.
Les avocats ont déposé plainte au nom des habitants de la région de Ain el-Remmaneh.
Les habitants ont été touchés par les incidents de Tayouneh le 14 octobre, à la suite de l'entrée des partisans du Hezbollah et du mouvement Amal dans la zone et de l'attaque de propriétés.
De violents affrontements ont éclaté lorsque le Hezbollah et le mouvement Amal ont organisé des manifestations, appelant à la destitution du juge Tarek Bitar, qui dirige l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth.
La manifestation du 14 octobre a transformé Beyrouth en une zone de guerre, avec des échanges de tirs à balles réelles entre partis rivaux, faisant sept morts.
La plainte pénale déposée jeudi coïncide avec un désaccord entre le Courant patriotique libre et pratiquement son seul allié au pouvoir, le Hezbollah.
Ce désaccord fait suite à la décision du Conseil constitutionnel de rejeter le recours présenté par le Courant patriotique libre (CPL) concernant les modifications apportées par le Parlement à la loi électorale.
Le président libanais, Michel Aoun, et son équipe politique, représentée par le CPL, estiment que ces changements ne sont pas dans leur intérêt.
Le chef du CPL, Gebran Bassil, en coordination avec le président du Parlement, Nabih Berri, a exprimé son mécontentement envers le Hezbollah lors d'une conférence de presse mardi, au cours de laquelle il a tenu le groupe pour responsable de ce qui s'est passé.
Les partisans du CPL se sont également rendus sur les plate-formes de réseaux sociaux pour partager leur colère et leur mécontentement envers le groupe.
Ce désaccord entre les deux alliés est le premier du genre depuis l'accord de Mar Mikhael de février 2006.
Malgré les différences entre le CPL et le Hezbollah depuis plus de 15 ans, leur relation n'a jamais été profondément ébranlée.
Le CPL «est confronté à une crise électorale», ont révélé les observateurs politiques.
Ils ont exprimé des doutes sur la possibilité que le CPL remporte 12 sièges aux prochaines élections parlementaires, notant qu'il dispose aujourd’hui du plus grand bloc au Parlement.
Ils ont ajouté: «Les analyses indiquent même que le siège parlementaire de Bassil est menacé, parce qu’il y a 27 000 voix dans la troisième circonscription électorale où il se présentera et la plupart voteront certainement contre lui.»
Il n'est pas certain que le Hezbollah et le CPL se rencontrent prochainement à la lumière des critiques féroces de Bassil.
Bassil, parmi 10 députés du CPL, a demandé de programmer une séance parlementaire de responsabilité pour le gouvernement.
Le cabinet est paralysé depuis la mi-octobre, le Hezbollah et le mouvement Amal ayant décidé que leurs ministres boycotteraient les séances jusqu'à ce que deux demandes soient satisfaites.
Ils demandent d’abord le retrait du juge Bitar de l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth et ensuite l'arrestation de toutes les personnes impliquées dans la fusillade de leurs partisans de Ain el-Remmaneh lors de l'incident de Tayouneh.
Le juge Naji Eid, président de la première chambre de cassation de la Cour civile, a accepté jeudi la demande de réponse déposée par les représentants des anciens ministres Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaiter contre Bitar, concernant l'enquête sur l'explosion du port.
Bitar a été informé de cette réponse, qui est la septième proposition de son exclusion de l'enquête.
En ce qui concerne l’absence de réponse du Hezbollah aux critiques de Bassil, le parti a répondu aux positions du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, moins de 12 heures après son départ du Liban, soulignant la nécessité de mettre en œuvre la résolution 1701 du Conseil de sécurité, qui a été rédigée dans l'intention de mettre fin à la guerre de 2006.
Pendant ce temps, un certain nombre de jeunes hommes à Chaqra, dans la vallée de la Bekaa au sud du fleuve Litani, ont intercepté une patrouille de la Force intérimaire des Nations unies, brisant les vitres des voitures et attaquant les troupes, sous prétexte qu'elles entraient dans la ville sans l'armée libanaise et filmaient les quartiers.
Le Hezbollah organise souvent des manifestations violentes similaires sous prétexte que ses membres agissent en tant que citoyens inquiets.
L'armée libanaise est arrivée sur les lieux et a protégé les soldats internationaux et leurs véhicules.
La Finul a confié aux autorités libanaises la responsabilité de cet «incident dangereux», leur demandant d'enquêter et de traduire les coupables en justice.
Une déclaration de Candice Ardel, directrice adjointe du Bureau de presse de la Finul, a fait référence à l'accent mis par Guterres, lors de sa visite sur la Ligne bleue au sud du Liban, sur la nécessité pour les opérations de la Finul d'avoir un accès complet, sans aucun obstacle, à toutes les zones, conformément à la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU.
À l'issue de sa visite au Liban, Guterres a souligné lors d'une conférence de presse mercredi que «les dirigeants libanais n'ont pas le droit de punir le peuple en continuant à être en désaccord».
Il a également souligné «la nécessité pour le Hezbollah de devenir un parti politique comme le reste des pouvoirs politiques du pays».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com