VARSOVIE: La Pologne a rejeté mardi les accusations selon lesquelles elle aurait utilisé le logiciel d'espionnage Pegasus à des fins politiques, après qu'un avocat connu opposé au gouvernement national-populiste et une procureure ont déclaré avoir été pris pour cible.
"La suggestion selon laquelle les services polonais ont utilisé des méthodes opérationnelles à des fins politiques est injustifiée", a déclaré Stanislaw Zaryn, le porte-parole du ministère chargé des services secrets.
Roman Giertych, un avocat impliqué dans plusieurs affaires contre le parti au pouvoir Droit et Justice (PiS), a déclaré au quotidien Gazeta Wyborcza que la Pologne utilisait le logiciel espion "pour combattre l'opposition démocratique".
"L'utilisation de ce type de programme pour combattre l'opposition élimine complètement le sens des élections démocratiques", a-t-il déclaré, expliquant que le logiciel espion a été utilisé avant les élections de 2019.
Ewa Wrzosek, une procureure et une figure de l'opposition, a également déclaré que le logiciel espion avait été utilisé contre elle et a affirmé avoir été alertée par Apple.
Citizen Lab, un laboratoire de surveillance de la cybersécurité dont le siège est au Canada, a confirmé l'utilisation de Pegasus contre M. Giertych et Mme Wrzosek.
"Nous avons mené ces enquêtes et fourni la confirmation aux deux personnes citées qu'elles ont été infectées à plusieurs reprises par le logiciel espion Pegasus", a déclaré à l'AFP John Scott Railton, chercheur principal chez Citizen Lab.
Une fois installé dans un téléphone mobile, Pegasus permet d'accéder aux messageries et données de l'utilisateur, mais également d'activer l'appareil à distance pour capter le son ou l'image.
La chaîne de télévision polonaise privée TVN a rapporté en 2019 que l'agence d'Etat de lutte contre la corruption CBA avait dépensé 7,6 millions d'euros en logiciels espions pour téléphones.
Mardi, M. Zaryn a déclaré que les activités de "contrôle opérationnel" étaient menées conformément à la loi, uniquement après avoir obtenu le consentement du procureur général et une décision d'un tribunal.
Il n'a pas confirmé ou infirmé si la Pologne avait utilisé Pegasus.
Contacté par l'AFP, le propriétaire israélien de Pegasus a déclaré qu'il n'était vendu qu'"à des organismes légitimes d'application de la loi qui utilisent ces systèmes dans le cadre de mandats afin de lutter contre les criminels, les terroristes et la corruption".
"Dès lors qu'un pays démocratique utilise légalement, en suivant une procédure régulière, des outils pour enquêter sur une personne soupçonnée d'avoir commis un crime, cela ne serait en aucun cas considéré comme une utilisation abusive de ces outils", a déclaré à l'AFP un porte-parole du groupe NSO.
Au début de l'année, la Hongrie était le seul pays de l'UE cité par un consortium de journalistes d'investigation comme un utilisateur potentiel de Pegasus, avec des centaines de cibles, dont des journalistes, des avocats et d'autres personnalités publiques.
Un haut responsable du parti au pouvoir en Hongrie, le Fidesz, Lajos Kosa, a confirmé le mois dernier que son pays avait utilisé le logiciel.