BRUXELLES: La difficile coordination face à la progression du variant Omicron est au coeur du sommet des dirigeants des Vingt-Sept jeudi à Bruxelles, qui entendent aussi faire front commun pour dissuader la Russie d'une attaque contre l'Ukraine.
Face à la menace d'un nouveau conflit entre Moscou et Kiev, la Commission européenne a préparé un paquet d'options de sanctions supplémentaires en cas d'agression russe, sans vouloir les dévoiler.
"Nous sommes prêts (...) Le coût à payer par la Russie sera très élevé et il y aura des conséquences graves", avait assuré mercredi soir la présidente de l'exécutif européen, Ursula von der Leyen.
La question sera débattue lors d'un déjeuner, lors duquel les leaders seront invités à se défaire de leur téléphone, par souci de confidentialité.
"Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter le pire scénario (...) Nous disposons de suffisamment d'outils pour mettre un terme au comportement agressif de la Russie", a estimé le président lituanien, Gitanas Nauseda, à son arrivée, évoquant des "sanctions sectorielles et aussi économiques".
"Nous allons réaffirmer que l'inviolabilité des frontières est l'un des fondements essentiels de la paix en Europe et que tous ensemble nous ferons tout pour la préserver", a assuré le chancelier allemand Olaf Scholz.
Sur le front de la pandémie, l'inquiétude autour de la propagation du nouveau variant Omicron, très contagieux, à l'approche des fêtes de fin d'année occupera les premiers échanges des chefs d'Etat et de gouvernement.
La France rétablit les «motifs impérieux» pour les voyages depuis et vers le Royaume-Uni
Le gouvernement français a annoncé jeudi rétablir à compter de samedi l'obligation de "motifs impérieux" pour les voyageurs en provenance et à destination du Royaume-Uni face à "la diffusion extrêmement rapide du variant Omicron" dans ce pays.
La validité des tests au départ du Royaume-Uni est réduite de 48 heures à 24 heures, et un système d'isolement à l'arrivée en France est également instauré, a confirme Matignon dans un communiqué, tout en appelant tous les voyageurs à "reporter leur voyage" au Royaume-Uni.
Confronté à une flambée des contaminations liée au variant Omicron du coronavirus, le Royaume-Uni a fait état mercredi de 78.610 cas positifs enregistrés en 24 heures, du jamais vu depuis le début de la pandémie en 2020, selon des chiffres officiels.
"Selon les propres termes du gouvernement britannique, le Royaume-Uni va se confronter à un +raz-de-marée+ lié au variant Omicron dans les prochains jours", a justifié Matignon.
Ainsi, "à compter de ce samedi matin 0 heure", il y aura "obligation de disposer d'un motif impérieux pour se rendre ou venir du Royaume-Uni, pour les personnes non vaccinées comme les personnes vaccinées", mais ces motifs "ne permettront pas de se déplacer pour raisons touristiques ou professionnelles", a précisé le gouvernement dans son communiqué.
Pourront se rendre au Royaume-Uni ou entrer en France pour "motif impérieux" tout "ressortissant français, ainsi que son conjoint (marié, pacsé et concubin) et ses enfants", et tout "ressortissant britannique et membres de sa famille bénéficiaires de l'accord" sur le Brexit.
De même pour les "ressortissant(s) de l'Union européenne ou assimilé" ainsi que leurs conjoints et leurs enfants ayant leur résidence principale en France", et les "ressortissants de pays tiers, titulaires d'un titre de séjour ou d’un visa de long séjour français ou européen" résidant en France.
Isolement
Peuvent également bénéficier d'un "motif impérieux" les voyageurs "en transit de moins de 24 heures en zone internationale dans les aéroports", certains étudiants inscrits "dans des cours de français langue étrangère (FLE)" ou bien encore certains professionnels de santé.
En outre, les voyageurs, y compris les personnes vaccinées, devront présenter au départ un test PCR ou antigénique négatif de moins de 24h.
Cela "équivaut à un alignement avec les règles valant d'ores et déjà pour les personnes non vaccinées", a fait valoir le gouvernement.
Un système d'isolement est par ailleurs instauré. Avant le départ du Royaume-Uni, il faudra "s'enregistrer sur une plateforme numérique" et identifier l’adresse du séjour en France. "Cette plateforme permettra de générer des arrêtés préfectoraux fixant l’obligation d’isolement dans le lieu de leur choix à tous les voyageurs, non vaccinés comme vaccinés", mais cet isolement pourra être levé "à compter de 48h" en cas de test négatif.
"Des contrôles seront organisés de façon à garantir la bonne mise en œuvre de ces mesures", a encore souligné Matignon
L'objectif de ce "contrôle encore plus drastique que celui qui existe aujourd'hui" pour les voyageurs en provenance du Royaume-Uni est de "ralentir au maximum l'arrivée de cas de variant Omicron sur notre sol, le temps qu'on vaccine avec des doses de rappel", avait expliqué un peu plus tôt le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal sur BFMTV et RMC.
"Cela permet de resserrer encore les mailles du filet pour ralentir au maximum" sa propagation, a-t-il insisté, au moment où "le variant Omicron devient majoritaire en Grande-Bretagne, s'il ne l'est pas déjà".
En France 240 cas ont été détectés, mais "il y en a probablement plus", a ajouté M. Attal
Omicron pourrait devenir dominant en Europe d'ici mi-janvier, selon la Commission.
Les dirigeants devraient souligner l'importance d'étendre encore la vaccination, et notamment l'administration des doses de rappel. Quelque 67% de la population européenne est pleinement vaccinée mais ce taux est inférieur à 50% dans trois pays (Bulgarie, Roumanie, Slovaquie), la Croatie étant pour sa part à peine au-dessus (50,4%).
La question de la vaccination obligatoire, que se préparent à imposer l'Autriche et l'Allemagne, devrait être abordée, même si le sujet relève du choix de chaque Etat membre, et non de l'UE. Cette option doit être prise en "dernier ressort absolu", pour l'OMS.
Vaccin et test
Si la vaccination reste "clé", elle "ne suffira pas" à elle toute seule à empêcher les transmissions et à alléger le fardeau sur les systèmes de santé, a toutefois averti mercredi l'agence européenne chargée des épidémies, préconisant la réintroduction rapide de mesures telles que le télétravail, le port du masque, la limitation de l'affluence dans les transports et les espaces publics...
Côté voyages, le variant a déjà mis à mal le certificat sanitaire européen mis en place par l'UE cet été pour permettre aux Européens de se déplacer le plus librement possible dans le bloc, sans se voir imposer de test ou de quarantaine.
Certains pays comme l'Irlande, le Portugal, l'Italie et la Grèce imposent désormais aux voyageurs européens, même vaccinés, de présenter un test négatif pour pouvoir entrer sur leur territoire.
La Commission européenne a rappelé à Rome la nécessité de prévenir ses partenaires de telles mesures, soulignant qu'elles devaient être "proportionnées" et d'une durée la plus courte possible.
Mais même si les Etats membres conviennent de la nécessité d'améliorer la coordination pour préserver le fonctionnement du marché intérieur et ne pas trop entraver la liberté de circulation, ces restrictions relèvent de leurs compétences nationales.
Le débat portera ensuite sur la crise de l'énergie, sur fond d'envolée des prix, même si aucune décision concrète n'est attendue. La réponse à apporter divise les pays, certains comme la France et l'Espagne, plaidant pour une réforme du marché européen de l'électricité tandis qu'une majorité d'Etats y restent réticents, estimant la crise conjoncturelle et jugeant plus efficaces les dispositifs nationaux de soutien aux consommateurs.
Autre sujet au programme, la migration, avec l'afflux récent de réfugiés aux frontières de trois pays européens que le Bélarus est accusé d'avoir orchestré, et plus globalement la volonté des Vingt-Sept de limiter les flux migratoires.
Les dirigeants veulent la mise en oeuvre "sans délai" de plans d'action avec une série de pays d'origine et de transit des migrants, et appellent la Commission à s'assurer que les "financements nécessaires sont mobilisés", selon une version provisoire des conclusions.
Le dîner sera consacré à un débat, en présence de la présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde, sur la situation économique en Europe et sur l'impact possible du nouveau variant sur la reprise.
Le chef de l'Etat français Emmanuel Macron, dont le pays prendra la présidence semestrielle de l'UE au 1er janvier et qui prévoit d'organiser un sommet en mars pour "définir un nouveau modèle de croissance européen", devrait s'exprimer sur ses ambitions.