ADDIS ABEBA: Le gouvernement éthiopien s'est plaint à Twitter de la suspension de comptes critiquant les rebelles tigréens, qu'il combat depuis plus d'un an dans le nord du pays, affirmant que le réseau social a été "infiltré par des sympathisants" rebelles.
"Nous avons des raisons de croire que Twitter cible et suspend les voix pro-éthiopiennes qui sensibilisent aux atrocités du TPLF (le Front de libération du peuple du Tigré, ndlr) et à ses mensonges", a déclaré mardi la porte-parole du Premier ministre, Billene Seyoum, lors d'une conférence de presse.
"Nous avons fait part à leur équipe que nous pensons que Twitter a été infiltré par des sympathisants du TPLF, de la même manière que de nombreuses institutions démocratiques et entreprises ont été infiltrées pour relayer le discours du TPLF", a-t-elle ajouté.
Mme Billene a déclaré ensuite à l'AFP qu'"une plainte officielle" a été adressée à Twitter.
Elle n'a pas précisé quelles "voix pro-éthiopiennes" avaient été suspendues.
Mais l'Érythrée voisine, qui a soutenu Abiy Ahmed dans le conflit, s'est plainte mardi de la suspension par Twitter des comptes du New Africa Institute, un groupe de réflexion autoproclamé qui se fait régulièrement l'écho des positions des gouvernements éthiopien et érythréen sur le conflit, et de son directeur exécutif Simon Tesfamariam.
Ce dernier "mérite des éloges, entre autres, pour ses recherches méticuleuses et ses rapports équilibrés pour contrer la désinformation des médias grand public résultant de préjugés politiques", a déclaré le porte-parole du gouvernement érythréen Yemane Gebremeskel sur Twitter.
"La suspension de ses comptes par Twitter est injustifiée et nécessite un examen urgent", a-t-il estimé.
Interrogé par l'AFP, un porte-parole de Twitter a indiqué que les comptes de Simon Tesfamariam avaient été suspendus pour violation de ses règles, "y compris de notre politique de manipulation de la plateforme et de spam".
"Cela inclut la création de plusieurs comptes pour publier du contenu en double (...) ainsi que l'exploitation de faux comptes", a-t-il déclaré, ajoutant que les règles sont appliquées "objectivement" et que Twitter est politiquement "neutre".
La guerre a éclaté en novembre 2020 dans le nord de l'Ethiopie après que le Premier ministre Abiy Ahmed a envoyé l'armée dans la région septentrionale du Tigré afin d'en destituer les autorités locales, issues du TPLF, qui défiaient son autorité et qu'il accusait d'avoir attaqué des bases militaires.
Soldats éthiopiens et érythréens ont été accusés de massacres et de viols au Tigré, tandis que plus récemment les rebelles tigréens ont été accusés d'exactions similaires dans les régions de l'Afar et de l'Amhara, où ils ont poursuivi leur offensive après avoir repris l'essentiel du Tigré en juin.
Une enquête conjointe publiée début novembre par le Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme et la Commission éthiopienne des droits de l'homme a alerté sur de possibles crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis par toutes les parties au conflit.