Depuis le début du siècle dernier, l’image et la fortune de l’Arabie saoudite sont inextricablement liées à un seul élément. La découverte et l’exploitation du pétrole ont bouleversé le mode de vie en Arabie saoudite et placé le pays au premier plan de l’économie mondiale basée sur le pétrole.
Mais les temps ont changé au cours des deux dernières décennies. Le pétrole et ses dérivés, comme le plastique et les produits pétrochimiques, font partie des principales causes du réchauffement climatique, de la pollution et de la catastrophe écologique. En Arabie saoudite, la pollution de l’air due aux gaz à effet de serre réduit d’un an et demi l’espérance de vie, tandis que la désertification et les tempêtes de sable provoquent des dégâts estimés à treize milliards de dollars (1 dollar = 0,86 euro) chaque année.
Ce sombre tableau est un signal d’alarme qui entraîne un changement radical à travers le monde: celui de s’éloigner de l’énergie à base de carbone et de l’hyperconsommation pour se diriger vers un mode de vie plus sain et plus durable.
Chef de file en matière d’énergie depuis des décennies, le royaume d’Arabie saoudite se place désormais à l’avant-garde de l’action environnementale. Cet effort s’inscrit dans le cadre de l’Initiative verte saoudienne (SGI) – un programme national visant à lutter contre la pollution et la dégradation des sols, accroître le couvert végétal, réduire les émissions de carbone et préserver la vie marine.
«Le Royaume reconnaît pleinement sa part de responsabilité dans la lutte contre la crise climatique. Tout comme le Royaume a soutenu les marchés de l’énergie à l’époque du pétrole et du gaz, il est sur le point de devenir un leader mondial dans la promotion d’un monde plus vert», déclare le prince héritier, Mohammed ben Salmane, responsable de la SGI.
Après avoir introduit le concept d’économie circulaire à faibles émissions de carbone (un système en circuit fermé impliquant les «4R»: réduire, réutiliser, recycler et revaloriser) lors de sa présidence du sommet du Groupe des vingt (G20) l’année dernière, l’Arabie saoudite joue à nouveau un rôle de chef de file en accueillant le prochain forum de la SGI, qui se tiendra à Riyad les 23 et 24 novembre.
Le forum permettra, selon ses propres termes, «de catalyser l’action climatique de manière coordonnée tant au niveau régional qu’international, de réunir des chefs d’État, des fonctionnaires, des chefs d’entreprise, des universitaires pionniers en la matière et des spécialistes de l’environnement ainsi que de stimuler l’action tout en mettant en place des solutions innovantes pour lutter contre le réchauffement climatique».
L’événement permettra de définir une feuille de route qui vise à mobiliser la région du Golfe et à contribuer aux objectifs mondiaux consentis, en faisant face au réchauffement climatique, en augmentant l’utilisation d’énergies propres, en compensant l’impact des effets des combustibles fossiles et en protégeant l’environnement.
La SGI est extrêmement ambitieuse. Dix milliards d’arbres doivent être plantés dans le Royaume au cours de la prochaine décennie, tout en réhabilitant quelque 40 millions d’hectares de terres dégradées et en multipliant par douze le couvert arboré actuel. Cela équivaut à 4 % de l’initiative mondiale visant à limiter la dégradation des sols et à 1 % de l’objectif qui consiste à planter mille milliards d’arbres dans le monde.
Le pourcentage d’aires protégées en Arabie saoudite atteindra plus de 30 % de la superficie totale – près de 600 000 kilomètres carrés – dépassant l’objectif mondial de 17 %. Les émissions de carbone seront réduites de 130 millions de tonnes grâce à un plan visant à générer 50 % de l’énergie du Royaume à partir d’énergies renouvelables d’ici à 2030; et les décharges – où 95 % des déchets sont actuellement déposés – ne représenteront plus que 5 % des déchets.
En réalité, la notion même de «déchets» fera partie d’une époque révolue, puisque chaque forme de déchet devient la matière première d’un produit à valeur ajoutée ou d’une source d'énergie – un élément phare du concept d’économie circulaire à faibles émissions de carbone.
La SGI travaillera de concert avec l’Initiative verte du Moyen-Orient vert qui comprend tous les États du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ainsi que d’autres pays de la région. L’objectif global est de planter 50 milliards d’arbres à travers le Moyen-Orient. Il s’agit du plus grand programme de reboisement au monde qui consiste à restaurer 200 millions d’hectares de terres dégradées. Les émissions de carbone de la région devraient être réduites de plus de 60 %, soit plus de 10 % de la réduction prévue à l’échelle mondiale.
Il est évident que la SGI a déjà des répercussions culturelles importantes, étant donné que les citoyens saoudiens sont habitués à mener une vie confortable dans laquelle les grosses voitures et les produits jetables occupent une place primordiale.
«Je pense que la SGI inaugurera une nouvelle ère pour l’humanité», déclare à Arab News Ziyad al-Shiha, directeur général de la Saudi Investment Recycling Company, une agence de premier plan dans le domaine de l’économie circulaire à faibles émissions de carbone.
«Nous sommes actuellement à un tournant et cela fait partie d’un changement majeur dans l’économie mondiale. Nous investissons sur le terrain, en travaillant avec des PME et des particuliers pour contribuer à l’économie circulaire à faibles émissions de carbone.»
L’écologisation de l'Arabie saoudite entraînera des changements dans la vie quotidienne des gens ordinaires et favorisera un état d’esprit entièrement nouveau. Ce seront les jeunes, en particulier, qui suivront une nouvelle voie, loin des habitudes des dernières décennies.
«La SGI est une initiative de notre gouvernement pour garantir un avenir plus vert en Arabie saoudite et au Moyen-Orient», affirme Fatimah Ahmad, une jeune traductrice professionnelle saoudienne, à Arab News.
Elle ajoute: «L’Arabie saoudite prend l’initiative pour préserver l’avenir de la crise du réchauffement climatique. C’est l’un des projets de Vision 2030 qui me passionne personnellement. C’est un rêve ambitieux et fou et je suis sûr qu’il se réalisera très prochainement.»
Les plus cyniques pourraient dire que le déclin de l’ère pétrolière et la transition mondiale vers un mode de vie plus vert auront un effet néfaste sur l’économie et le niveau de vie en Arabie saoudite.
Cependant, le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a une vision plus positive. «Nous rejetons le faux choix entre la préservation de l’économie et la protection de l’environnement», avait-il déclaré lors du lancement de la SGI en mars.
Il poursuit: «L’action pour le climat améliorera la compétitivité, stimulera l’innovation et permettra de créer des millions d’emplois de qualité. Les jeunes, tant dans le Royaume qu’à travers le monde, exigent un avenir plus propre, plus vert et plus inclusif. Nous leur devons d’y parvenir.»
Le forum de la SGI générera sans aucun doute plus d’idées, une plus grande prise de conscience et des solutions pratiques pour un avenir durable en Arabie saoudite et dans le monde.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com