LONDRES: Des députés, des militants et des professionnels de la finance islamique remettront mardi une lettre au Premier ministre britannique, Boris Johnson, l'exhortant à prendre des mesures qui mettraient fin à l'exclusion annuelle de milliers de musulmans britanniques de l'enseignement supérieur.
Une enquête du Muslim Census publiée lundi a révélé que des milliers de jeunes musulmans britanniques choisissaient chaque année de ne pas aller à l'université en raison du fait que les prêts sur lesquels ils comptent pour financer leurs études comprennent un intérêt.
«Il existe un besoin réel et généralisé d'ASF (Financement alternatif des étudiants), et son absence conduit à un accès inégal à l'université», lit-on dans la lettre signée par Lord Sharkey; le député David Timms; le PDG d’Islamic Finance Guru, Ibrahim Khan; Rizwan Yusoof de la National Zakat Foundation; et Asha Hassan, militante pour le financement des étudiants.
Il est interdit aux musulmans dans leur religion d'emprunter ou de prêter de l'argent pour lequel sont payés des intérêts. Cela signifie que les étudiants musulmans britanniques sont obligés de payer jusqu'à 9 000 £ (12 361 $) par an pour leurs études, ainsi que de couvrir tous leurs frais de subsistance.
Muslim Census a constaté que sur les 36 000 répondants de son enquête, près de 10% n'avaient pas suivi d'études supérieures en raison d'un manque d'options alternatives de financement.
Un sur six a autofinancé ses études, ce qui «a entraîné de sévères restrictions quant au choix de l’université et aux cours suivis», a-t-il expliqué.
Extrapolés à l'ensemble de la population musulmane du Royaume-Uni, ces résultats signifient que plus de 4 000 étudiants potentiels abandonnent chaque année les études universitaires, tandis que près de 6 000 sont contraints de s'autofinancer.
En 2013, le Premier ministre alors en fonction, David Cameron, s'est engagé à lutter contre l'inégalité d'accès à l'éducation pour les musulmans, déclarant: «Plus jamais un musulman en Grande-Bretagne ne devrait se sentir incapable d'aller à l'université parce qu'il ne peut pas obtenir un prêt d’étudiant uniquement à cause de sa religion.»
Mais près de dix ans depuis que cette promesse a été faite pour la première fois, les musulmans sont toujours obligés de choisir entre poursuivre des études ou s'en tenir aux principes de leur religion, a déclaré Hassan à Arab News.
«C’est vraiment important pour notre communauté, mais nous avons jusqu’à présent eu l’impression de ne pas avoir voix au chapitre. Cette lettre est, espérons-le, une chance que le Premier ministre voie qu'il s'agit d'un grand problème», a-t-elle déclaré.
«Il y a des milliers et des milliers d'étudiants qui ont le niveau requis et l'ambition, et qui aspirent à un mieux-être. Cependant, parce qu'ils ne souhaitent pas faire de compromis sur leurs convictions religieuses, ils n'ont aucune option», a-t-elle ajouté.
«Quatre musulmans sur cinq qui contractent des prêts se sentent en conflit avec cela, mais ils se trouvent dans une position où ils sentent qu'ils ne peuvent rien faire d'autre à ce sujet.»
Omar Shaikh, directeur général du UK Islamic Finance Council, a indiqué à Arab News que la création d'un système de financement pour les musulmans britanniques était «réalisable» et que sa création était une question de politique et non pas de pratique.
«L'UKIFC a été désigné par le ministère de l'Éducation pour mettre au point un système détaillé qui soit efficacement applicable et qui fonctionne de manière équivalente avec le système existant de prêts pour étudiants», a-t-il affirmé.
«Après divers séminaires et à la suite de contributions de la Student Loans Co., de spécialistes de la charia, du ministère de l'Éducation et d’avocats, nous avons réussi à créer une structure pragmatique viable. Nous savons que cela peut être fait et que ce n'est pas onéreux», a-t-il ajouté.
«C’est maintenant une question de priorité politique. Nous attendons avec impatience que le gouvernement fasse progresser les choses, et nous félicitons le ministère de l'Éducation d'avoir mené cette politique intégrative.»
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com