KANDAHAR: La grenade est une fierté et une manne pour le sud de l'Afghanistan. Mais dans la région de Kandahar, des milliers de tonnes de ce fruit risquent de ne pas être exportées à temps cette saison, bloquées par des fermetures intempestives de la frontière avec le Pakistan.
Avec son écorce écarlate et ses grains craquant sous la dent, la grenade, réputée bénéfique pour la santé, est une production phare des fermiers afghans.
"Nous avions 15 000 ouvriers agricoles qui travaillaient dans cette région. Ils ont été licenciés parce que le commerce est immobilisé et que les fruits pourrissent", explique à l'AFP Haji Nani Agha, directeur de l'association locale des producteurs de fruits frais.
A l'ombre des grenadiers, dans des sacs de jutes ou des cagettes, les fruits de la taille d'un petit melon sont empaquetés et chargés dans des camions.
Ils partent ensuite en direction du poste-frontière de Spin Boldak, où ils pourront rester bloqués pendant des jours ou des semaines, ou ne jamais passer.
Le Pakistan a réduit à zéro ses taxes sur les fruits importés d'Afghanistan pour en favoriser le commerce. Mais en même temps, il a renforcé les contrôles à la frontière, par crainte d'un afflux massif de réfugiés.
Un constant bras de fer oppose depuis le Pakistan aux nouvelles autorités afghanes, au pouvoir depuis la mi-août et qui ont plusieurs fois décidé de fermer la frontière, par mesure de rétorsion.
"C'est une catastrophe pour tout l'Afghanistan, parce que tout le commerce afghan passe par cette frontière. Il ne s'agit pas seulement des grenades" mais aussi des bananes, raisins et fruits secs, fait valoir Haji Nani Agha.
Depuis le début de la saison, 4 490 tonnes de grenades ont pu être exportées vers l'Inde, le Pakistan ou encore les pays du Golfe, explique Abdul Baqi Beena, de la Chambre de commerce de Kandahar.
Chaque saison, entre 40 000 et 50 000 tonnes de grenades sont habituellement exportées.
"Ces produits attendent d'être vendus, mais plus ils attendent, plus leur qualité baisse et plus leur valeur de vente chute", remarque Abdul Baqi Beena.
L'agriculture afghane avait déjà été doublement paralysée cette année par la sécheresse, et par l'intensité des combats entre les talibans et l'armée afghane dans certaines provinces.
Pendant des années, l'Afghanistan et ses donateurs internationaux ont essayé de convaincre les fermiers du pays d'abandonner la culture du pavot à opium au profit de productions fruitières, notamment la grenade.