MONTRÉAL: Salima Kadaoui est une militante peu ordinaire, qui porte un amour inconditionnel aux animaux. Depuis 2016, avec l'association le Sanctuaire de la faune de Tanger (SFT) qu'elle préside, elle accueille, nourrit et soigne de nombreux animaux, en particulier les chats et chiens errants.
L’un des objectifs de Salima est faire de Tanger, sa ville natale, la première cité du Maroc sans rage d’ici à trois ans. Arab News en français a interrogé la présidente du projet Hayat sur son engagement pour éradiquer cette maladie, à l’occasion de la Journée internationale contre la rage.
Quel bilan faites-vous aujourd’hui de votre combat contre la rage à Tanger?
Depuis 2016 et à travers le projet Hayat, nous avons offert un refuge à des milliers de chiens et de chats errants, et avons réalisé que la seule solution pour faire disparaître la rage était de vacciner et de stériliser ces animaux errants, mais surtout d'éduquer la population pour qu’elle évite les morsures de chien, et sache comment réagir si elle était touchée par la maladie. Dans presque 100% des cas, la rage est mortelle, mais elle est aussi pratiquement à 100% évitable. Sur les 99% de cas de décès humains dus à la rage, on compte 68% d'enfants.
Quel est l’objectif du projet Hayat?
Il prône l’accompagnement animal et humain. L’équipe se focalise notamment sur l’éducation des enfants, en allant à leur rencontre dans leurs écoles, leurs quartiers et leurs maisons. Elle organise aussi des conférences dans des universités, et au sein de différentes associations. En parallèle, les bénévoles font de la sensibilisation sur le terrain, échangent avec la population dans les lieux publics.
Le projet Hayat a reçu durant trois années consécutives (2018, 2019, et 2020) le prix de la Journée mondiale de la rage de l'Organisation mondiale de lutte contre la rage au Moyen-Orient, l’Europe de l'Est, l’Asie centrale et l’Afrique du Nord.
La rage tue encore une personne toutes les quinze minutes dans le monde alors que, comme vous l’avez dit, la quasi-totalité des cas sont évitables. Quelles sont vos recommandations?
Il faut déjà connaître cette maladie. La rage est une maladie mortelle, mais il suffirait de vacciner 70% de la population canine pour la faire disparaître. Les chiffres montrent que 99% des décès humains dus à la rage sont causés par un chien domestique, et non par un animal errant. Pourquoi? Parce que dans des continents comme l'Afrique et l'Asie, les personnes ont tendance à attacher leurs chiens à l'extérieur de hangars ou d’habitations, afin qu’ils gardent leur propriété. Des chiens enragés sont attirés par les aboiements des chiens domestiques, qui risquent alors de se faire mordre, sans pouvoir s'échapper.
La rage existe sous deux formes. La rage paralytique, souvent mal diagnostiquée, contribue à la mésestimer la maladie: un chien arrête de manger et puis il meurt. Dans sa forme grave, le décès survient en quelques jours par arrêt cardiorespiratoire. Pour mettre fin à cette maladie, avec les bénévoles de l’association, nous sillonnons la ville à la recherche des chiens errants. Ensemble, nous repérons, recueillons, stérilisons, vaccinons et relâchons chaque chien signalé par les habitants de Tanger. L’animal est ensuite ramené sur son territoire.
Qui est Salima Kadaoui?
- Née d'un père marocain et d'une mère britannique, la passion et le dévouement pour les animaux de Salima ne datent pas d'hier.
- En 2012, à la suite de la mort de son père, Salima s'installe à Tanger, où elle a grandi, pour réaliser son rêve de petite fille: sauver les animaux.
- En 2013, elle lance l’association du Sanctuaire de la faune de Tanger (SFT), pour venir en aide aux animaux.
- En 2016, Salima lance le projet Hayat, qui signifie «vie» en arabe.
Bénéficiez-vous d’aides ou de financements des pouvoirs publics pour favoriser l'accès aux vaccins?
Pour l'instant, nous comptons à 100% sur les dons et nous sommes très chanceux: deux organisations internationales contribuent actuellement au projet Hayat.
Les animaux ont aussi souffert de la pandémie de Covid-19, notamment pendant le confinement. Comment avez-vous agi pendant cette période?
Au plus fort de la pandémie, nous avons distribué de la nourriture aux animaux, mais aussi aux personnes dans le besoin. Cela a eu un impact énorme sur notre communauté. L’association dispose d’une ambulance dédiée au transport des animaux malades. Nous avons continué le combat même durant cette période difficile, essayant d’être présents pour les animaux et les plus démunis.
Le projet Hayat en quatre points
- Traiter les parasites internes et externes
- Stériliser pour réduire la population canine de manière humaine, afin de prévenir les souffrances inutiles
- Vacciner contre la rage et créer une immunité collective, qui protège à la fois l’homme et l’animal
- Mettre des tags sur l’oreille avec des numéros d'identification individuels pour reconnaître les chiens vaccinés