Accès aux eaux de pêche: Paris prêt à jouer des muscles face à Londres

Des navires français protestent contre les restrictions aux zones de pêche par le gouvernement britannique, au large de l’île de Jersey (Photo, AFP).
Des navires français protestent contre les restrictions aux zones de pêche par le gouvernement britannique, au large de l’île de Jersey (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mardi 28 septembre 2021

Accès aux eaux de pêche: Paris prêt à jouer des muscles face à Londres

  • La France, qui attend encore des réponses concernant des demandes d'autorisations définitives au large des côtes britanniques, prévient que sa «riposte sera proportionnelle à l'offre britannique»
  • Sujet explosif tout au long des négociations sur les conditions de la sortie du Royaume-Uni de l'UE, l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques reste un sujet de tension

PARIS: Va-t-on vers une nouvelle bataille navale dans la Manche? A deux jours de l'expiration des licences provisoires dans les eaux anglo-normandes, Paris hausse le ton, pressé par des pêcheurs français prêts à faire le siège de Jersey.

"Nous n'accepterons pas de nouvelles conditions. Toutes nos demandes sont justifiées, nous voulons des autorisations définitives", a-t-on indiqué lundi au ministère français de la Mer.

La France, qui attend encore des réponses pour 169 demandes d'autorisations définitives à Jersey, 168 à Guernesey et 87 dans la zone des 6 à 12 milles au large des côtes britanniques, prévient que sa "riposte sera proportionnelle à l'offre britannique".

Dans un geste d'apaisement, le gouvernement autonome de Jersey, île située entre la France et la Grande-Bretagne, avait annoncé vendredi qu'il octroierait dans la semaine des autorisations à des bateaux de l'Union européenne et renouvellerait des licences provisoires pour ceux qui peinent à rassembler les justificatifs demandés.

"N'importe quoi! Jersey fait la marionnette de Londres, c'est aux Etats de se mettre d'accord et il est plus que temps", a réagi auprès de l'AFP Olivier Le Nezet, président du comité régional des pêches de Bretagne.

«Ca va mal se terminer»

Comme son collègue de Normandie, il est prêt à jouer des muscles, "puisqu'il n'y a que cela que les Anglais comprennent". "A ce jeu-là, ça va mal se terminer", redoute-t-il, fatigué à l'idée "d'aller faire le siège de Jersey tous les quatre-cinq mois".

Les pêcheurs français plaident pour des mesures de rétorsion immédiates: interdire aux bateaux anglais de débarquer, réduire la coopération économique ou universitaire avec les îles anglo-normandes. Paris dit "étudier" le sujet, avec Bruxelles en arbitre.

Sujet explosif tout au long des négociations sur les conditions de la sortie du Royaume-Uni de l'UE, l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques reste un sujet de tension malgré l'accord post-Brexit entre Londres et Bruxelles, en vigueur depuis le 1er janvier.

Accès aux eaux de pêche: les zones de la discorde franco-britannique

Le Brexit a redessiné les zones de pêche autour du Royaume-Uni, plantant depuis le 1er janvier 2021 un nouveau cadre général mais attisant du même coup une lutte féroce pour régler le sort de chaque bateau français.

Voici les quatre grandes zones définies et les points d'achoppement qui persistent dans trois d'entre elles pendant la période de transition prévue jusqu'à l'été 2026, et alors que des dizaines de licences provisoires expirent le 30 septembre.

- La zone des 12 à 200 milles nautiques des côtes britanniques ne pose pas de problème. Les autorisations demandées pour ce domaine de la pêche hauturière, qui se pratique au grand large sur des thoniers de 13 à 33 mètres, ont toutes été obtenues en janvier.

- La zone des 6 à 12 milles des côtes britanniques: le verre à moitié vide.

Dans cette zone poissonneuse, qui s'étend du sud de la Mer du Nord au pays de Galles, l'accord européen prévoit un accès garanti aux navires qui s'y rendaient déjà pendant la période de référence 2012-2016. Il leur faut toutefois demander de nouvelles licences à Londres.

Les pêcheurs français ont obtenu 88 autorisations définitives, mais attendent toujours une réponse pour 87 navires: ces derniers, en attendant, n'ont aucune autorisation, même provisoire, de pêcher dans cette zone.

La zone des îles anglo-normandes, Jersey et Guernesey, est l'objet des plus âpres discussions. Chaque bateau doit justifier d'au moins onze jours de pêche entre le 1er février 2017 et le 30 janvier 2020.

- A Jersey, la France a obtenu 47 autorisations définitives et 169 licences provisoires. Paris demande des autorisations définitives pour ces 169 navires, tous de moins de 12 mètres.

Les autorités de l'île ont établi une date butoir pour les négociations, aujourd'hui fixée au 30 septembre. Elles sont prêtes à repousser à nouveau ce délai au 31 janvier pour ceux qui auraient encore des justificatifs à fournir. 

Une hypothèse "inacceptable" pour les pêcheurs français, qui affirment avoir "tout donné" pour les petits bateaux non équipés en système de géolocalisation: journal de pêche, cartes des trajets transmises lors des sorties, chiffres des ventes etc...

- A Guernesey, seules des licences provisoires ont été accordées à 168 navires et 64 demandes sont en attente, dont 46 pour des bateaux de 12 mètres et plus.

Mais la situation est moins tendue qu'avec sa voisine, Guernesey n'ayant pas fixé de date butoir et renouvelant chaque mois les licences provisoires.

Début mai, des dizaines de bateaux de pêcheurs normands et bretons s'étaient massés dans le port de Saint-Hélier à Jersey pour défendre leur droit de continuer à pêcher dans ces eaux, provoquant l'envoi par Londres de deux patrouilleurs pendant quelques heures.

Ce coup de fièvre avait abouti à l'allongement des délais sans rien changer au fond: les flottes européennes devront renoncer à 25% de leurs captures dans les eaux britanniques à l'issue d'une période de transition courant jusqu'en juin 2026.

D'ici-là, l'accord post-Brexit prévoit l'obligation pour les pêcheurs européens d'obtenir de Londres de nouvelles licences. Celles-ci sont conditionnées à la preuve d'une antériorité de leur pratique de pêche dans les eaux britanniques.

L'urgence concerne les îles anglo-normandes avec l'expiration imminente de dizaines de licences provisoires.

Jeudi, la ministre française de la Mer, Annick Girardin, a brandi la menace de rétorsions au niveau européen si Londres tergiverse.

La situation est particulièrement délicate pour Jersey, qui a fixé des dates limites, alors que Guernesey renouvelle de mois en mois les licences provisoires, explique-t-on côté français.

Vers une nouvelle date butoir ?

"On a passé des mois à réunir toutes les pièces justificatives, notamment pour les petits bateaux qui n'ont pas de système de localisation satellitaire, on a tout donné", affirme Jean-Luc Hall, président du Comité national des pêches.

Du côté du ministère français, on souligne aussi les efforts déjà consentis, avec des demandes totales pour Jersey passées de "344 navires en janvier à 216 aujourd'hui", dont seules 47 ont été définitivement validées.

Au gouvernement de Jersey, qui promet une nouvelle date limite au 31 janvier 2022, les pêcheurs français rétorquent d'un bloc: "ça suffit".

"C'est l'angoisse pour les pêcheurs qui ne savent pas s'ils peuvent réparer leur bateau, s'ils pourront payer leurs crédits", explique M. Hall.

Une lassitude partagée par des pêcheurs de Jersey, qui veulent protéger leur flotille de petits bateaux contre les géants qui frayent en Manche, mais redoutent "des années très difficiles" s'ils perdent leurs débouchés européens pour leurs homards et coquilles Saint-Jacques.


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
Short Url
  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
Short Url
  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Short Url
  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.