La collection Morozov, feu d'artifice de chefs d'œuvres à la Fondation Vuitton

Peintures de Pierre Bonnard, exposées à la Fondation (Photo, AFP).
Peintures de Pierre Bonnard, exposées à la Fondation (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 18 septembre 2021

La collection Morozov, feu d'artifice de chefs d'œuvres à la Fondation Vuitton

  • Trois fois reportée, pandémie oblige, cette exposition est l'événement artistique de la rentrée et ouvrira (enfin) ses portes mercredi à Paris, un an après la date prévue
  • La collection Morozov présente 200 tableaux, sculptures, photographies et constitue le deuxième volet consacré aux grands collectionneurs russes

PARIS: Des Van Gogh, Gauguin, Renoir, Cézanne, Matisse, comme s'il en pleuvait... Quatre ans après l'immense succès de l'exposition Chtchoukine, la Fondation Vuitton présente une autre collection de chefs-d'oeuvre, acquis au tournant du XIXe siècle par deux frères russes, les Morozov.

Trois fois reportée, pandémie oblige, cette exposition est l'événement artistique de la rentrée et ouvrira (enfin) ses portes mercredi à Paris, un an après la date prévue.

La collection Morozov présente 200 tableaux, sculptures, photographies et constitue le deuxième volet consacré aux grands collectionneurs russes, après l'exposition Chtchoukine (2016-17) qui avait attiré 1,29 million de visiteurs, un record.

Après avoir franchi une porte ornée d'un haut-relief, réplique de la sculpture de l'entrée du Théâtre d'art de Moscou, le visiteur fait connaissance du "clan Morozov", famille et amis des frères, Mikhaïl et Ivan. Puis se succèdent au fil des salles des oeuvres de Manet, Renoir, Toulouse-Lautrec, Monet, Picasso, Gauguin, Bonnard, Vuillard, Rodin etc.

Dans une salle à part, un Van Gogh peu connu captive: "La Ronde des prisonniers" (1890), dont le seul à fixer le spectateur est un homme aux cheveux roux, comme le peintre.

Un oeil exceptionnel

Qui étaient ces collectionneurs qui ont su reconnaître, dans l'effervescence du tournant du XIXe siècle, des artistes aujourd'hui stars des musées?

Mikhaïl et Ivan Morozov naissent en 1870 et 1871 dans une famille moscovite d'industriels du textile, d'origine serve et de religion Vieux-croyant orthodoxe. Leur mère leur donne une éducation artistique, avec cours de dessin par des artistes russes venus se former à Paris et familiers des Impressionnistes.

C'est peut-être de là que vient l'acuité exceptionnelle dont les deux frères feront preuve dans leurs achats de peintures, avance Anne Baldassari, la commissaire de l'exposition - elle avait aussi été celle de "Chtchoukine".

L'Automne, la cueillette des fruits de Pierre Bonnard (Photo, AFP).

Mikhaïl, l'aîné, voyage et acquiert dès ses 20 ans ses premiers tableaux à Paris. Il est "audacieux", choisit Manet, Degas mais surtout Van Gogh et Gauguin, pas du tout reconnus à l'époque, ajoute Anne Baldassari. C'est lui qui apporte en Russie, pour la première fois, un tableau de ces deux peintres.

Il meurt jeune (à 33 ans), mais sa collection compte déjà 39 tableaux signés Monet, Toulouse-Lautrec, Renoir, Gauguin etc.

Ivan est lui destiné à reprendre les affaires familiales et met sous le boisseau ses envies de devenir peintre. Lui aussi achète à Paris, de manière moins débridée que son aîné, mais avec un oeil tout aussi sûr.

Impressionnistes, post-impressionnistes, Nabis et surtout... Cézanne (il aura un "cabinet Cézanne" dans ses appartements). Ivan s'intéresse également aux peintres russes contemporains - plusieurs tableaux ont fait partie du voyage jusqu'à Paris.

Envoyés dans l'Oural

Les deux frères sont nés vingt ans après Sergueï Chtchoukine, industriel fortuné, lui aussi passionné par la peinture française de son époque. Les trois hommes achètent au même moment car Chtchoukine démarre sa collection à la quarantaine.

Ils se connaissent, s'apprécient et ont pour objectif de léguer leurs collections à la Galerie Tretiakov après leur mort. Avec la révolution bolchévique de 1917, les collections sont nationalisées, d'abord visibles aux murs des hôtels particuliers des deux industriels survivants puis réunies "dans un chaos pictural" avec d'autres objets d'art, dans quelques pièces d'une des deux demeures.

Les tableaux sont envoyés dans l'Oural au déclenchement de la guerre avec l'Allemagne en 1941 et y resteront des années, tant bien que mal conservés, par -40°... Ce n'est qu'à la fin des années 50 que le public soviétique pourra à nouveau les admirer à la Galerie Tretiakov, aux Musées Pouchkine (Moscou) et de l'Ermitage (Saint-Pétersbourg).

C'est la première fois que ces trois musées prêtent autant de tableaux de la collection Morozov à l'étranger.

Après Chtchoukine et Morozov, peut-on attendre un troisième volet? Les trois hommes étaient les grands collectionneurs d'art français de leur époque, répond la commissaire. "Mais il y a de grands collectionneurs d'art russe. A l'avant-garde française a succédé l'avant-garde russe".


Hoor al-Qasimi nommée directrice artistique de la Biennale de Sydney

Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
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  • Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre
  • Depuis 2017, Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique

DUBAÏ : La Biennale de Sydney a annoncé cette semaine la nomination de la commissaire d’expositions émiratie Hoor al-Qasimi au poste de directrice artistique de sa 25e édition, qui se tiendra du 7 mars au 8 juin 2026.

Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre et s’affirme en tant que première biennale établie dans la région Asie-Pacifique.

En 2009, Al-Qasimi a créé la Fondation d'art de Sharjah, dont elle est actuellement la présidente et la directrice. Tout au long de sa carrière, elle a acquis une vaste expérience dans la conception de biennales internationales, notamment en tant que commissaire de la deuxième Biennale de Lahore en 2020 et du Pavillon des Émirats arabes unis à la 56e Biennale de Venise en 2015.

Elle a également cocuraté la sixième édition de la Biennale de Sharjah en 2003 et en assure la direction depuis.

Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique depuis 2017.  Elle a précédemment siégé au conseil d'administration du MoMA PS1 à New York et à celui du Ullens Center for Contemporary Arts (UCCA), à Beijing, entre autres fonctions.

Elle est également directrice artistique de la sixième Triennale d'Aichi, qui se tiendra au Japon en 2025.

 


Cannes: le conflit israélo-palestinien en filigrane

L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
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  • Sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza
  • Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité »

CANNES, France : Un symbole palestinien ou un portrait d'otage: à l'heure où le conflit entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza embrase les campus et les réseaux sociaux, les stars présentes au 77e Festival de Cannes préfèrent afficher un soutien discret.

Ruban jaune accroché à la veste, l'acteur Philippe Torreton a gravi mardi les marches du Festival. Un symbole en soutien aux quelque 250 personnes prises en otage par le Hamas le 7 octobre.

L'actrice Leïla Bekhti, qui a récemment enregistré un message en faveur des enfants de Gaza pour l'Unicef, a arboré mercredi un pin's pastèque, l'un des symboles de la résistance palestinienne.

Des positionnements très discrets quant au conflit israélo-palestinien, au moment où sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza. Beyoncé et Kim Kardashian figurent parmi les cibles de cette mobilisation propalestinienne et ont déjà perdu des centaines de milliers d'abonnés.

En réponse, des célébrités comme Omar Sy, membre du jury à Cannes, ont mis en ligne en début de semaine un appel au cessez-le-feu sur Instagram.

Sur le tapis rouge cannois, le message le plus fort à propos de ce conflit est venu jusqu'ici d'une survivante de l'attaque du Hamas le 7 octobre, Laura Blajman-Kadar, vêtue d'une robe jaune affichant des portraits d'otages israéliens et une écharpe noire «Bring them home» («Ramenez-les à la maison»).

Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité, ont indiqué à l'AFP ses organisateurs.

Ce film, composé d'extraits des caméras et téléphones des assaillants du Hamas et d'images captées par des victimes et des secouristes, avait été diffusé le 14 novembre à l'Assemblée nationale en France. Des projections privées ont déjà eu lieu en marge de sommets comme Davos, selon les organisateurs.

- Haute surveillance -

Mais point de manifestation politique, ni côté public, ni côté montée des marches. Une discrétion à l'extrême, qui pourrait basculer avec la présentation vendredi à 18H00 de «La belle de Gaza», documentaire dans le milieu très fermé des femmes transgenres palestiniennes réfugiées à Tel-Aviv.

Même si le conflit israélo-palestinien, évoqué à travers la dureté des autorités pour les «clandestines» venues de Cisjordanie sans permis de travail, s'efface totalement dans ce film de Yolande Zauberman, supplanté par un autre type de conflit intime et universel.

Si aucun film palestinien n'est présent en sélection, «Vers un pays inconnu» du réalisateur danois d'origine palestinienne Mahdi Fleifel, suit deux jeunes cousins palestiniens se retrouvant en Grèce, après avoir fui un camp au Liban. Le film est présenté à la Quinzaine des cinéastes.

Au Marché du film, le plus grand au monde, le pavillon du «film arabe» a déroulé une grande banderole appelant à soutenir l'industrie des territoires occupés ou ses cinéastes en exil.

Le seul film israélien présenté cette année est le court-métrage d'Amit Vaknin, étudiante en cinéma à l'Université de Tel-Aviv. «It's no time for pop» s'attache à une jeune femme qui refuse de prendre part à des festivités patriotiques.

Le pavillon israélien a été maintenu, sous très haute surveillance, avec un filtrage sécuritaire drastique à l'entrée.

L'équipe de l'ambassade israélienne a déclaré à l'AFP avoir douté jusqu'au dernier moment du maintien de sa présence, moins d'une semaine après les manifestations monstre lors de l'Eurovision en Suède.

 


Pour sa nouvelle création, Angelin Preljocaj livre son «Requiem(s)»

Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
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  • Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes
  • Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal

AIX-EN-PROVENCE, France : De la tristesse, de la rage parfois mais aussi des moments de joie, le chorégraphe français Angelin Preljocaj présente ce week-end à Aix-en-Provence, en première mondiale, «Requiem(s)», un spectacle autour de toutes les facettes de la mort et du deuil.

«C'est un thème magnifique et puis l'année 2023 était une année assez dure pour moi personnellement. J'ai perdu beaucoup d'amis, mes parents aussi. Je me suis dit que c'était peut-être le moment de faire un requiem», confie M. Preljocaj à l'AFP.

Basé avec son ballet à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, au Pavillon noir, le chorégraphe d'origine albanaise est connu notamment pour ses ballets «Le Parc» et «Blanche-Neige», et ses collaborations fréquentes avec des artistes issus de la musique électro comme Air, le DJ Laurent Garnier et les Daft Punk.

Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes.

Pour ce spectacle, Angelin Preljocaj dit s'être longuement documenté, allant piocher des références entre autres chez le sociologue Émile Durkheim, qui expliquait que les hommes ont fait société quand ils ont commencé à donner une cérémonie pour leurs morts.

Les facettes de ce cérémonial ressortent tout au long du ballet, tantôt langoureux, tantôt très rythmé, parfois complètement frénétique, les danseurs jouant avec les différentes émotions liées au deuil.

«Ce n'est pas toujours triste, il y a beaucoup de joie dans le spectacle aussi, de la rage parfois, de la mélancolie», énumère le chorégraphe.

- De Mozart au métal -

Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal.

«Les musiques m'apportaient des nuances d'émotions différentes et j'avais envie de travailler avec ces choses-là, par exemple les cantates de Bach (1685-1750), Ligeti (1923-2006), Mozart (1756-1791)... et du métal. Je me suis beaucoup amusé avec ça», sourit Angelin Preljocaj.

Des décors aux costumes en passant par la lumière, les danseurs se retrouvent plongés dans une bichromie noire et blanche pudique, seulement troublée par quelques très rares touches de rouge.

Après une heure trente de danse, le public a applaudi de longues minutes.

«Un spectacle, c'est comme une photographie qu'on met dans le révélateur; le révélateur c'est le public, et ce soir c'était très très chaleureux», souffle le chorégraphe à l'issue de la générale.

Après les deux dates inaugurales au Grand Théâtre de Provence vendredi et samedi, une tournée à Paris et dans plusieurs autres villes de France, le spectacle reviendra au mois d'octobre à Aix puis sera joué le 4 décembre à Modène (Italie) puis en 2025 à Athènes, Madrid et Fribourg (Suisse).