PARIS : Ils sont séparés depuis 50 ans, mais leur musique vibre toujours : la Philharmonie de Paris va vivre un week-end (19-20 septembre) au rythme des Beatles, revisités par Keren Ann, Rover, Brad Mehldau ou le Quatuor Debussy.
Soit deux figures de la pop, un jazzman aventurier et des musiciens classique eux aussi sans frontières. Preuve que le quatuor de Liverpool est une "nourriture qui reste éternelle" pour tout musicien, comme le présente Rover à l'AFP.
"Ils ont commencé il y a 60 ans, se sont arrêtés il y a 50 ans, et leur musique a traversé les décennies sans aucun problème, raconte Christophe Collette, premier violon du Quatuor Debussy. Dans 50 ans, ils seront toujours d'actualité, ça confirme que ce sont des génies". "On est un quatuor à cordes et on rend hommage au plus célèbre quatuor anglais", s'amuse-t-il.
Chez Keren Ann, les "Fab Four" font "partie des meubles". "Ado, j'étais obsédée par John, puis j'ai réalisé l'importance de Paul et George". Mais jusqu'ici, elle s'était bien gardée de décortiquer leurs progressions harmoniques.
"Ça a été un plaisir fou, j'ai eu la confirmation de l'intelligence de leurs compositions, de tous ces renversements d'accords, souligne-t-elle. En très peu de temps, ils ont créé une bible musicale". "On avait l'impression d'un nouveau groupe pour chacun de leur album", vante Rover.
Keren Ann, au chant et à la guitare, accompagnée par un pianiste et un trompettiste, racontera "des anecdotes sur les Beatles entre les chansons" choisies.
Rover, qui s'était déjà attaqué à "Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band" à la Maison de la Radio, jouera cette fois l'album "Revolver". "Je vais le jouer tout seul, pour rester sur l'os de la musique. De toute façon il était inutile de rentrer en concurrence avec les Beatles (rires). Il faut y aller nu et humble".
"Sentiment de légèreté"
Même constat pour Christophe Collette : "On ne va pas faire les Beatles comme eux le faisaient, ce serait peine perdue". Le Quatuor Debussy jouera seul ou avec un orchestre de chambre, retranscrivant les Beatles de façon littérale ou suivant les pas de Peter Breiner. Ce compositeur-chef d'orchestre avait atteint les sommets des ventes avec "Beatles Go Baroque", album où John, Paul, George et Ringo sonnaient comme Haendel ou Vivaldi.
Le week-end Beatles tombe "à un moment lunaire", comme le dit Keren Ann, en raison du contexte sanitaire. Pour la Philharmonie, en pleine zone rouge, les contraintes sont établies : un siège sur deux sauf couples ou groupes constitués, masques obligatoires pour le public, gel hydroalcoolique aux entrées, pas de vestiaire. Les artistes font deux représentations au lieu d'une pour contenter un maximum de spectateurs.
"Cette période exacerbe le sentiment de légèreté qui se dégage de la musique des Beatles", prolonge Rover. Clin d’œil de l'histoire, Keren Ann et le Quatuor Debussy étaient ensemble sur scène - les cordes des seconds accompagnant l'autrice-compositrice - pour leur dernier concert pré-confinement. C'était le 12 mars.
"C'est important de faire vivre la culture", souffle la musicienne en contemplant les six mois sans concert écoulés. "C'est une période difficile et pleine d'espoir, on a tous besoin de retrouver la scène, les artistes et le public", rebondit Christophe Collette.
"J'ai connu un conflit militaire au Liban, on jouait dans des sous-sols, on improvisait, on s'adaptait, relate Rover. C'est ce qui rend le spectacle réellement vivant. Mais on reste fragiles et hypersensibles face à la situation".