L'impopulaire parti de Poutine en marche vers une victoire sans gloire

Face à ces écueils, Vladimir Poutine a lancé dans la bataille électorale ses ministres les plus populaires, celui de la Défense Sergueï Choïgou et le chef de diplomatie, Sergueï Lavrov. (AFP)
Face à ces écueils, Vladimir Poutine a lancé dans la bataille électorale ses ministres les plus populaires, celui de la Défense Sergueï Choïgou et le chef de diplomatie, Sergueï Lavrov. (AFP)
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Publié le Jeudi 16 septembre 2021

L'impopulaire parti de Poutine en marche vers une victoire sans gloire

  • Parmi les sujets inquiétant les Russes et affectant directement le parti du Kremlin: la corruption des élites ainsi que la chute des revenus réels de la population
  • Le scrutin «vise à bâtir une majorité parlementaire à partir d'une minorité électorale», résume la politologue Ekaterina Schulman

MOSCOU: Sur un boulevard arboré de Moscou, les passants ne prêtent aucune attention aux représentants du parti au pouvoir Russie Unie, chasubles sur les épaules, tractant sans enthousiasme en vue des législatives des 17 au 19 septembre.


Fondé en 2001 pour épauler Vladimir Poutine, arrivé aux commandes un peu plus tôt, la formation est aujourd'hui, avec moins de 30% d'opinion favorable, très loin de la popularité de son maître à penser. 


Mais tout porte à croire que Russie unie va largement remporter les élections cette semaine.


Le scrutin "vise à bâtir une majorité parlementaire à partir d'une minorité électorale", résume la politologue Ekaterina Schulman. Pour y parvenir, "l'électorat d'opposition ne doit pas se rendre" aux urnes.


Rien n'a été laissé au hasard. L'opposition anti-Kremlin a été bannie du vote, le mouvement de l'opposant incarcéré Alexeï Navalny ayant été interdit pour "extrémisme", tout comme l'ensemble de ses sites internet.


"Ces élections sont une fiction. Le culot et l'absence de scrupule dont ont fait preuve les autorités pour régler ses comptes avec l'opposition est choquante", s'emporte dès lors auprès de l'AFP Anton Kossitsine, une électeur moscovite de 26 ans.    


Une réalité persiste cependant, et le Kremlin en est bien conscient: "Tout ce qu'il y a d'impopulaire (dans le pays) est associé à Russie Unie", note l'analyste indépendant Valéri Soloveï.

Corruption et bureaucrates 
Parmi les sujets inquiétant les Russes et affectant directement le parti du Kremlin: la corruption des élites ainsi que la chute des revenus réels de la population qui s'est aggravée avec la pandémie de coronavirus. 


Alexeï Navalny, la bête noire du Kremlin, a justement gagné son audience en mettant le doigt sur ces sujets et cette inégalité des trains de vie. C'est ainsi qu'il a surnommé Russie Unie, non sans un certain succès, "le parti des escrocs et des voleurs".


Mme Schulman relève en outre que la formation du Kremlin est avant tout considéré comme l'écurie "des bureaucrates et des fonctionnaires".


Face à ces écueils, Vladimir Poutine a lancé dans la bataille électorale ses ministres les plus populaires, celui de la Défense Sergueï Choïgou et le chef de diplomatie, Sergueï Lavrov.


Afin de rajeunir son image, le parti a aussi recruté des personnalités nouvelles, issues de milieux associatifs, de la télévision ou du sport.


Le président russe a par exemple commandé au docteur Denis Protsenko d'être candidat aux législatives, après son refus initial. 


Ce médecin, à la réputation d'homme intègre, a été le visage de la lutte contre la pandémie de Covid-19, et doit désormais porter la promesse de modernisation d'un système de santé mis à mal par les coupes budgétaires des vingt dernières années.


Autre manoeuvre de Vladimir Poutine, l'annonce à moins d'un mois des élections d'une aide financière de 10 000 roubles (116 euros environ) aux retraités.

«Moindre mal»
Cette catégorie cruciale de l'électorat représente quelque 42 millions de personnes, or une reforme impopulaire des retraites contribue depuis 2018 à miner la popularité de Russie Unie.


Selon Tatiana Stanovaïa, du centre d'analyse R.Politik, ces versements sont efficaces, d'autant que de nombreux Russes, notamment les plus âgés, considèrent le parti au pouvoir "comme un moindre mal".


"Il y a une absence de choix (aux élections) associée à une grande peur d'une déstabilisation du pays", dit-elle.


Une frange toujours importante de la population craint le retour au chaos ayant suivi la chute de l'URSS il y a 30 ans et considère Poutine et les siens comme un rempart. 


"Nous, on se souvient des années 1990, la jeunesse qui est d'humeur à protester elle ne les a pas vécues (...) elle n'a pas de point de comparaison", relève Nina Ianova, retraitée moscovite de 67 ans.


Enfin, les autorités sont suspectées aussi de préparer des fraudes là où c'est nécessaire, la présence d'observateurs électoraux indépendants, locaux et internationaux, étant limitée.


"Le format de ces élections crée un terreau favorable aux falsifications", résume Mme Stanovaïa.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.