MARSEILLE, France : Emmanuel Macron a annoncé vendredi la tenue d'un sommet environnemental «One Ocean» fin 2021 ou début 2022 en France, après une sortie en mer au large des Calanques au troisième jour de sa visite à Marseille.
«La France va organiser dans les prochains mois ce que nous avons fait pour la biodiversité en début d'année, c'est-à-dire un +One Ocean Summit+ qui va consister à mettre les scientifiques, les acteurs économiques, les acteurs régionaux et les Nations unies autour de la table», a déclaré à la presse le chef de l'Etat français, à quelques heures de son discours devant le Congrès mondial de la nature (UICN), qui s'ouvre dans la deuxième ville de France vendredi.
«Nous l'organiserons en France entre la fin d'année et le début de l'année prochaine, à Paris ou dans une autre ville de l'Hexagone», a-t-il précisé.
Ce sommet servira, selon M. Macron, à «lancer des initiatives en matière de recherche, en matière de juridiction internationale et pour compléter le droit international qui nous permettra de protéger cet espace».
Interrogé sur l'efficacité souvent décriée de tels sommets, il a répondu: «Oui c'est efficace, car la clé, c'est la coopération européenne et internationale. Un pays seul n'est pas efficace, l'avancée doit être au moins européenne et sur certains grands sujets elle doit être mondiale».
Une Conférence des Nations unies sur les océans, qui devait avoir lieu cette année avant d'être reportée en raison de l'épidémie de Covid, doit à cet égard être organisée en 2022 à Lisbonne.
Lors d'une sortie au large des Calanques, le président français a été interpellé dans la matinée sur le fléau des plastiques en mer et de la protection de la biodiversité.
De retour sur la terre ferme, le chef de l'Etat a indiqué vouloir multiplier «par 25 les aires maritimes à très forte protection».
Emmanuel Macron doit ouvrir à partir de 17h le congrès mondial de la plus grande organisation de protection de la nature, l'UICN, qui ambitionne de donner un coup de fouet à la défense d'une planète mise à mal par l'Homme.
La biodiversité s'effondre, avec jusqu'à un million d'espèces animales et végétales menacées de disparition, selon les experts de l'Onu, qui avertissaient dès 2019 que la nature «décline plus vite que jamais dans l'histoire humaine».
Les ONG tirent un maigre bilan du gouvernement pour protéger la nature
Fini le temps des promesses: face à l'urgence environnementale, des ONG veulent des actes
et des financements de la part d'Emmanuel Macron à l'occasion de l'ouverture du congrès de l'UICN vendredi à Marseille, jugeant son bilan actuel plutôt maigre.
Le Congrès mondial de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui rassemble agences gouvernementales, ONG, scientifiques, représentants des peuples autochtones, est un temps fort pour la protection de la nature. La France, pays hôte dont le patrimoine naturel est très riche, y tient un rôle particulier.
Le président «Emmanuel Macron a voulu se positionner très fortement sur les questions environnementales et en particulier climatique», créant «de fortes attentes», rappelle Jean-François Julliard de Greenpeace France.
Quatre ans plus tard, «le mandat du président Macron ne laisse pas d'empreinte écologique», assène Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO).
«Quelques mesures n'ont pas démérité», comme l'abandon du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes ou celui d'Europacity, «mais la biodiversité reste le parent pauvre dans les questions environnementales», dit-il à l'AFP.
Les associations naturalistes disent n'avoir jamais été reçues par le président de la République avant lundi.
«La bataille de la biodiversité est aussi cruciale que la bataille du changement climatique», a dit l'ancien ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, en visite avec Emmanuel Macron à Marseille. «Il faut réhausser notre niveau d'ambition», a insisté le président d'honneur de sa fondation FNH. Il a donné en exemple la nécessité de réduire l'usage des pesticides alors que le gouvernement a réintroduit les néonicotinoïdes tueurs d'abeilles.
- Présidence de l'UE -
Le gouvernement revendique à son actif une stratégie nationale pour la biodiversité visant à inverser le déclin des espèces sur 10 ans, une autre sur les aires protégées, ou encore une stratégie visant à lutter contre la déforestation causée à l'étranger par la consommation de produits en France, comme le soja ou l'huile de palme.
Alors qu'un sommet sur l'océan est déjà prévu par l'ONU en 2022, Emmanuel Macron a annoncé à Marseille la tenue d'un sommet «One ocean» fin 2021 ou en 2022, à quelques heures de l'ouverture du congrès mondial de l'UICN.
Le gouvernement a aussi annoncé un renfort en 2022 de «20 équivalents temps plein» pour les parcs nationaux, quand plusieurs syndicats de l'OFB, chargé de gérer des espaces protégés ou encore de la police de l'environnement, se plaignaient de «manque(r) cruellement de personnels».
Lors de la sortie en 2019 du rapport des experts biodiversité de l'ONU, l'IPBES, sur l'état alarmant de la nature et lors de la création de l'Office français de la biodiversité (OFB), «le président a tenu des discours qu'aucun président n'avait tenu avant lui sur les impacts de notre modèle de développement pour la biodiversité», relève Jean-David Abel, de France Nature Environnement (FNE).
Pour les ONG, alors que le président arrive à la fin de son mandat, le compte n'y est pas. «Nous n'attendons pas des intentions, des grands objectifs, mais des moyens et un calendrier», explique Jean-David Abel, citant en exemple le manque de moyens humains et matériels pour réellement protéger les aires naturelles.
La directrice générale de WWF France, Véronique Andrieux, demande «qu'il n'y ait plus un euro d'argent public orienté vers des activités néfastes», comme cela peut être le cas dans l'agriculture intensive, la pêche ou des aménagements du territoire conduisant à artificialiser les sols.
Elle espère aussi «des engagements en termes de zones de protection forte en Méditerranée», une mer particulièrement victime de surpêche et de pollutions.
«La France était pionnière en adoptant une stratégie nationale contre la déforestation importée, mais elle n'est pas mise en œuvre et la déforestation se poursuit au Brésil», indique Jean-François Julliard.
La présidence française de l'Union européenne début 2022 pourrait toutefois permettre de faire avancer des dossiers, comme celui des «clauses miroir» imposant aux produits agricoles importés de respecter les normes européennes pour éviter toute distorsion de concurrence, espère la FNH.