Quand Trump use de «petits succès» pour faire oublier de «grands revers»

En 2016, « Trump a fait campagne en affirmant que la guerre d'Irak avait été la pire erreur de politique étrangère de l'histoire américaine » (Photo, AFP)
En 2016, « Trump a fait campagne en affirmant que la guerre d'Irak avait été la pire erreur de politique étrangère de l'histoire américaine » (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 10 septembre 2020

Quand Trump use de «petits succès» pour faire oublier de «grands revers»

  • La Maison Blanche ne laisse pas passer un jour sans mettre en avant l'accord « historique » qu'elle a favorisé entre Israël et les EAU
  • Les principales crises identifiées à l’arrivée de Trump en 2016 sont loin d'être résolues malgré la « pression maximale »

WASHINGTON : Donald Trump tente à tout prix d'engranger, dans la dernière ligne droite avant la présidentielle du 3 novembre, des succès de politique étrangère susceptibles de satisfaire sa base, après avoir échoué à dénouer les crises majeures de son premier mandat.

La dernière annonce, mercredi, tient à une promesse-phare du président républicain : « mettre fin aux guerres sans fin » des Etats-Unis au Moyen-Orient.

L'armée américaine a fait savoir qu'elle retirerait 2.200 soldats supplémentaires d'Irak d'ici la fin du mois.

En 2016, « Trump a fait campagne en affirmant que la guerre d'Irak avait été la pire erreur de politique étrangère de l'histoire américaine », rappelle Sarah Kreps, professeure à la Cornell University.

« Il tente maintenant de tenir sa promesse après avoir laissé le temps aux militaires de planifier le retrait », dit-elle, soulignant qu'il avait jusqu'ici « buté sur les résistances de l'establishment, y compris au Pentagone », lorsqu'il a voulu diminuer la présence dans ce pays, comme en Syrie ou en Afghanistan.

Selon elle, il y a là une certaine cohérence de la part du président « qui a le moins eu recours à la force militaire » depuis la fin de la Guerre froide, ce qui « peut être considéré comme un succès » par ceux qui critiquent l'interventionnisme américain.

« Diplomatie courageuse »

A moins de huit semaines de briguer un second mandat, le timing n'est toutefois pas anodin. D'autant que l'administration américaine s'apprête aussi à annoncer une réduction ultérieure des troupes en Afghanistan, alors même que la violence perdure et que le processus de paix peine à décoller.

Surtout, la Maison Blanche ne laisse pas passer un jour sans mettre en avant l'accord « historique » qu'elle a favorisé entre Israël et les Emirats arabes unis, troisième pays arabe seulement à reconnaître l'Etat hébreu.

Cet « accord de paix », qui sera signé en grande pompe le 15 septembre à Washington, « est un témoignage de la diplomatie et de la vision courageuse du président Trump », a estimé mercredi sa porte-parole, qui s'est fendue d'un communiqué pour saluer sa « nomination » au prix Nobel de la paix -- en fait une simple proposition, par un élu norvégien, qui n'a aucune valeur de préselection de la part de l'institut qui décerne les prestigieuses reconnaissances.

Pourtant, la normalisation des relations israélo-émiraties est bien loin de l'ambition initiale du tonitruant septuagénaire, qui avait promis la paix entre Israéliens et Palestiniens.

C'est que Donald Trump s'est aliéné l'Autorité palestinienne en multipliant les décisions favorables à Israël, conscient de satisfaire ainsi l'importante frange chrétienne évangélique de son électorat.

« Détourner l'attention »

La semaine dernière, en annonçant une « normalisation économique » à la portée toute relative entre la Serbie et le Kosovo, il a créé la surprise en dévoilant avoir aussi arraché la reconnaissance de l'Etat hébreu par Pristina et l'ouverture d'une ambassade à Jérusalem par les deux pays. Peu importe si, dès cette semaine, Belgrade a remis en doute son propre engagement.

« L'accord Israël-Emirats ne suffira pas à effacer la détérioration majeure de la sécurité à travers le Moyen-Orient pendant son mandat », affirme Brian Katulis, chercheur au Center for American Progress, un cercle de réflexion de gauche, en évoquant les conflits qui font rage en Syrie, en Libye et au Yémen.

Pour lui, « Trump a fait beaucoup de promesses et en a tenu peu en matière de sécurité nationale ».

Ainsi, les principales crises identifiées à son arrivée sont loin d'être résolues : l'Iran, malgré sa « pression maximale » qui lui a valu une vive fâcherie avec les Européens, est plus proche qu'avant d'une arme nucléaire, tout comme la Corée du Nord, en dépit de trois sommets et moult lettres « magnifiques » avec le dirigeant Kim Jong Un.

De même, les relations avec la Russie n'ont pas connu l'embellie espérée, et la Chine, rival stratégique numéro un, ne semble pas vouloir reculer face à l'offensive diplomatique américaine.

Quant au président vénézuélien Nicolas Maduro, il est toujours au pouvoir alors que Washington a tout fait pour l'en chasser.

Brian Katulis souligne aussi que « la principale crise sécuritaire de l'ère Trump », qui restera comme son « principal héritage », est celle liée à la mauvaise gestion de la pandémie, également emblématique de son incapacité à s'entendre avec les alliés de l'Amérique.

Le président-candidat « tente probablement de détourner l'attention de sa gestion du Covid-19 en redorant son blason diplomatique », acquiesce Sarah Kreps. « Je doute que cela fonctionne dans une élection dominée par les questions de politique intérieure, mais cela peut jouer à la marge. »


Israël : Netanyahu revient sur son choix pour la direction du Shin Bet

Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
Short Url
  • La nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 
  • M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

JERUSALEM : Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé mardi être revenu sur son choix pour le nouveau directeur de l'Agence de la sécurité intérieure (Shin Bet) après que son candidat a été critiqué à Washington par un influent sénateur.

« Lundi, M. Netanyahu a de nouveau rencontré le vice-amiral [Eli] Sharvit à propos de sa nomination à la tête du Shin Bet », indique un communiqué du Bureau du Premier ministre.

Il l'a « remercié [...] d'avoir répondu à l'appel du devoir, mais l'a informé qu'après plus ample considération, il avait l'intention d'examiner d'autres candidatures », a indiqué un communiqué du bureau de M. Netanyahu.

Ce revirement soudain survient après que la nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 

« S'il est vrai que l'Amérique n'a pas de meilleur ami qu'Israël, la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet est plus que problématique », a écrit M. Graham sur X.

« Mon conseil à mes amis israéliens est de changer de cap et d'examiner plus minutieusement le passé de leur candidat », a-t-il ajouté, notant que des « déclarations » de l'amiral Sharvit « sur le président Trump et sa politique créeraient des tensions inutiles à un moment critique ».

M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

La décision de démettre M. Bar de ses fonctions, en qui M. Netanyahu dit ne plus avoir confiance, est fortement critiquée en Israël où les manifestations se multiplient contre le gouvernement et contre ce qui est perçu par ses opposants comme une dérive dictatoriale du Premier ministre.


Ukraine : Poutine « reste ouvert à tout contact » avec Trump, après ses critiques selon le Kremlin

Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
Short Url
  • « Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
  • Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

MOSCOU : Vladimir Poutine « reste ouvert à tout contact » avec son homologue américain Donald Trump, a affirmé lundi le Kremlin, après les critiques du locataire de la Maison Blanche à l'encontre du président russe malgré leur rapprochement entamé depuis plusieurs semaines.

« Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, lors de son briefing quotidien, précisant qu'« aucun » nouvel appel entre les deux dirigeants n'était « prévu pour l'instant ».

Donald Trump a dit à la chaîne américaine NBC être « très énervé, furieux » envers son homologue russe, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une « administration transitoire » en Ukraine, sans son président actuel, Volodymyr Zelensky.

Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

Ces dernières semaines, Moscou et Washington ont convenu d'une remise à plat de leurs relations bilatérales, très fortement dégradées par des années de tensions, qui ont culminé depuis 2022 avec le déclenchement de l'assaut russe contre l'Ukraine, soutenue par les États-Unis.

Donald Trump, qui souhaite mettre fin au conflit le plus rapidement possible, a également menacé la Russie de nouvelles taxes sur le pétrole russe si aucun accord n'était trouvé.

Or, la manne financière issue de la vente de son or noir est vitale pour Moscou, qui doit financer son offensive en Ukraine, particulièrement coûteuse.

Le président russe Vladimir Poutine a rejeté plus tôt ce mois-ci la proposition de cessez-le-feu inconditionnel de Donald Trump en Ukraine, que Kiev avait pourtant acceptée sous pression américaine.

Lundi, Dmitri Peskov a martelé que la Russie continuait à travailler « tout d'abord sur l'établissement de relations bilatérales et nous travaillons également sur la mise en œuvre de certaines idées liées au règlement ukrainien ».

« Le travail est en cours. Il n'y a pas encore de détails précis. Il s'agit d'un processus qui prend du temps, probablement en raison de la complexité du sujet », a-t-il poursuivi.


Lutte contre l'immigration clandestine : plus de 40 pays réunis à Londres

Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Short Url
  • Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale.
  • Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

LONDRES : Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale, un dossier prioritaire pour Londres.

Le dirigeant travailliste, qui a pris ses fonctions en juillet dernier, a promis, comme ses prédécesseurs conservateurs, d'endiguer le phénomène des « small boats » (petits bateaux) en luttant contre les réseaux de passeurs.

Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

Keir Starmer donnera le coup d'envoi de ce « premier grand sommet international organisé au Royaume-Uni pour faire face à l'urgence de l'immigration clandestine », qui se tiendra sous la houlette de la ministre de l'Intérieur Yvette Cooper.

Le ministre français Bruno Retailleau et son homologue allemande Nancy Faeser sont attendus, de même que des représentants du reste de l'Europe, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique du Nord, y compris des États-Unis.

Les discussions porteront sur la collaboration entre les États pour démanteler les réseaux de passeurs de migrants, notamment vers le Royaume-Uni et les pays de l'Union européenne.

« Je ne crois tout simplement pas qu'il soit impossible de s'attaquer à la criminalité organisée liée à l'immigration », a déclaré le dirigeant travailliste dans un communiqué diffusé dimanche par le ministère de l'Intérieur.

- « Consensus mondial » -

« Nous devons combiner nos ressources, partager nos renseignements et nos tactiques, et nous attaquer au problème en amont », doit-il ajouter.

Ce sommet s'inscrit dans le prolongement des discussions que Mme Cooper avait eues en décembre avec ses homologues belge, allemand, français et néerlandais.

Les cinq pays avaient alors signé un plan d'action commun destiné à renforcer la coopération pour lutter contre ces réseaux de passeurs de migrants.

Le sommet de cette semaine réunira des représentants de pays de départ de migrants, comme le Vietnam ou l'Irak, ainsi que de pays de transit, comme ceux des Balkans.

Il réunira également le directeur de la Border Force, l'agence responsable des opérations de contrôle de la frontière au Royaume-Uni, ainsi que des représentants d'Interpol, d'Europol et d'Afripol.

Selon le ministère britannique de l'Intérieur, les ministres discuteront de l'équipement, de l'infrastructure et des faux papiers que les bandes criminelles utilisent pour faire entrer des personnes illégalement.

Ils examineront également le fonctionnement des filières et chercheront à « établir un consensus mondial sur la lutte » contre le recrutement de migrants en ligne.

Les Britanniques souhaitent également voir avec la Chine comment elle peut cesser d'exporter des moteurs et d'autres pièces détachées de petits bateaux utilisés pour les traversées de la Manche.

Keir Starmer est sous pression, face à la montée du parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage, qui a obtenu environ quatre millions de voix lors des élections générales de juillet, un résultat sans précédent pour un parti d'extrême droite.

Le Premier ministre a comparé les passeurs d'immigrés clandestins à des « terroristes ». En réponse, son gouvernement a introduit un projet de loi conférant aux forces de l'ordre des pouvoirs comparables à ceux dont elles disposent en matière de lutte antiterroriste, afin de combattre ces réseaux.

En février, le gouvernement a durci les règles d'acquisition de la nationalité pour la rendre pratiquement impossible à une personne arrivée illégalement au Royaume-Uni.

Il a aussi annoncé des règles plus strictes en matière de droit du travail.

« Fermer les yeux sur le travail illégal fait le jeu des passeurs qui tentent de vendre des places sur des bateaux peu solides et surchargés en promettant un travail et une vie au Royaume-Uni », a déclaré dimanche Mme Cooper, citée dans un communiqué de son ministère.

Au total, plus de 157 770 migrants sont arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche à bord de petites embarcations depuis que le gouvernement a commencé à collecter des données en 2018.