L’Irak n’est pas le prochain Afghanistan

Une photographie prise le 24 avril 2020 montre la mosquée du 17 Ramadan dans la capitale irakienne Bagdad. (Photo, AFP)
Une photographie prise le 24 avril 2020 montre la mosquée du 17 Ramadan dans la capitale irakienne Bagdad. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 03 septembre 2021

L’Irak n’est pas le prochain Afghanistan

  • Après près de vingt ans de présence sur le sol afghan, le retrait américain a non seulement engendré un retour au pouvoir des talibans, mais il s’est accompagné d’une résurgence spectaculaire de Daech
  • Ces évolutions dramatiques ne peuvent qu’alimenter les appréhensions des Irakiens et raviver les souvenirs douloureux des quatre années durant lesquelles un tiers de leur pays était sous la domination de cette organisation

BAGDAD: Ce n’est pas sans craintes que les Irakiens envisagent le retrait des troupes américaines de leur pays prévu pour la fin de l’année.

Il leur suffit de regarder du côté de l’Afghanistan pour appréhender le pire.

Après près de vingt ans de présence sur le sol afghan, le retrait américain a non seulement engendré un retour au pouvoir des talibans, mais il s’est accompagné d’une résurgence spectaculaire de Daech.

L’attentat revendiqué par l’organisation terroriste à l’aéroport de Kaboul a fait plus de cent quatre-vingts morts et près de deux cents blessés, parmi lesquels de nombreux soldats américains.

Ces évolutions dramatiques ne peuvent qu’alimenter les appréhensions des Irakiens et raviver les souvenirs douloureux des quatre années durant lesquelles un tiers de leur pays était sous la domination de cette organisation.

Ces mêmes craintes se sont également exprimées lors du sommet de Bagdad pour la coopération et le partenariat qui s’est tenu le 28 juillet.

D’ailleurs, l’un des objectifs de ce sommet était de soutenir l’Irak dans sa lutte contre la menace terroriste de Daech.

Plusieurs sources informées rencontrées à Bagdad, s’accordent pour dire que les craintes au niveau populaire sont justifiées, mais que l’Irak ne connaîtra pas un sort similaire à l’Afghanistan.

Le président français, Emmanuel Macron, l’a clairement exprimé durant le sommet en déclarant: «Nous savons qu’il ne faut pas baisser la garde, car Daech demeure une menace» et que le combat contre le terrorisme reste une priorité pour le gouvernement irakien.

Il a également ajouté que le sommet va permettre de soutenir l’Irak, «en posant un cadre de coopération pour lutter contre le terrorisme».

Une source proche des protestataires de 2019 note que «Daech est dans l’impossibilité de récupérer sa domination d’antan» sur le pays.

Cependant, plusieurs sources informées rencontrées à Bagdad, s’accordent pour dire que les craintes au niveau populaire sont justifiées, mais que l’Irak ne connaîtra pas un sort similaire à l’Afghanistan, en cas de retrait américain.

S’il est vrai que le dernier attentat perpétré par Daech en Irak remonte à juillet dernier, il est également vrai que le coup d’éclat à Kaboul peut galvaniser l’organisation qui voudra démontrer qu’elle est toujours présente en Irak.

Toutefois, une source proche des protestataires de 2019 note que «Daech est dans l’impossibilité de récupérer sa domination d’antan» sur le pays.

Elle estime à juste titre que des dispositions sont envisagées à haut niveau pour remplacer les troupes américaines, si le retrait a lieu, par des troupes de la coalition.

Dans ce cadre, Emmanuel Macron a d’ores et déjà annoncé que les huit cents soldats français engagés en Irak resteront sur place en cas de retrait américain.

Pour un proche d’une des sphères du pouvoir, les craintes sont dans les esprits «mais elles ne sont pas fondées» puisque le retrait américain a déjà eu lieu.

Ce qu’il faut surtout craindre c’est «une montée en puissance des milices chiites du Hachd al-Chaabi» qui pourrait déstabiliser le fragile équilibre qui règne entre les communautés du pays.

En effet, sur les cinq cent mille soldats américains déployés en Irak, il ne reste plus que deux mille cinq cents soldats; selon la source précitée, ce qu’il faut surtout craindre, c’est «une montée en puissance des milices chiites du Hachd al-Chaabi» qui pourrait déstabiliser le fragile équilibre qui règne entre les communautés du pays.

Une monté en puissance de Daech pourrait exacerber les inquiétudes des minorités

Une telle montée en puissance pourrait exacerber les inquiétudes des minorités sunnites et kurdes, au risque de provoquer une réaction radicale qui émanera de leurs rangs, sous la bannière de Daech ou d’une bannière similaire.

Mais cette éventualité est écartée par une troisième source, elle aussi proche de l’une des sphères du pouvoir.

Selon cette source, «malgré son envie profonde de renforcer son influence en Irak, l’Iran sait que ce pays en plus d’être grand est difficile à contrôler».

Elle estime qu’il y a «une sorte d’accord tacite entre les États-Unis et l’Iran pour maintenir l’Irak dans son statu quo».

Pour cette raison, il semble peu probable que les américains disparaissent totalement, après avoir été impliqué à tous les niveaux, dans les moindres détails de la vie irakienne.

D’après la source, les deux mille cinq cents soldats américains devront assumer, si le retrait a bel et bien lieu, la fonction de conseillers des forces de sécurités irakiennes.

D’ailleurs, l’accord signé à Washington entre le Premier ministre irakien, Moustafa al-Kazimi, et le président américain, Joe Biden, stipule la fin de la mission de combat pour les troupes américaines.

Contrairement à l’Afghanistan, il ne porte pas sur un désengagement américain total du pays.

L’Irak ne sera donc pas démuni, si le retrait américain se réalise effectivement. Il ne fait pas de doute que la débâcle du récent retrait d’Afghanistan poussera l’administration américaine à une planification plus méticuleuse des retombées éventuelles d’un retrait du sol irakien.

Il est donc clair que les aléas d’un équilibre pas toujours évident entre l’influence iranienne et celle des États-Unis, continueront à marquer la vie politique irakienne.

Loin de promettre aux Irakiens des lendemains qui chantent, cet état de fait leur permet de continuer à vivre dans une relative stabilité.


Explosion au port de Beyrouth: première comparution d'un ex-ministre

Une photo montre une vue du port de Beyrouth, site d'une énorme explosion qui a dévasté la capitale libanaise trois ans plus tôt, le 22 juillet 2023. (AFP)
Une photo montre une vue du port de Beyrouth, site d'une énorme explosion qui a dévasté la capitale libanaise trois ans plus tôt, le 22 juillet 2023. (AFP)
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  • Un ancien ministre de l'Intérieur a comparu jeudi pour la première fois devant le juge libanais chargé de l'enquête sur la gigantesque explosion au port de Beyrouth en 2020
  • En 2021, le juge Tarek Bitar avait été contraint de suspendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 220 morts et plus de 6.500 blessés en raison de pressions politiques

BEYROUTH: Un ancien ministre de l'Intérieur a comparu jeudi pour la première fois devant le juge libanais chargé de l'enquête sur la gigantesque explosion au port de Beyrouth en 2020, a indiqué une source judiciaire à l'AFP.

En 2021, le juge Tarek Bitar avait été contraint de suspendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 220 morts et plus de 6.500 blessés en raison de pressions politiques.

Une série d'actions en justice avaient en outre été intentées contre lui par des responsables politiques et fonctionnaires cités dans l'enquête, notamment l'ancien ministre de l'Intérieur, Nohad al-Machnouk, soupçonné de "négligence et manquements".

Le juge a repris en février ses investigations, après l'élection de Joseph Aoun à la présidence de la République et la nomination d'un Premier ministre réformateur, Nawaf Salam, qui se sont tous deux engagés à garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Selon la source judiciaire qui a requis l'anonymat, l'interrogatoire a porté sur un rapport que M. Machnouk avait reçu le 5 avril 2014, alors qu'il était ministre de l'Intérieur, concernant la "détention d’un navire dans les eaux territoriales libanaises, dont l’équipage avait demandé à être autorisé à reprendre la mer".

Le 4 août 2020, l'une des plus grandes explosions non nucléaires de l'histoire a dévasté des pans entiers de la capitale libanaise.

La déflagration a été provoquée par un incendie dans un entrepôt où étaient stockées sans précaution des tonnes de nitrate d'ammonium acheminées par navire, malgré des avertissements répétés aux plus hauts responsables.

Pointées du doigt pour négligence criminelle, les autorités libanaises, qui étaient au courant des dangers encourus, ont rejeté toute enquête internationale.

L'enquête avait notamment été suspendue après les accusations de partialité du juge proférées par le Hezbollah, désormais très affaibli par sa dernière guerre contre Israël fin 2024. Le parti qui dominait la vie politique libanaise avait demandé le renvoi de M. Bitar.

Deux juges de la direction des enquêtes de Paris sont attendus à Beyrouth à la fin du mois, pour présenter à M. Bitar les éléments recueillis par la justice française, trois ressortissants français figurant parmi les victimes, selon une source judiciaire.

Le 11 avril, deux anciens hauts responsables de la sécurité avaient également comparu pour la première fois devant M. Bitar.


Cellule terroriste: Amman partage les détails de l’enquête avec Beyrouth

Le roi Abdallah de Jordanie et le président libanais Joseph Aoun. (AFP)
Le roi Abdallah de Jordanie et le président libanais Joseph Aoun. (AFP)
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  • Beyrouth ne sait pas si des citoyens libanais sont impliqués dans un groupe de fabrication de missiles
  • Les services de renseignement de l'armée arrêtent deux Palestiniens pour contrebande d'armes à la frontière libano-syrienne

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a été informé, mercredi, par le roi Abdallah de Jordanie des résultats de l'enquête sur une cellule de fabrication de missiles découverte en Jordanie. Deux membres de cette cellule avaient été envoyés au Liban pour y suivre une formation.

Selon son bureau de presse, M. Aoun a exprimé la «pleine disposition du Liban à la coordination et à la coopération» entre les deux pays et a chargé le ministre de la Justice Adel Nassar de travailler avec son homologue jordanien, en coopération avec les agences de sécurité et judiciaires, sur les enquêtes et l'échange d'informations.

Une source judiciaire a déclaré à Arab News que les services de renseignement de l'armée libanaise «suivaient de près l'affaire de la cellule terroriste et nous ne savons pas encore si des Libanais sont impliqués».

«Cette agence a demandé à la Jordanie de lui fournir des informations concernant les enquêtes, de s'appuyer sur les enquêtes libanaises et, dans le cas où une implication libanaise serait prouvée, l'affaire serait alors renvoyée à la justice libanaise», a déclaré cette personne.

Parallèlement, les services de renseignement de l'armée libanaise ont déclaré avoir arrêté deux Palestiniens dans la ville de Sidon, dans le sud du pays, pour «commerce et contrebande d'armes militaires à travers la frontière libano-syrienne, et ont saisi plusieurs armes et munitions militaires en leur possession».

Le commandement de l'armée a déclaré que les détenus faisaient l'objet d'une enquête sous la supervision du pouvoir judiciaire.

Les médias ont rapporté que les deux hommes étaient des membres de l'appareil de sécurité du mouvement Hamas à Sidon.

Aucune agence de sécurité officielle n'a confirmé l'existence d'un lien entre les arrestations et la cellule jordanienne.

Mardi, l'agence de presse jordanienne a cité des responsables des services de renseignement qui ont déclaré qu'«une série de complots visant la sécurité nationale du pays ont été déjoués et 16 personnes soupçonnées de préparer des actes de chaos et de sabotage ont été arrêtées».

Les plans prévoyaient la production de missiles à l'aide de matériaux locaux et de composants importés. Des explosifs et des armes à feu ont été découverts, ainsi qu'un missile dissimulé prêt à être utilisé.

Les 16 suspects sont soupçonnés d'avoir participé à la mise au point de drones, d'avoir recruté et formé des individus au niveau national et d'en avoir envoyé d'autres à l'étranger pour qu'ils y poursuivent leur formation.

Selon les déclarations des suspects, deux membres de la cellule – Abdallah Hicham et Muath al-Ghanem – ont été envoyés au Liban pour coordonner leurs activités avec une figure importante de l'organisation et recevoir une formation.

En décembre, l'armée libanaise a lancé un processus de désarmement des factions palestiniennes situées à l'extérieur des camps de réfugiés palestiniens. Ces factions, fidèles à l'ancien régime syrien, étaient principalement basées dans la région de la Békaa, le long de la frontière avec la Syrie, et dans la région méridionale.

Le Premier ministre Nawaf Salam a exprimé «l'entière solidarité du Liban avec la Jordanie dans la lutte contre les complots qui menacent sa sécurité et sa stabilité» et sa «volonté de coopérer avec les autorités jordaniennes en cas de besoin concernant les informations selon lesquelles certaines personnes impliquées dans ces complots ont reçu une formation au Liban», selon son bureau de presse.

Lors du lancement du projet de réhabilitation de la route de l'aéroport de Beyrouth, M. Salam a déclaré que les questions de sécurité sur la route de l'aéroport étaient «en cours d'examen avec le ministre de la Défense Michel Menassa et le ministre de l'Intérieur Ahmed Hajjar».

Au cours des dernières 48 heures, la municipalité de Beyrouth a entrepris des efforts pour retirer des rues de la capitale les drapeaux des partis et les images des politiciens et des chefs de partis, en particulier ceux qui sont associés au Hezbollah.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban: deux morts dans de nouvelles frappes israéliennes sur le sud

Le Liban a fait état de deux morts dans des frappes israéliennes distinctes sur le sud du pays mercredi, alors que l'armée israélienne a déclaré avoir tué un agent du Hezbollah, malgré le cessez-le-feu entre les deux parties. (X/@MajaletAzhar_)
Le Liban a fait état de deux morts dans des frappes israéliennes distinctes sur le sud du pays mercredi, alors que l'armée israélienne a déclaré avoir tué un agent du Hezbollah, malgré le cessez-le-feu entre les deux parties. (X/@MajaletAzhar_)
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  • Deux personnes ont été tuées dans deux nouvelles frappes israéliennes sur le sud du Liban mercredi
  • Malgré le cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre, Israël continue de mener régulièrement des attaques au Liban

BEYROUTH: Deux personnes ont été tuées dans deux nouvelles frappes israéliennes sur le sud du Liban mercredi, a indiqué le ministère libanais de la Santé, l'armée israélienne disant avoir visé deux combattants du Hezbollah.

Malgré le cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre, Israël continue de mener régulièrement des attaques au Liban, affirmant viser le Hezbollah pro-iranien.

"La frappe menée par l'ennemi israélien à l'aide d'un drone sur une voiture (...) a fait un mort" dans la région de Wadi al-Hujair, a indiqué le ministère de la Santé, "un terroriste de la force al-Radwan du Hezbollah", selon l'armée israélienne.

Une deuxième frappe israélienne sur la localité de Hanine a "coûté la vie à un civil et en a blessé un autre", selon le ministère de la Santé libanais. D'après l'agence nationale d’information officielle Ani, la frappe visait une "moto".

L'armée israélienne a indiqué avoir visé "un terroriste du Hezbollah" dans ce secteur, sans préciser s'il avait été tué ou non.

Mardi, une attaque de drone israélien sur une voiture dans le secteur de Aïtaroun a fait deux morts, selon un nouveau bilan du ministère de la Santé, l'un des trois blessés, un adolescent âgé de 17 ans, étant décédé.

L'armée israélienne avait affirmé mardi avoir éliminé "un commandant appartenant à la division des opérations spéciales du Hezbollah" dans cette région du sud du Liban.

Le même jour, l'ONU a indiqué que 71 civils, y compris plusieurs femmes et enfants, avaient été tués par l'armée israélienne au Liban depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu ayant mis fin le 27 novembre à une guerre meurtrière entre Israël et le Hezbollah.

L'accord de cessez-le-feu prévoit que seuls les Casques bleus de l'ONU et l'armée libanaise soient déployés dans le sud du Liban, frontalier d'Israël.

Le Hezbollah, très affaibli par la guerre, doit pour sa part se retirer au nord du fleuve Litani, à quelque 30 km de la frontière israélienne, et démanteler ses infrastructures militaires restantes dans le sud.

L'armée israélienne devait se retirer entièrement du sud du Liban mais elle s'est maintenue dans cinq points stratégiques.

Déclenchée en octobre 2023, la guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza a poussé le Hezbollah à ouvrir un front depuis le sud du Liban en soutien au mouvement palestinien.

En septembre 2024, le conflit a dégénéré en guerre ouverte: les bombardements israéliens ont décimé la direction du Hezbollah et fait plus de 4.000 morts.