BAGDAD: Ce n’est pas sans craintes que les Irakiens envisagent le retrait des troupes américaines de leur pays prévu pour la fin de l’année.
Il leur suffit de regarder du côté de l’Afghanistan pour appréhender le pire.
Après près de vingt ans de présence sur le sol afghan, le retrait américain a non seulement engendré un retour au pouvoir des talibans, mais il s’est accompagné d’une résurgence spectaculaire de Daech.
L’attentat revendiqué par l’organisation terroriste à l’aéroport de Kaboul a fait plus de cent quatre-vingts morts et près de deux cents blessés, parmi lesquels de nombreux soldats américains.
Ces évolutions dramatiques ne peuvent qu’alimenter les appréhensions des Irakiens et raviver les souvenirs douloureux des quatre années durant lesquelles un tiers de leur pays était sous la domination de cette organisation.
Ces mêmes craintes se sont également exprimées lors du sommet de Bagdad pour la coopération et le partenariat qui s’est tenu le 28 juillet.
D’ailleurs, l’un des objectifs de ce sommet était de soutenir l’Irak dans sa lutte contre la menace terroriste de Daech.
Plusieurs sources informées rencontrées à Bagdad, s’accordent pour dire que les craintes au niveau populaire sont justifiées, mais que l’Irak ne connaîtra pas un sort similaire à l’Afghanistan.
Le président français, Emmanuel Macron, l’a clairement exprimé durant le sommet en déclarant: «Nous savons qu’il ne faut pas baisser la garde, car Daech demeure une menace» et que le combat contre le terrorisme reste une priorité pour le gouvernement irakien.
Il a également ajouté que le sommet va permettre de soutenir l’Irak, «en posant un cadre de coopération pour lutter contre le terrorisme».
Une source proche des protestataires de 2019 note que «Daech est dans l’impossibilité de récupérer sa domination d’antan» sur le pays.
Cependant, plusieurs sources informées rencontrées à Bagdad, s’accordent pour dire que les craintes au niveau populaire sont justifiées, mais que l’Irak ne connaîtra pas un sort similaire à l’Afghanistan, en cas de retrait américain.
S’il est vrai que le dernier attentat perpétré par Daech en Irak remonte à juillet dernier, il est également vrai que le coup d’éclat à Kaboul peut galvaniser l’organisation qui voudra démontrer qu’elle est toujours présente en Irak.
Toutefois, une source proche des protestataires de 2019 note que «Daech est dans l’impossibilité de récupérer sa domination d’antan» sur le pays.
Elle estime à juste titre que des dispositions sont envisagées à haut niveau pour remplacer les troupes américaines, si le retrait a lieu, par des troupes de la coalition.
Dans ce cadre, Emmanuel Macron a d’ores et déjà annoncé que les huit cents soldats français engagés en Irak resteront sur place en cas de retrait américain.
Pour un proche d’une des sphères du pouvoir, les craintes sont dans les esprits «mais elles ne sont pas fondées» puisque le retrait américain a déjà eu lieu.
Ce qu’il faut surtout craindre c’est «une montée en puissance des milices chiites du Hachd al-Chaabi» qui pourrait déstabiliser le fragile équilibre qui règne entre les communautés du pays.
En effet, sur les cinq cent mille soldats américains déployés en Irak, il ne reste plus que deux mille cinq cents soldats; selon la source précitée, ce qu’il faut surtout craindre, c’est «une montée en puissance des milices chiites du Hachd al-Chaabi» qui pourrait déstabiliser le fragile équilibre qui règne entre les communautés du pays.
Une monté en puissance de Daech pourrait exacerber les inquiétudes des minorités
Une telle montée en puissance pourrait exacerber les inquiétudes des minorités sunnites et kurdes, au risque de provoquer une réaction radicale qui émanera de leurs rangs, sous la bannière de Daech ou d’une bannière similaire.
Mais cette éventualité est écartée par une troisième source, elle aussi proche de l’une des sphères du pouvoir.
Selon cette source, «malgré son envie profonde de renforcer son influence en Irak, l’Iran sait que ce pays en plus d’être grand est difficile à contrôler».
Elle estime qu’il y a «une sorte d’accord tacite entre les États-Unis et l’Iran pour maintenir l’Irak dans son statu quo».
Pour cette raison, il semble peu probable que les américains disparaissent totalement, après avoir été impliqué à tous les niveaux, dans les moindres détails de la vie irakienne.
D’après la source, les deux mille cinq cents soldats américains devront assumer, si le retrait a bel et bien lieu, la fonction de conseillers des forces de sécurités irakiennes.
D’ailleurs, l’accord signé à Washington entre le Premier ministre irakien, Moustafa al-Kazimi, et le président américain, Joe Biden, stipule la fin de la mission de combat pour les troupes américaines.
Contrairement à l’Afghanistan, il ne porte pas sur un désengagement américain total du pays.
L’Irak ne sera donc pas démuni, si le retrait américain se réalise effectivement. Il ne fait pas de doute que la débâcle du récent retrait d’Afghanistan poussera l’administration américaine à une planification plus méticuleuse des retombées éventuelles d’un retrait du sol irakien.
Il est donc clair que les aléas d’un équilibre pas toujours évident entre l’influence iranienne et celle des États-Unis, continueront à marquer la vie politique irakienne.
Loin de promettre aux Irakiens des lendemains qui chantent, cet état de fait leur permet de continuer à vivre dans une relative stabilité.