PARIS: Les arrivées de migrants afghans attendues en Europe après la prise de pouvoir des talibans ne seront pas aussi nombreuses que les arrivées massives de 2015 liées à la guerre en Syrie, a estimé dimanche Emmanuel Macron.
"Je ne pense pas que la situation que nous allons vivre soit comparable à 2015 parce que l'Afghanistan n'est pas la Syrie, et parce qu'il y a déjà eu de très fort mouvements" de migrants afghans au fil des ans, a déclaré le chef de l'État sur les chaînes TF1 et LCI.
"Ce qui est sûr, c'est qu'il y aura plus de monde qui essaiera de venir en Europe et donc cela créera une pression sur nos capacités à accueillir", a-t-il déclaré, en référence aux flux migratoires illégaux, et après avoir répété que la France allait par ailleurs accueillir les Afghans menacés par les talibans.
En 2015 l'Europe avait subi une très importe vague de migration illégale provoquée notamment par la guerre en Syrie, qui a provoqué un intense malaise en Europe et accentué la crise entre pays membres sur la répartition de la pression migratoire.
Concernant les Afghans que la France veut mettre à l'abri des talibans en raison de leur engagement aux côtés de la France par le passé ou leur engagement pour les droits humains, il reste "plusieurs milliers de femmes et d'hommes qui sont à protéger", a déclaré Emmanuel Macron.
"On a fait le maximum de ce que nous pouvions faire (...) nous allons construire avec nos partenaires, par une négociation aussi avec les talibans qui maintenant s'impose, les solutions pour au fil de l'eau, au maximum, leur permettre de quitter Kaboul et l'Afghanistan, et d'être protégés", a-t-il dit, alors que la France a fermé son pont aérien vendredi et que les États-Unis sont sur le point de fermer le leur.
Discuter des évacuations avec les talibans «ne préjuge pas d'une reconnaissance» ultérieure
Ouvrir des discussions avec les talibans n'implique pas une reconnaissance ultérieure de leur gouvernement, a affirmé dimanche Emmanuel Macron sur TF1, en posant plusieurs conditions à une éventuelle reconnaissance, dont "le respect des droits de l'homme" et "de la dignité des femmes afghanes".
"Nous avons des opérations à conduire, qui sont des évacuations" et "ceux qui ont le contrôle de Kaboul et du territoire (afghan) sont les talibans, donc de manière opérationnelle, (...) nous devons avoir ces discussions" mais "cela ne préjuge pas d'une reconnaissance, parce que nous avons posé des conditions", a affirmé le chef de l'État depuis Erbil, en Irak.
M. Macron cite trois conditions dans cet entretien enregistré.
"La première chose, c'est que les talibans respectent le droit humanitaire et la protection de toutes celles et ceux qui ont le droit d'être protégés par l'asile", a-t-il fait valoir.
La deuxième condition est "qu'ils soient très clairs à l'égard de tous les mouvements terroristes" car "s'ils pactisent avec les mouvements terroristes présents dans la région, évidemment ce sera inacceptable pour nous tous".
"La troisième chose c'est le respect des droits de l'homme, des valeurs qui sont les nôtres, en particulier du respect de la dignité des femmes afghanes", a-t-il affirmé.
Interrogé sur la probabilité que les talibans laissent les opérations se poursuivre après le 31 août, Emmanuel Macron s'est montré "prudent".
"Je ne serais pas définitif (...) parce que je veux que nos opérations réussissent", a-t-il expliqué.
"Nous avons initié un dialogue" qui est mené "par aussi plusieurs autres pays alliés avec les talibans", a-t-il dit, en soulignant le "rôle tout particulier que le Qatar a joué depuis plusieurs mois dans ces négociations", et "donc l'objectif est d'obtenir les évacuations humanitaires de toutes les femmes et les hommes qui courent un risque".
"Est-ce que nous y arriverons? Je ne peux pas vous le garantir", a-t-il ajouté.
La question de la migration illégale est un sujet sensible en Europe, et particulièrement en France à huit mois de l'élection présidentielle. L'immigration s'affirme déjà comme l'un des thèmes de la campagne électorale à venir.
Emmanuel Macron a notamment été critiqué par la gauche pour avoir évoqué les flux migratoires illégaux en provenance d'Afghanistan juste après la chute de Kaboul, tandis que la droite l'accusait de naïveté.
Interrogé sur un éventuel risque terroriste accru après la prise de pouvoir des talibans, qui ont par le passé abrité des terroristes, Emmanuel Macron a souligné que "nous devons tous rester dans la vigilance".
Il a également insisté sur l'importance de ne pas "confondre" le risque terroriste et les migrations.
"Ces dernières années, les attentats en France ont plutôt été le fait d'individus isolés, qui avaient pu être influencés par des contenus extérieurs" mais "pas de complots qui étaient construits depuis l'extérieur". "Nous avons renforcé nos moyens, nous travaillons avec nos partenaires et aussi avec les pays amis qui sont frappés par le terrorisme", comme l'Irak, a-t-il précisé.