STRASBOURG: Petit, discret et citadin, il est aussi assoiffé de sang et vecteur potentiel de maladies graves: à Strasbourg, où le moustique-tigre prolifère, la chasse aux eaux stagnantes bat son plein dans les jardins.
"Ma femme ne vient plus à cause de cela", indique José Sampaio à l'entrée du vaste jardin familial qu'il loue. Cet été, les séjours dans les espaces verts se terminent bien souvent par un concert de claques en l'air et des séances de grattage.
Les pluies abondantes ont fait pulluler le moustique dit "autochtone", mais aussi le moustique-tigre, Aedes albopictus, reconnaissable à ses fines rayures blanches.
"Il y en a plus que d'habitude", confirme Jean-Pierre Danard, le trésorier de l'association des jardins ouvriers de Schiltigheim qui fait pousser de la citronnelle, réputée répulsive, dans son potager de cette commune limitrophe de Strasbourg.
Armés d'un rouleau de moustiquaire, d'une longue louche pour vérifier la présence de larves et de dépliants, Christelle Bender et Alexis Bergeron du syndicat de lutte contre les moustiques du Bas-Rhin (SLM67), opérateur public du département, arpentent les allées des milliers de jardins familiaux que compte Strasbourg pour sensibiliser les jardiniers amateurs aux risques que font peser les moustiques-tigres.
Moustique urbain
"100% urbain", Aedes albopictus se développe à 80% chez les particuliers et s'avère d'autant plus nuisible qu'il pique en permanence dans la journée et peut transmettre des maladies virales comme la dengue, le chikungunya ou zika s'il a précédemment piqué un malade.
"Absolument tout ce qui peut retenir de l'eau et qui est artificiel peut constituer un gîte larvaire", explique Christelle Bender, responsable technique du SLM67, qui conseille de vider tout objet où de l'eau de pluie pourrait stagner, ne serait-ce qu'un petit cendrier.
La moustiquaire sur le fût de récupération d'eau de pluie de José Sampaio a été renouvelée et s'avère bien ajustée. Mais dans la parcelle d'à côté, une piscine gonflable jouxte un fût percé, un empilement de coupelles et un arrosoir au sol. Un paradis pour moustique-tigre en somme.
"Avec un repas sanguin, un moustique-tigre peut pondre jusqu'à 200 oeufs", qui, une fois immergés, donneront des larves et une semaine plus tard environ des moustiques, détaille Alexis Bergeron, technicien du SLM67.
Plus petit et plus discret que le moustique commun qui pique le soir et vrombit, le moustique-tigre a été repéré pour la première fois en France métropolitaine en 2004 dans les Alpes-Maritimes avant de s'étendre progressivement à une soixantaine de départements.
Dans le Bas-Rhin, il a fait son apparition en 2015. Depuis "la zone de colonisation double d'année en année", relate Christelle Bender.
"Une fois qu'il est installé quelque part, il reste, donc l'objectif est de faire diminuer la population. Le citoyen a un rôle prépondérant dans la lutte contre le moustique-tigre", souligne-t-elle. D'où l'importance de ces actions prévention même en cette fin d'été, car le moustique-tigre connaît son pic d'activité en août et septembre, plus tardivement que le moustique autochtone.
Maladies
Dans le Var, deux cas de dengue "autochtones" chez des personnes n'ayant pas voyagé ont été détectés ces derniers temps.
Rien de tel dans le Grand Est, où seuls le Bas-Rhin et le Haut-Rhin sont colonisés, précise l'Agence régionale de santé (ARS). Mais cinq cas "importés" de personnes ayant voyagé ont été signalés cette année en Alsace, ce qui a nécessité deux opérations de démoustication en urgence. Il s'agissait de parer tout risque de transmission à d'autres personnes "quand le malade se trouve dans une zone infestée par le moustique-tigre".
Dans les deux cas, un insecticide, la deltaméthrine, a été pulvérisé de nuit dans les communes concernées après en avoir informé les riverains.
(La présence du moustique-tigre peut être signalée sur le site www.signalement-moustique.fr)