Afghanistan: le dilemme des géants des réseaux sociaux face aux talibans

Usager et logo Facebook (AFP)
Usager et logo Facebook (AFP)
Short Url
Publié le Vendredi 20 août 2021

Afghanistan: le dilemme des géants des réseaux sociaux face aux talibans

  • La dernière fois que les talibans étaient maîtres de l'Afghanistan, les réseaux sociaux n'existaient pas encore
  • Depuis leur retour au pouvoir, les géants américains Facebook et Twitter sont partagés entre l'interdiction des comptes liés aux "«Organisations terroristes» et l'intérêt public d'information

PARIS : La dernière fois que les talibans étaient maîtres de l'Afghanistan, les réseaux sociaux n'existaient pas encore. Depuis leur retour au pouvoir, les géants américains Facebook et Twitter sont partagés entre l'interdiction des comptes liés aux "organisations terroristes" et l'intérêt public d'information.

Alors que leur arrivée à Kaboul a déclenché une panique internationale, les responsables talibans se sont tournés vers Twitter pour diffuser un message de calme.

Les affirmations selon lesquelles ils obligent les jeunes filles à épouser des combattants sont de la "propagande empoisonnée", a par exemple assuré leur porte-parole international Suhail Shaheen auprès de ses 350.000 "followers".

Que les talibans puissent tweeter a ulcéré. Notamment parmi les partisans de l'ex-président américain Donald Trump, banni du réseau social en janvier en raison du risque présumé d'incitation à la violence.

"J'attends avec impatience une réponse rapide sur les raisons pour lesquelles un ancien président des États-Unis est interdit alors que deux porte-parole des talibans sont autorisés à rester", s'est plaint le représentant américain Doug Lamborn dans une lettre au PDG de Twitter, Jack Dorsey. 

Si M. Lamborn et d'autres s'indignent que Twitter fournisse aux talibans un mégaphone mondial leur permettant de se présenter comme légitimes, d'autres soutiennent au contraire que débrancher tout moyen de communication est contraire à l'intérêt public, alors que les Afghans sont impatients de savoir à quoi s'attendre de la part de leurs nouveaux dirigeants. 

Sur la messagerie WhatsApp, le compte du porte-parole des talibans Zabihullah Mujahid semble avoir été bloqué, ce qu'un porte-parole a refusé de confirmer à l'AFP.

«Organisations terroristes»

Le propriétaire de WhatsApp, Facebook, a quant à lui confirmé qu'il considérait les talibans comme une "organisation terroriste" depuis des années et qu'il bloquait donc les comptes talibans sur sa plateforme ainsi que sur Instagram, dont il est également propriétaire. 

"Les talibans sont sanctionnés en tant qu'organisation terroriste en vertu de la loi américaine et nous les avons interdits de nos services en vertu de nos politiques concernant les +organisations dangereuses+. Cela signifie que nous supprimons les comptes gérés par ou au nom des talibans et interdisons leurs éloges, soutiens et représentations", a rappelé à l'AFP un porte-parole de Facebook.

De quoi susciter une réponse acérée de Zabihullah Mujahid lorsqu'il lui a été demandé si les talibans protégeraient la liberté d'expression. "Cette question devrait être posée à la société Facebook", a-t-il déclaré. 

YouTube, propriété de Google, a également annoncé qu'il supprimerait les contenus pro-taliban. Twitter n'a pas répondu à une demande de commentaire. 

Shaheen et trois autres porte-parole des talibans –- qui comptent ensemble près d'un million de "followers" -– continuent de tweeter, ce qui semble indiquer que Twitter a jusqu'à présent refusé de les interdire en vertu de sa politique concernant les "organisations violentes". Celle-ci a déjà servi à justifier la suppression du contenu publié par des organisations islamistes comme le Hamas et le Hezbollah.

Mais le statut des talibans est légèrement ambigu. S'ils figurent sur la liste des organisations terroristes du Trésor américain, ils ne sont pas classés comme organisation terroriste étrangère par le département d'État. 

Pour Raman Chima, responsable Asie au sein du groupe de défense de l'internet Access Now, les réseaux sociaux devraient se pencher sur l'évaluation des messages des talibans qui inciteraient à la violence plutôt que de se fier aux désignations gouvernementales.

La question de savoir si les talibans seront autorisés à communiquer via les comptes officiels des ministères du gouvernement afghan, dont certains comptent des dizaines de milliers de "suiveurs", et à obtenir une certification via un "badge bleu", reste sans réponse. 

Reste que les talibans ont pris conscience du pouvoir des médias sociaux, une arme qui n'était pas à leur disposition lors de leur passage au pouvoir de 1996 à 2001, rappelle Kabir Taneja, analyste antiterroriste basé à Delhi. 

"Ils ont beaucoup appris sur le pouvoir de la communication d'autres (organisations) telles que le groupe Etat islamique", affirme-t-il.

Si les talibans ont été particulièrement actifs sur Twitter et Facebook lors de leur offensive victorieuse, ils pourraient chercher à restreindre l'accès des Afghans à Internet, averti l'analyste, citant des images de manifestants anti-talibans dans la ville de Jalalabad devenues virales cette semaine.

"Ce genre d'événements pourrait pousser les talibans à contrôler sévèrement la pénétration d'Internet dans les temps à venir", prévient-il.

Facebook incite les Afghans vulnérables à protéger leur compte des talibans

SAN FRANCISCO, USA : Facebook, qui a banni les talibans de toutes ses applications, a dévoilé jeudi des mesures pour protéger les utilisateurs vulnérables en Afghanistan, où le groupe fondamentaliste islamiste a pris le pouvoir.

"Pendant la semaine écoulée, nos équipes ont travaillé jour et nuit pour faire tout notre possible pour aider à garder les gens en sécurité", a tweeté Nathaniel Gleicher, le directeur des règlements sur la sécurité du groupe californien.

Suivant les recommandations de défenseurs des droits humains, de journalistes et d'ONG, le réseau social a mis en place une fonctionnalité qui permet à un utilisateur de "verrouiller son compte en un seul clic".

Le verrouillage empêche les personnes qui ne sont pas dans ses contacts de télécharger ou partager sa photo de profil ou de voir les contenus publiés sur son fil. Les utilisateurs d'Instagram en Afghanistan vont eux recevoir des notifications les informant des méthodes pour protéger leur compte.

"Nous avons aussi temporairement retiré la possibilité de visualiser la +liste d'amis+ d'un usager et d'y chercher des profils pour les comptes Facebook en Afghanistan", contre le risque de ciblage de personnes éventuellement recherchées par des talibans, a ajouté Nathaniel Gleicher.

Il recommande ensuite des organisations et guides pour protéger son activité en ligne.

Mardi, Facebook a fermé une ligne d'assistance mise en place sur WhatsApp par les talibans pour répondre aux plaintes éventuelles des Afghans.

"Nous sommes obligés de nous plier aux lois américaines sur les sanctions. Cela inclut l'interdiction de comptes qui se présentent comme des comptes officiels des talibans", avait expliqué un porte-parole de la messagerie.

Les talibans avaient répondu en critiquant Facebook lors de leur première conférence de presse, diffusée en ligne mardi.

Interrogé sur leurs intentions en termes de respect de la liberté d'expression, le porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, avait répondu que "la question devrait être posée à ceux qui assurent être les garants de la liberté d'expression mais qui n'autorisent pas la publication de toutes les informations. L'entreprise Facebook, c'est à eux qu'il faut poser la question".

Le groupe islamiste a annoncé qu'il allait former un gouvernement, mais "peu importe qui détient le pouvoir, nous prendrons des mesures appropriées contre les comptes et contenus qui enfreignent nos règles", avait insisté Facebook.

La plateforme a indiqué avoir une équipe d'experts dédiés, qui parlent les langues du pays, pour les aider à identifier de possibles problèmes.


Climat : les pays se préparent à une déception générale à Bakou

COP29 Azerbaïdjan 2024
COP29 Azerbaïdjan 2024
Short Url
  • L'Union européenne, premier bailleur mondial pour le climat, a relevé samedi son engagement financier pour les pays en développement.
  • Une première proposition des pays riches d'augmenter leur soutien financier pour les pays les plus pauvres de 100 milliards de dollars par an pour le porter à 250 milliards d'ici 2035 a été rejetée vendredi par la plupart des pays en développement.

BAKOU : L'Union européenne, premier bailleur mondial pour le climat, a relevé samedi son engagement financier pour les pays en développement. Mais quoi qu'il arrive d'ici la nuit, nombre de pays semblent résignés à repartir mécontents de la conférence sur le climat de l'ONU à Bakou.

La présidence azerbaïdjanaise de la COP29 prévoit de publier son ultime proposition de compromis vers 14 h 00 (10 h 00 GMT), avant de le soumettre à l'approbation des près de 200 pays réunis ici vers 18 h 00 (14 h 00 GMT), soit 24 heures après la fin théorique de la conférence.

La plupart des stands de nourriture ont fermé et le service de navettes entre le stade de la ville a cessé. Des délégués commencent à rejoindre l'aéroport.

Une première proposition des pays riches d'augmenter leur soutien financier pour les pays les plus pauvres de 100 milliards de dollars par an pour le porter à 250 milliards d'ici 2035 a été rejetée vendredi par la plupart des pays en développement.

« Mieux vaut un mauvais accord qu'aucun accord », dit à l'AFP le chef des négociateurs du groupe africain, le Kényan Ali Mohamed. Il exige d'aller plus loin que les 250 milliards, « sinon cela mènera à l'échec de la COP ».

« Personne ne sera satisfait de tout, c'est sûr », ajoute-t-il.

L'Union européenne soutient un relèvement à 300 milliards annuels, ont confirmé plusieurs sources au sein de délégations à l'AFP. Mais les Européens conditionnent ce chiffre à d'autres avancées dans le compromis final. L'UE pousse notamment pour une revue annuelle des efforts de réduction des gaz à effet de serre, ce qui la met en opposition avec des pays comme l'Arabie saoudite.

« Les Saoudiens ont fait un effort extraordinaire pour qu'on obtienne rien », s'étrangle un négociateur européen.

« Je ne suis pas optimiste », confie à l'AFP le ministre de l'Environnement de Sierra Leone, Joseph Abdulai.

Alden Meyer, expert qui a participé à presque toutes les COP, prédit que « les pays en développement ne seront pas contents, que ce soit du nouveau chiffre de 300 ou de 350 ».

La question sera alors : accepteront-ils ce qu'ils considéreront être un mauvais accord, ou bloqueront-ils tout texte final ? Aux COP, toute décision doit être prise par consensus des 198 membres.

- Pression des ONG -

Le premier chiffre publié vendredi a été jugé « inacceptable » par les pays africains au regard des catastrophes qu'ils subissent et de leurs énormes besoins d'investissement dans les énergies bas carbone. Les petits États insulaires ont dénoncé le « mépris » dont leurs « peuples vulnérables » font l'objet.

Ils ont calculé que, compte tenu de l'inflation, l'effort financier réel des pays concernés (Europe, États-Unis, Canada, Japon, Australie, Nouvelle-Zélande) serait bien inférieur, a fortiori si l'on tient compte des efforts déjà prévus par les banques multilatérales de développement.

« Si rien de suffisamment fort n'est proposé lors de cette COP, nous vous invitons à quitter la table des négociations pour vous battre un autre jour, et nous mènerons le même combat », ont écrit dans la nuit 335 organisations à une alliance de 134 pays regroupant les pays en développement et la Chine, appelée G77+Chine.

Une stratégie qui contredit le message d'urgence porté par de nombreux pays en développement. Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, qui a d'autres priorités en vue pour la COP30 de Belém l'an prochain, a insisté pour « ne pas repousser » à 2025 la tâche confiée à Bakou.

« Nous devons redonner espoir au monde et montrer que le multilatéralisme fonctionne », a déclaré à l'AFP le ministre irlandais Eamon Ryan.

Les pays en développement chiffrent leurs demandes à entre 500 et 1 300 milliards de dollars par an, afin de les aider à sortir des énergies fossiles et à s'adapter au réchauffement climatique.

Quel nouveau chiffre proposera la présidence azerbaïdjanaise samedi ?

Il faudrait monter à 390 milliards d'ici 2035, ont réagi des économistes mandatés par l'ONU, Amar Bhattacharya, Vera Songwe et Nicholas Stern.

Un chiffre également repris vendredi soir par le Brésil et sa ministre de l'Environnement, Marina Silva.

- Austérité occidentale -

Mais les Européens sont sous pression budgétaire et politique.

L'Europe veut « assumer ses responsabilités, mais doit faire des promesses qu'elle peut tenir », a déclaré la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock.

Le précédent projet d'accord fixait séparément l'objectif de lever 1 300 milliards de dollars par an d'ici 2035 pour les pays en développement ; ce total inclurait la contribution des pays développés et d'autres sources de financement (multilatérales, privées, taxes, autres pays du Sud, etc.).

La Chine semble pour l'instant avoir obtenu ce qu'elle souhaitait : l'exemption d'obligations financières. Il n'est pas question de renégocier la règle onusienne de 1992 qui stipule que la responsabilité de la finance climatique incombe aux pays développés.

Dont acte : le texte de vendredi « invite » les pays en développement, dont la Chine fait officiellement partie, à contribuer.

- Organisation azerbaïdjanaise -

Des négociateurs et des ONG critiquent la gestion de la conférence par les Azerbaïdjanais, qui n'avaient jamais organisé un événement mondial d'une telle ampleur.

La COP s'est déroulée dans une atmosphère pesante. Le président Ilham Aliev a attaqué la France, alliée de son ennemi l'Arménie. Les deux pays ont alors convoqué leurs ambassadeurs respectifs.

Deux parlementaires américains disent avoir été harcelés à Bakou. Plusieurs militants environnementaux azerbaïdjanais sont actuellement détenus.

Pour Alden Meyer, personne ne souhaite suspendre la COP29 pour la reprendre plus tard : « Cela obligerait à travailler encore cinq mois sous cette présidence. »


Le dirigeant de l'OTAN, Mark Rutte, a rencontré Donald Trump aux États-Unis

Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte participe à un sommet informel des dirigeants de l'Union européenne à Bruxelles, le 17 juin 2024. (Reuters)
Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte participe à un sommet informel des dirigeants de l'Union européenne à Bruxelles, le 17 juin 2024. (Reuters)
Short Url
  • « Ils ont discuté de l'ensemble des problèmes de sécurité mondiale auxquels l'Alliance est confrontée » a indiqué la porte-parole de l'Alliance Atlantique.
  • Le soutien nord-coréen apporté à Moscou illustre la nécessité pour les États-Unis de soutenir leur allié, dont la propre sécurité est mise en cause, avait rappelé M. Rutte à Paris le 12 novembre.

BRUXELLES : Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, a rencontré vendredi le président américain élu Donald Trump à Palm Beach, en Floride, a annoncé samedi la porte-parole de l'Alliance Atlantique.

« Ils ont discuté de l'ensemble des problèmes de sécurité mondiale auxquels l'Alliance est confrontée », a-t-elle indiqué dans un court communiqué, sans plus de détail.

L'ancien Premier ministre néerlandais avait indiqué vouloir rencontrer Donald Trump deux jours après son élection, le 5 novembre.

Il avait alors affirmé vouloir discuter avec lui de la « menace » que représente le renforcement des liens entre la Russie et la Corée du Nord.

« J'ai hâte de m'asseoir avec le président Trump et de voir comment nous allons collectivement nous assurer que nous faisons face à cette menace », avait-il déclaré le 7 novembre, en marge d'un sommet de dirigeants européens à Budapest.

Depuis, il n'a cessé de mettre en garde contre les dangers d'un rapprochement entre la Chine, la Corée du Nord et l'Iran, trois pays accusés d'aider la Russie dans son effort de guerre contre l'Ukraine.

Le soutien nord-coréen apporté à Moscou illustre la nécessité pour les États-Unis de soutenir leur allié, dont la propre sécurité est mise en cause, avait rappelé M. Rutte à Paris le 12 novembre.

La Russie soutient financièrement Pyongyang et lui apporte son expertise en matière de technologie de missiles. « C'est très inquiétant. Ces missiles représentent une menace directe pour le territoire américain », avait-il plaidé.

De même, en collaborant avec la Corée du Nord, l'Iran et la Chine, la Russie « ne menace pas seulement l'Europe, mais aussi la paix et la sécurité dans l'Indo-Pacifique et en Amérique du Nord », selon lui.

Les pays européens s'inquiètent également de la promesse du milliardaire américain de mettre fin à la guerre en Ukraine en 24 heures, avec un accord allant à l'encontre des intérêts de Kiev et les laissant à l'écart.


Le Parlement ukrainien déserté par crainte de frappes russes

Short Url
  • L'Otan et l'Ukraine doivent se retrouver mardi à Bruxelles pour évoquer la situation, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP
  • La tension ne retombait pas en Ukraine, où le Parlement, la Rada, a "annulé" sa séance en raison de "signaux sur un risque accru d'attaques contre le quartier gouvernemental dans les jours à venir", ont expliqué plusieurs députés à l'AFP

KIEV: Le Parlement ukrainien a annulé vendredi sa séance par crainte de frappes russes en plein coeur de Kiev, au lendemain du tir par la Russie d'un nouveau missile balistique et de menaces de Vladimir Poutine à l'adresse de l'Occident.

Après ce tir, le président russe s'était adressé à la nation jeudi soir en faisant porter la responsabilité de l'escalade du conflit sur les Occidentaux. Il a estimé que la guerre en Ukraine avait pris désormais un "caractère mondial" et menacé de frapper les pays alliés de Kiev.

Le Kremlin s'est dit confiant vendredi sur le fait que les Etats-Unis avaient "compris" le message de Vladimir Poutine.

L'Otan et l'Ukraine doivent se retrouver mardi à Bruxelles pour évoquer la situation, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP.

La tension ne retombait pas en Ukraine, où le Parlement, la Rada, a "annulé" sa séance en raison de "signaux sur un risque accru d'attaques contre le quartier gouvernemental dans les jours à venir", ont expliqué plusieurs députés à l'AFP.

En plein coeur de Kiev, ce quartier où se situent également la présidence, le siège du gouvernement et la Banque centrale, a jusqu'à présent été épargné par les bombardements. L'accès y est strictement contrôlé par l'armée.

Le porte-parole du président Volodymyr Zelensky a de son côté assuré que l'administration présidentielle "travaillait comme d'habitude en respectant les normes de sécurité habituelles".

"Compris" le message 

S'adressant aux Russes à la télévision jeudi soir, Vladimir Poutine a annoncé que ses forces avaient frappé l'Ukraine avec un nouveau type de missile balistique hypersonique à portée intermédiaire (jusqu'à 5.500 km), baptisé "Orechnik", qui était dans sa "configuration dénucléarisée".

Cette frappe, qui a visé une usine militaire à Dnipro, dans le centre de l'Ukraine, est une réponse, selon M. Poutine, à deux frappes menées cette semaine par Kiev sur le sol russe avec des missiles américains ATACMS et britanniques Storm Shadow, d'une portée d'environ 300 kilomètres.

M. Poutine a ainsi estimé que la guerre en Ukraine avait pris un "caractère mondial" et annoncé que Moscou se réservait le droit de frapper les pays occidentaux car ils autorisent Kiev à utiliser leurs armes contre le sol russe.

"Le message principal est que les décisions et les actions imprudentes des pays occidentaux qui produisent des missiles, les fournissent à l'Ukraine et participent ensuite à des frappes sur le territoire russe ne peuvent pas rester sans réaction de la part de la Russie", a insisté vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Il s'est dit persuadé que Washington avait "compris" ce message.

La veille, les Etats-Unis, qui avaient été informés 30 minutes à l'avance du tir russe, avaient accusé Moscou de "provoquer l'escalade". L'ONU a évoqué un "développement inquiétant" et le chancelier allemand Olaf Scholz a regretté une "terrible escalade".

La Chine, important partenaire de la Russie accusé de participer à son effort de guerre, a appelé à la "retenue". Le Kazakhstan, allié de Moscou, a renforcé ses mesures de sécurité en raison de cette "escalade en Ukraine".

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky a lui appelé la communauté internationale à "réagir", dénonçant un "voisin fou" qui utilise l'Ukraine comme un "terrain d'essai".

"Cobayes" de Poutine 

Au-delà du tir de jeudi, la Russie a modifié récemment sa doctrine nucléaire, élargissant la possibilité de recours à l'arme atomique. Un acte "irresponsable", selon les Occidentaux.

Interrogés jeudi par l'AFP sur le tir de missile russe, des habitants de Kiev étaient inquiets.

"Cela fait peur. J'espère que nos militaires seront en mesure de repousser ces attaques", a déclaré Ilia Djejela, étudiant de 20 ans, tandis qu'Oksana, qui travaille dans le marketing, a appelé les Européens à "agir" et "ne pas rester silencieux".

M. Poutine "teste (ses armes) sur nous. Nous sommes ses cobayes", a affirmé Pavlo Andriouchtchenko cuisinier de 38 ans.

Sur le terrain en Ukraine, les frappes de la Russie, qui a envahi le pays il y a bientôt trois ans, se poursuivent.

A Soumy, dans le nord-est du pays, une attaque de drones a fait deux morts et 12 blessés, a indiqué le Parquet ukrainien.

Le ministre russe de la Défense, Andreï Belooussov, s'est lui rendu sur un poste de commandement de l'armée dans la région de Koursk, où les forces ukrainiennes occupent, depuis début août, des centaines de kilomètres carrés.

Il s'est félicité d'avoir "pratiquement fait échouer" la campagne militaire ukrainienne pour l'année 2025 en "détruisant les meilleures unités" de Kiev et notant que les avancées russes sur le terrain se sont "accélérées".

Cette poussée intervient alors que Kiev craint que Donald Trump, de retour à la Maison Blanche à partir de janvier prochain, ne réduise ou stoppe l'aide militaire américaine, vital pour l'armée ukrainienne.