DUBAÏ: La poésie arabe peut sembler intimidante. Il est ancré dans notre conscience collective que la poésie arabe, traditionnellement écrite et récitée en arabe classique, ne peut être qu’écrite sur papier ou interprétée dans un salon littéraire d’une époque lointaine et oubliée.
Mais les temps ont changé. Maqsouda, un podcast en langue arabe sur la poésie arabe, créé et animé par Zeina Hachem Beck et Farah Chamma, le prouve. Le principe de ce podcast est simple: deux amies s’engagent dans un dialogue sur la poésie arabe. Hachem Beck et Chamma étant toutes deux des poétesses reconnues, cela ajoute une autre dimension à la conversation.
Zeina Hachem Beck est une poétesse primée, dont le troisième recueil de poésie, intitulé «O», sera publié par Penguin Books en 2022. Quant à Farah Chamma, poète et interprète, elle a été largement reconnue pour son travail de création orale.
Tout comme l’acte d’écrire, la création Maqsouda a été réalisée de manière organique.
«Pendant longtemps, j’ai voulu faire un podcast sur la poésie arabe, mais je ne voulais pas le faire seule», raconte Hachem Beck à Arab News. «Puis, pendant la pandémie, Farah m’a envoyé des vidéos d’elle récitant de la poésie arabe, en pyjama. Je me suis dit: “Pourquoi ne pas faire ce projet avec Farah?ʺ. Elle m’a tout de suite dit d’accord.»
Produit par la plate-forme de podcast arabe Sowt, Maqsouda alterne deux types d’épisodes. L’un où Hachem Beck et Chamma discutent de manière informelle d’un poème, et l’autre où l’animatrice ou la poétesse, si elle est disponible, récite des poèmes.
Analyser la poésie arabe intime sur le ton de la conversation est peu commun, mais c’est un choix intentionnel. «Ce qui nous a réunis, Zeina et moi, sur Maqsouda, c’est ce “mur” dans la poésie arabe», raconte Chamma. «Il se dresse dans notre écriture personnelle et dans nos peurs de faire des erreurs en arabe. Nous ne voulions pas de cela. Parler de la poésie arabe dans ce style est donc voulu.»
Le «mur» est un concept familier pour de nombreux arabophones. Qu’ils aient reçu une éducation formelle en arabe ou non, la pratique de l’écriture et de l’utilisation de l’arabe dans sa forme classique est une suite de règles linguistiques et grammaticales décourageantes.
«On pense à tort que la poésie arabe doit être rédigée dans un langage soutenu, et non dans notre langue de tous les jours», ajoute Hachem Beck. «C’est à cause de la diglossie que nous avons à cause de l’arabe classique et de l’arabe familier. C’est un espace contradictoire».
Toutefois, dans cette contradiction, les deux poétesses voient également un espace unique pour le développement de la poésie arabe. «La diglossie en arabe enrichit davantage la langue», affirme Chamma. «Le fait qu’il existe une langue parlée très différente de la langue académique ajoute de nouveaux sentiments dans l’écriture, change ma relation avec les mots.»
Changer les perceptions sur la manière d’aborder l’arabe va également de pair avec la mise en lumière des poètes de toute la région. «Nous aimerions mettre en avant autant de femmes que d’hommes», souligne Hachem Beck. «Nous voulons apprendre et nous diversifier. Farah est palestinienne, je suis libanaise. Nous connaissons mieux la poésie du Liban, de Palestine, de Syrie, d’Irak et d’Égypte. Celle de Tunis, du Maroc ou du Soudan nous est largement inconnue. Nous faisons donc l’effort de diversifier les auteurs que nous présentons.»
Bien que Maqsouda vise à divertir et à instruire, l’objectif est également de créer une anthologie en ligne indispensable des poètes et de la poésie arabes. «J’ai toujours souhaité trouver une source qui présente un éventail de la poésie arabe», explique Chamma. «J’espère pouvoir combler cette lacune et créer un endroit où nous pouvons mettre en lumière la poésie arabe.»
Maqsouda est disponible sur toutes les plates-formes de podcast.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com