BEYROUTH : De nombreux établissements étatiques vitaux au Liban ont mis en garde contre une suspension complète des opérations dans les 48 heures alors qu'une crise nationale de diesel a atteint un niveau catastrophique.
Ce vendredi, il y avait de longues files d'attente dans les stations-service, les boulangeries et les pharmacies à travers le pays au moment où les gens dormaient sur les toits de leurs bâtiments en raison des coupures de courant et de l'absence de diesel pour faire fonctionner les générateurs privés.
L'aéroport international de Beyrouth-Rafic Hariri, qui a bénéficié d'une injection de dernière seconde de diesel pour aider à maintenir les lumières allumées, a de justesse évité une fermeture.
«Les compagnies d'importation de pétrole n'ont pas pu livrer l'essence et le diesel aux stations parce qu'elles ne savaient pas comment fixer les prix de ces deux produits», a déclaré Georges Fayyad, qui dirige l'Association des compagnies d'importation de pétrole au Liban.
«La banque centrale leur a dit qu'elle adopterait le taux de change du marché noir (20 000 LL pour 1$) tandis que le ministère de l'Énergie adopte toujours le taux de 3 900 LL pour 1 $».
La récente pénurie de carburant est l'un des points les plus bas d'une crise financière de deux ans qui a vu la livre libanaise perdre 90 % de sa valeur et poussé plus de la moitié de la population dans la pauvreté.
«Le bras de fer entre l'autorité au pouvoir et la banque centrale met le peuple, les propriétaires des stations-service et l'ensemble du secteur du carburant dans une impasse», a signalé George Brax, membre du Syndicat des propriétaires de stations-service.
«Les citoyens en subissent les conséquences».
La société publique de télécommunications Ogero a annoncé qu'«en raison du manque de carburant», les services ont été suspendus dans la région d’Akkar, au nord du Liban.
Le ministre par intérim des Communications, Talal Hawat, a démenti les rumeurs selon lesquelles le ministère envisage de couper définitivement le service Internet dans le pays entre 00h00 et 7h00 le mois prochain.
Des groupes de jeunes dans le sud et le nord ont intercepté des réservoirs de diesel et confisqué la cargaison tandis qu'une bagarre au sujet du carburant dans une station-service de Damour a dégénéré en une fusillade.
Nasser Srour, secrétaire du syndicat des propriétaires de boulangeries de Beyrouth et du Mont Liban, a affirmé avoir informé le ministre de l'Économie que «des dizaines de boulangeries ont fermé leurs portes» à cause de la crise du carburant.
Farid Zeinoun, chef du Syndicat des travailleurs et distributeurs du secteur du gaz, a annoncé que les réserves de gaz «ne sont suffisantes que pour cinq jours», et a appelé la banque centrale «à autoriser le gazier ancré en mer depuis 20 jours d’entrer».
La crise a également déclenché un exode de citoyens pendant que de longues files d'attente sont apparues dans les centres de sécurité générale libanais à travers le pays car 4 000 à 5 000 demandes de passeport sont soumises chaque jour.
«Nous recevons des milliers de jeunes Libanais qui demandent des passeports pour faire une demande d'immigration », selon une source sécuritaire.
La Direction de la sûreté générale l'a décrit comme une ruée «sans précédent» pour les passeports.
L’appel à accélérer la formation d'un nouveau gouvernement était au centre de la rencontre de vendredi entre le président Michel Aoun et le patriarche maronite Bechara Boutros Al-Rahi.
Le religieux a exigé un gouvernement «composé de personnes compétentes qui s'élèvent au-dessus de tous les partis; ce gouvernement doit être prêt à faire face aux difficultés et à mettre en œuvre des réformes structurelles dans divers secteurs».
Ce jeudi, le gouverneur de la Banque centrale Riad Salameh a affirmé qu'il ne puiserait pas dans la réserve obligatoire pour subventionner le carburant à moins que le Parlement ne légifère sur cette question. En conséquence, les sociétés importatrices de pétrole ont décidé de ne pas distribuer de carburant aux stations jusqu'à ce qu'un accord sur les prix soit trouvé.
«Les cartes de rationnement seront distribuées à 500 000 familles, et environ $17 seront alloués à chaque membre de la famille», a déclaré une source proche du ministre par intérim des Finances, Ghazi Wazni, à Arab News.
Le Liban bénéficiera de $300 millions de la Banque mondiale, selon la source, et il devrait également bénéficier en septembre de $860 millions provenant du Fonds monétaire international pour financer les cartes de rationnement. Il existe un autre programme de la Banque mondiale qui peut venir en aide à 150 000 familles pauvres.
«Mais tout dépend de la formation d'un gouvernement», a soutenu la même source. «Nous attendons des solutions d'ici septembre, mais pas avant».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com