OTTAWA, Canada : Au pouvoir depuis 2015, le Premier ministre canadien Justin Trudeau s'apprête à donner le coup d'envoi d'une élection anticipée pour un scrutin le 20 septembre, malgré la menace d'une quatrième vague de coronavirus.
Celui qui briguera un troisième mandat devrait se rendre dimanche dans le bureau de la gouverneure générale Mary Simon pour lui demander de dissoudre les Communes, la chambre basse du Parlement, ont rapporté des médias locaux dont CBC et CTV.
Cette procédure formelle marquerait le début officiel d'une campagne électorale annoncée depuis déjà plusieurs semaines. Selon les médias locaux, elle devrait durer 36 jours et les Canadiens auraient donc rendez-vous aux urnes le 20 septembre. Deux ans plus tôt que prévu.
Reconduit au pouvoir en octobre 2019 pour son deuxième mandat, Justin Trudeau, qui dirige le parti libéral, est depuis à la tête d'un gouvernement minoritaire, l'obligeant à composer pour faire voter les réformes.
Au Canada, les gouvernements minoritaires ont une espérance de vie estimée par les experts entre 18 et 24 mois, en moyenne.
Et pour l'instant les sondages sont plutôt favorables aux libéraux qui récoltent 37% des intentions de vote contre 28% pour les conservateurs et 20% pour le Nouveau parti démocratique (NPD), selon un sondage Abacus Data paru jeudi.
"La question du scrutin sera de savoir si les libéraux conservent leur posture minoritaire ou si on leur redonne les rênes du pouvoir à Ottawa sans condition avec un gouvernement majoritaire", analyse auprès de l'AFP Stéphanie Chouinard, professeure de science politique au Collège militaire royal du Canada.
Pour être à la tête d'un gouvernement majoritaire, le parti de Justin Trudeau, qui compte 155 députés élus, devra obtenir au moins 170 des 338 sièges que compte la Chambre des communes.
- Objectif majorité -
Tous les partis d'opposition ont dénoncé cette décision d'anticiper le scrutin en pleine pandémie.
Sur Twitter, le chef des conservateurs Erin O'Toole a dénoncé les manoeuvres de Justin Trudeau qui "planifie une élection au milieu d'une pandémie parce qu'il est concentré sur la politique".
"Il est temps que nous ayons un Premier ministre qui planifie une reprise économique centrée sur les Canadiens", a-t-il ajouté.
Autre rival de M. Trudeau, Jagmeet Singh, le chef du NPD (gauche), a déploré la tenue d'un scrutin cet été.
"Pendant que Justin Trudeau veut agir comme si (la pandémie) était terminée, ce n'est pas terminé et les gens sont toujours inquiets", a-t-il déclaré jeudi.
Comme d'autres pays, le Canada voit depuis quelques temps les cas de Covid remonter dans plusieurs provinces en raison du variant Delta, plus contagieux. Mais le pays peut aussi se targuer de l'une des meilleures couvertures vaccinales au monde - 71% des 38 millions de Canadiens ont reçu une première dose et 62% sont complètement vaccinés.
L'élection en pleine crise sanitaire "pourrait jouer des tours aux libéraux si jamais la fameuse quatrième vague de Covid se matérialisait", a expliqué à l'AFP Daniel Béland, professeur de science politique à l'université McGill.
"Je pense qu'il y a un risque associé à ça, mais c'est un risque calculé", a-t-il rappelé, soulignant que des provinces ont tenu des élections pendant la pandémie et que les Premiers ministres ont été maintenus au pouvoir.
L'administratrice en chef de la santé publique canadienne a rappelé jeudi que les mesures sanitaires seraient primordiales en campagne électorale.
"J'encourage tous ceux et celles qui voudront participer à des rassemblements à se protéger au maximum, ce qui comprend la vaccination", a affirmé Theresa Tam, lors d'une conférence de presse.
Les libéraux comptent 155 sièges contre 119 pour les conservateurs. De leur côté, le Bloc québécois et le NPD en ont respectivement 32 et 24. A cela s'ajoutent deux députés verts, cinq indépendants et un siège vacant.
Selon un sondage, 38% des Canadiens sont favorables à une élection alors que 17% y sont opposés.