WASHINGTON : Les Américains finiront-ils par connaître les secrets d'argent de leur ancien président? Le ministère américain de la Justice a fait un pas dans cette direction vendredi, en ordonnant aux services fiscaux de transmettre au Congrès les déclarations d'impôts de Donald Trump.
Une commission de la Chambre des représentants qui s'occupe de questions budgétaires "a présenté des raisons suffisantes pour demander les données fiscales de l'ancien président", écrit le ministère dans un mémorandum.
En conséquence, "le Trésor doit lui fournir ces informations", ajoute-t-il dans ce document de 39 pages qui s'inscrit dans une bataille judiciaire au long cours.
Contrairement à tous ses prédécesseurs depuis les années 1970, Donald Trump, qui a fait de sa fortune un argument de campagne, refuse de publier ses déclarations fiscales. Son manque de transparence alimente les spéculations sur l'étendue de sa richesse ou sur de potentiels conflits d'intérêt.
Pour tenter d'en savoir plus, trois commissions de la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates, avaient demandé en 2019 au cabinet comptable Mazars, mais aussi aux banques Deutsche Bank et Capital One, toute une série de documents financiers portant sur les affaires de Donald Trump entre 2010 et 2018, et sur celles de ses proches.
La commission des "Voies et Moyens", sur laquelle porte le mémorandum du ministère, réclame plus spécifiquement six ans de déclarations d'impôts précédant son entrée à la maison Blanche, dans le cadre de son pouvoir d'audit des services fiscaux.
En parallèle, le procureur de Manhattan, Cyrus Vance, lui aussi un élu démocrate, avait réclamé les archives financières de Donald Trump dans le cadre d'une enquête sur de possibles violations des lois new-yorkaises.
Arguant de son immunité présidentielle et de la séparation des pouvoirs, Donald Trump s'était battu sur tous ces fronts, allant à deux reprises jusqu'à la Cour suprême.
«Bidon»
Il avait perdu une première bataille en février, quand elle a autorisé la transmission de certains documents à la justice new-yorkaise. L'enquête se déroulant à huis clos, ces informations restent protégées par le secret.
Cette fois, si ses déclarations d'impôts sont transmises au Congrès, il faudra encore que la commission vote en son sein pour décider de les rendre publique.
Mais Donald Trump pourrait à nouveau présenter des recours pour s'opposer à l'ordre du ministère de la Justice. Il n'avait pas immédiatement fait connaître ses intentions vendredi.
Sans attendre, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a salué "une victoire pour l'Etat de droit".
"Les Américains méritent de connaître les faits sur ses conflits d'intérêts troublants qui, sous sa présidence, ont miné notre sécurité et notre démocratie", a-t-elle estimé dans un communiqué.
En fait, le voile a déjà été partiellement levé par le New York Times qui, juste avant l'élection de novembre, avait publié une enquête basée sur 20 années de données fiscales concernant l'ex-magnat de l'immobilier et son groupe. Il n'a payé que 750 dollars d'impôt fédéral en 2016 et rien au cours de dix des quinze années précédentes, en déclarant plus de pertes que de gains, avait affirmé le quotidien.
Donald Trump avait dénoncé des "informations bidon" et assuré avoir "payé beaucoup d'impôts" sans donner plus de précisions.