Washington met en garde les talibans, Pékin les reçoit

A la différence de la précédente invitation, la visite des talibans en Chine a été cette fois largement rendue publique, notamment par des images du chef de la diplomatie chinoise, visiblement crispé, en compagnie de ses hôtes au passé terroriste. (Photo, AFP)
A la différence de la précédente invitation, la visite des talibans en Chine a été cette fois largement rendue publique, notamment par des images du chef de la diplomatie chinoise, visiblement crispé, en compagnie de ses hôtes au passé terroriste. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 29 juillet 2021

Washington met en garde les talibans, Pékin les reçoit

  • «Un Afghanistan qui commettrait des atrocités contre son propre peuple deviendrait un Etat paria», a averti le chef de la diplomatie US
  • «Les talibans sont une force politique et militaire cruciale, ils doivent jouer un rôle important dans la paix», a déclaré le ministre chinois des AE

NEW DELHI : L'Afghanistan risque de devenir un "Etat paria" si les talibans reprennent le pouvoir par la force, ont mis en garde mercredi les Etats-Unis, tandis que leur grand rival chinois accueillait les rebelles afghans contre une promesse de ne pas servir de base arrière pour des attentats.

Alors que les insurgés islamistes profitent du retrait des troupes de l'Otan pour effectuer une progression éclair à travers l'Afghanistan, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a évoqué la situation lors d'une visite en Inde.

"Un Afghanistan qui ne respecterait pas les droits de son peuple, un Afghanistan qui commettrait des atrocités contre son propre peuple deviendrait un Etat paria", a averti Antony Blinken lors d'une conférence de presse à New Delhi.

L'Inde, fidèle soutien du gouvernement afghan, redoute qu'un retour au pouvoir des talibans n'offre un refuge à des groupes opposés à ses intérêts.

"Les talibans disent vouloir la reconnaissance internationale (...) Prendre le pouvoir par la force et violer les droits de leur peuple n'est pas la bonne manière d'y parvenir", a-t-il mis en garde.

Un avertissement lancé alors qu'une délégation des talibans s'est entretenue mercredi à Tianjin avec le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi.

L'Afghanistan et la Chine ne partagent que 76 km de frontière, mais la deuxième puissance mondiale s'inquiète des liens éventuels des talibans avec des séparatistes ouïghours, une ethnie musulmane présente au Xinjiang.

La délégation talibane, forte de neuf membres, était menée par le numéro deux des talibans, le mollah Abdul Ghani Baradar, chef de son "bureau politique", a indiqué à l'AFP un porte-parole des insurgés.

Les talibans "ont assuré à la Chine que le sol afghan ne serait pas utilisé contre la sécurité de quelque pays que ce soit", a déclaré Mohammad Naeem, lui-même membre de la délégation, dans un message à l'AFP à Kaboul.

La diplomatie chinoise a confirmé la rencontre, précisant que M. Wang avait demandé à ses interlocuteurs de "tracer une ligne rouge entre eux et toutes les organisations terroristes comme le Mouvement islamiste du Turkestan oriental" (Mito).

Cette organisation séparatiste ouïghoure est considérée par l'ONU comme terroriste.

La Chine a mis en place depuis 2017 une politique sécuritaire à grande échelle au Xinjiang, après des attentats attribués par Pékin à des indépendantistes ouïghours.

M. Wang a profité de ses entretiens pour adresser une pique à Washington, estimant que "le départ précipité des troupes des Etats-Unis et de l’Otan illustre l’échec de la politique américaine en Afghanistan", selon des propos rapportés par son ministère.

"Les talibans sont une force politique et militaire cruciale en Afghanistan", a-t-il dit, exprimant l'espoir qu'ils "jouent un rôle important dans le processus de paix, de réconciliation et de reconstruction en Afghanistan".

Les talibans avaient déjà été reçus discrètement en septembre 2019 en Chine, pays qui cherche à sécuriser ses projets économiques - miniers ou des "Nouvelles routes de la soie" - avec l'Afghanistan.

A la différence de cette précédente invitation, la visite des talibans à Tianjin a été cette fois largement rendue publique, notamment par des images du chef de la diplomatie chinoise, visiblement crispé, en compagnie de ses hôtes au passé terroriste.

Sur place, les forces afghanes, qui n'ont offert jusqu'ici qu'une faible résistance, ne contrôlent plus pour l'essentiel, outre Kaboul, que les capitales provinciales et les principaux axes.

Le régime taliban (1996-2001), basé sur une interprétation ultrarigoriste des règles islamiques, a été renversé il y a presque 20 ans par une coalition internationale menée par les Etats-Unis, après son refus de livrer le chef d'Al-Qaïda, Oussama ben Laden, dans la foulée des attentats du 11-Septembre.

Des pourparlers de paix entre les talibans et les autorités afghanes, ouverts en septembre à Doha, n'ont connu jusqu'ici aucune avancée.

Les talibans ont été récemment reçus en Iran, autre voisin de l'Afghanistan, et en Russie, acteur-clé dans la région. Ils multiplient les gages envers la communauté internationale en vue d'un éventuel retour au pouvoir.

Mercredi, le président afghan, Ashraf Ghani, a affirmé que l'Afghanistan faisait face à "une invasion sans précédent (...) en termes d'échelle, d'étendue et de timing".

"Il ne s'agit plus des talibans du XXe siècle, mais de la manifestation des liens entre des réseaux terroristes transnationaux et des organisations criminelles transnationales" a souligné le chef de l'Etat, appelant "la communauté internationale à réexaminer le discours des talibans sur leur volonté de soutenir une solution politique" en Afghanistan.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.