L'effort collectif est crucial pour vaincre la corruption au Liban

Une manifestante brandit une pancarte lors d'une manifestation à Beyrouth, au Liban, le dimanche 20 octobre 2019. (Photo, AP)
Une manifestante brandit une pancarte lors d'une manifestation à Beyrouth, au Liban, le dimanche 20 octobre 2019. (Photo, AP)
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Publié le Mercredi 28 juillet 2021

L'effort collectif est crucial pour vaincre la corruption au Liban

  • «Cet État est fondé sur la corruption systémique et la non-responsabilité»
  • «Aujourd'hui, vous constaterez que les citoyens n’ont absolument pas peur»

LONDRES : La crise politique et économique au Liban peut être résolue, affirment les experts, mais elle nécessite un effort collectif, une mobilisation de la société civile et des coalitions.

Depuis la fin de la guerre civile en 1990, la corruption au sein de l'élite politique a sapé le redressement et le développement du Liban, selon Karim Merhej, chercheur et analyste de données à The Public Source. Cette situation est à l’origine de la crise socio-économique inégalée qui accable le pays.

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"Mon gouvernement est responsable de cette explosion": ce sont les mots inscrits par des citoyens libanais devant le site de l’explosion qui a ravagé le port de Beyrouth, au Liban, le dimanche 9 août 2020. (Photo, AP)

Le Liban est dans une période de transition où les fondements des systèmes politiques et économiques de l'après-guerre civile reposent sur l'exploitation des ressources qui devraient profiter à la population du pays, a expliqué Merhej.

Le chercheur s’exprimait lors d'une discussion sur son article de recherche récemment publié, «Breaking the curse of Corruption in Lebanon» (Briser le fléau de la corruption au Liban) , organisé par Chatham House, un groupe de réflexion à Londres.

«Cet État est fondé sur la corruption systémique et la non-responsabilité», affirme-t-il. «Ce système s'est effectivement effondré et nous sommes dans une période où nous ne savons pas encore ce qui va se passer. Même la classe politique au Liban ne sait pas ce qui se passe, elle a passé près de dix mois sans former de gouvernement».

Lundi, l'homme d'affaires milliardaire Najib Mikati a été désigné comme Premier ministre, chargé de mettre fin à une année d'impasse politique qui a entièrement paralysé le pays. C'est la troisième fois qu'il est choisi, après avoir déjà servi en 2005 et 2011.

Il remplace Saad Hariri, qui a démissionné le 15 juillet après neuf mois de négociations infructueuses avec le président Michel Aoun sur la composition du nouveau gouvernement. Après sa démission, la monnaie libanaise, qui a déjà perdu l'essentiel de sa valeur, a atteint des niveaux record.

Le mois dernier, la Banque mondiale a déclaré que le Liban est subit l'une des trois pires crises économiques depuis le milieu du XIXe siècle. Plus de la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté national et les enfants, dont 30 % «se sont couchés le ventre vide ou ont sauté des repas» en juin, en «encaissent les frais».

L'article de Merhej examine les lois anti-corruption au Liban, analyse pourquoi elles ne fonctionnent pas et propose des recommandations d'action pour le gouvernement, la communauté internationale et la société civile.

«Les initiatives anti-corruption du Liban, qui ont abouti à l'adoption récente de la Stratégie nationale anti-corruption, sont vouées à l’échec», écrit-il.

«L'élite politique libanaise a dévoilé ces initiatives à la communauté internationale, ainsi qu'à l'électorat libanais, à la suite de la révolte de fin 2019 et début 2020 afin de réhabiliter son image ternie et, dans certains cas, pour acquérir des financements internationaux indispensables».

Merhej estime que si la stratégie et les nouvelles lois semblent louables en théorie, elles sont susceptibles d'être mal exécutée en raison du «manque de volonté politique parmi les élites dirigeantes du Liban de s'engager dans la transparence». Il cite aussi «l'absence d'un système judiciaire indépendant, l'utilisation des ressources de l'État au profit des intérêts privés des élites, l'utilisation de la bureaucratie pour rendre les lois inapplicables et le fait que les élites dirigeantes soient les protecteurs de la vaste stratégie anti-corruption du pays».

La lutte contre la corruption exige de gros efforts et les résultats ne viendront certes pas du jour au lendemain, prévient-il. Le gouvernement doit donner la priorité à la formation de la Commission nationale anti-corruption, et s'assurer que le pouvoir judiciaire soit indépendant, et non soumis à la classe politique.

«Nous avons vu beaucoup d'organisations collectives au cours des deux ou trois dernières années, en particulier après la révolte d'octobre 2019, et nous avons vu l'émergence de syndicats alternatifs, d'organisations et d'initiatives de base dans le but de protéger la liberté d'expression», a-t-il mentionné.

Beaucoup de fonds affluent au Liban, et on en attend davantage, ajoute Merhej qui appelle la communauté internationale à mettre en œuvre des stratégies de transparence, pour garantir que l'aide aille directement aux personnes qui en ont besoin, et non dans les poches de fonctionnaires corrompus.

Diana Kaissy, directrice de l'engagement de la société civile à l'Institut républicain international du Liban, convient qu'une plus grande transparence est nécessaire, en particulier lors des réunions des commissions parlementaires, qui se tiennent à huis clos et dont les procès-verbaux ne sont pas rendus publics.

«Nous devons avoir une place à la table, faire partie de ces consultations, rédiger ces lois, afin de nous assurer qu’elles peuvent être adoptées, qu’elles ne sont pas inefficaces, et qu’elles ne contiennent pas de failles», a-t-elle soutenu.

Tous les responsables gouvernementaux ne sont pas corrompus, a ajouté Kaissy, et une approche multipartite qui tire parti des acteurs clés, doit être adoptée.

Petit à petit, dit-elle, il sera finalement possible d'apporter les changements que les gens souhaitent. «Je ne vois actuellement aucun autre moyen, et c'est peut-être ce qui nous permet de garder espoir et de travailler tout le temps», a-t-elle ajouté.

Badri Meouchi, consultant en gouvernance d'entreprise chez Tamayyaz, affirme que les pays ou les institutions qui souhaitent soutenir les efforts de lutte contre la corruption au Liban devraient travailler en étroite collaboration avec les médias, les groupes de la société civile, les organisations du secteur privé et d'autres dans l'arène publique. Les élections sont également importantes, selon lui, mais il y a toujours des défis majeurs à surmonter.

«Nous devons mieux nous organiser, surtout financièrement, car ils sont très bien organisés (et) disposent de ressources financières incroyables. Nous devons ainsi devenir plus créatifs qu'eux, car ils sont aussi très créatifs», explique-t-il.

Le Liban doit organiser des élections municipales, parlementaires et présidentielles l'année prochaine.

Il y a cependant de l'espoir sur le terrain, a ajouté Meouchi.

«Ce qui a changé au cours des deux dernières années, ce qui est encourageant, c'est que la perception de la peur a entièrement changé», dit-il. «Il y a quelques années, si un politicien entrait dans un lieu public, tout le monde voulait lui serrer la main et être vu avec lui».

«Aujourd'hui, vous constaterez que les citoyens n’ont absolument pas peur, et c'est un nouveau facteur dans la lutte contre la corruption, car la société civile à elle seule ne peut pas faire grand-chose».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Finul: quatre soldats italiens blessés, Rome accuse le Hezbollah

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  • Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban
  • Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus

ROME: Quatre soldats italiens ont été légèrement blessés lors d'une nouvelle "attaque" contre la mission de maintien de la paix de l'ONU au Liban, la Finul, a indiqué vendredi le gouvernement italien, qui en a attribué la responsabilité au Hezbollah.

"J'ai appris avec profonde indignation et inquiétude que de nouvelles attaques avaient visé le QG italien de la Finul dans le sud du Liban (et) blessé des soldats italiens", a indiqué dans un communiqué la Première ministre Giorgia Meloni.

"De telles attaques sont inacceptables et je renouvelle mon appel pour que les parties en présence garantissent à tout moment la sécurité des soldats de la Finul et collaborent pour identifier rapidement les responsables", a-t-elle affirmé.

Mme Meloni n'a pas désigné le responsable de cette attaque, mais son ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani a pointé du doigt le Hezbollah: "Ce devraient être deux missiles (...) lancés par le Hezbollah, encore une fois", a-t-il déclaré là la presse à Turin (nord-ouest).

Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a indiqué à l'AFP que Rome attendrait une enquête de la Finul.

Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban, qui abrite le contingent italien et le commandement du secteur ouest de la Finul".

"J'essayerai de parler avec le nouveau ministre israélien de la Défense (Israël Katz, ndlr), ce qui a été impossible depuis sa prise de fonction, pour lui demander d'éviter d'utiliser les bases de la Finul comme bouclier", a affirmé le ministre de la Défense Guido Crosetto, cité par le communiqué.

Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus, dont une vingtaine dus à des tirs ou des actions israéliennes.

Plus de 10.000 Casques bleus sont stationnés dans le sud du Liban, où la Finul est déployée depuis 1978 pour faire tampon avec Israël. Ils sont chargés notamment de surveiller la Ligne bleue, démarcation fixée par l'ONU entre les deux pays.

L'Italie en est le principal contributeur européen (1.068 soldats, selon l'ONU), devant l'Espagne (676), la France (673) et l'Irlande (370).


Syrie: le bilan des frappes israéliennes sur Palmyre s'élève à 92 morts

Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
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  • Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie
  • Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah

BEYROUTH: Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan.

Mercredi, trois frappes israéliennes ont ciblé la ville moderne attenante aux ruines gréco-romaines de la cité millénaire de Palmyre. Une d'entre elles a touché une réunion de membres de groupes pro-iraniens avec des responsables des mouvements irakien d'Al-Noujaba et libanais Hezbollah, selon l'Observatoire.

Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie.

Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah.

L'ONG avait fait état la veille de 82 morts.

Ces frappes israéliennes sont "probablement les plus meurtrières" ayant visé la Syrie à ce jour, a déclaré jeudi devant le Conseil de sécurité Najat Rochdi, adjointe de l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie.

Depuis le 23 septembre, Israël a intensifié ses frappes contre le Hezbollah au Liban mais également sur le territoire syrien, où le puissant mouvement libanais soutient le régime de Damas.

Depuis le début de la guerre civile en Syrie, Israël a mené des centaines de frappes contre le pays voisin, visant l'armée syrienne et des groupes soutenus par Téhéran, son ennemi juré. L'armée israélienne confirme rarement ces frappes.

Le conflit en Syrie a éclaté après la répression d'un soulèvement populaire qui a dégénéré en guerre civile. Il a fait plus d'un demi-million de morts, ravagé les infrastructures et déplacé des millions de personnes.

Située dans le désert syrien et classée au patrimoine mondial de l'Unesco, Palmyre abrite des temples gréco-romains millénaires.

 


Israël annonce mettre fin à un régime de garde à vue illimitée pour les colons de Cisjordanie

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  • Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne
  • Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a annoncé vendredi que le régime dit de la détention administrative, équivalent d'une garde à vue quasi illimitée, ne serait désormais plus applicable aux colons israéliens en Cisjordanie.

Alors que "les colonies juives [en Cisjordanie] sont soumises à de graves menaces terroristes palestiniennes [...] et que des sanctions internationales injustifiées sont prises contre des colons [ou des entreprises oeuvrant à la colonisation], il n'est pas approprié que l'Etat d'Israël applique une mesure aussi sévère [la détention administrative, NDLR] contre des colons", déclare M. Katz dans un communiqué.

Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967 et les violences ont explosé dans ce territoire palestinien depuis le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas à Gaza, le 7 octobre 2023.

Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne. Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens.

Face à la montée des actes de violences commis par des colons armés, plusieurs pays occidentaux (Etats-Unis, Union européenne, Royaume-Uni et Canada notamment) ont au cours des douze derniers mois pris des sanctions (gel des avoirs, interdiction de voyager) contre plusieurs colons qualifiés d'"extrémistes".

Il y a quelques jours, les Etats-Unis ont sanctionné pour la première fois une entreprise israélienne de BTP active dans la construction de colonies en Cisjordanie.

La détention administrative est une procédure héritée de l'arsenal juridique de la période du Mandat britannique sur la Palestine (1920-1948), avant la création d'Israël. Elle permet aux autorités de maintenir un suspect en détention sans avoir à l'inculper, pendant des périodes pouvant aller jusqu'à plusieurs mois, et pouvant être renouvelées pratiquement à l'infini.

Selon le Club des prisonniers palestiniens, ONG de défense des Palestiniens détenus par Israël, plus de 3.430 Palestiniens se trouvaient en détention administrative fin août. Par comparaison, seuls huit colons juifs sont détenus sous ce régime à ce jour, selon le quotidien israélien de gauche Haaretz vendredi.

L'annonce de la fin de la détention administrative pour les colons survient au lendemain de l'émission par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêts internationaux contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant recherchés par la justice internationale pour des "crimes de guerres" et "crimes contre l'humanité".

M. Netanyahu a rejeté catégoriquement la décision de la Cour comme une "faillite morale" et une mesure animée par "la haine antisémite à l'égard d'Israël".