LONDRES : L'Iran a ouvert son premier terminal d'exportation de pétrole qui n'oblige pas les pétroliers à traverser le détroit d'Ormuz, au moment où Téhéran tente d’augmenter ses exportations de brut et violer les sanctions américaines.
Le ministre iranien du Pétrole Bijan Namdar Zanganeh avait déclaré, lors du lancement du projet, que le terminal aiderait certainement les exportations, ajoutant qu'il s'agit «d'une affirmation de la rupture des sanctions».
L'Iran a également construit un oléoduc de 1 000 km pour transporter son pétrole de Goreh, dans la province du sud-ouest de Bushehr, jusqu'au nouveau terminal dans le sud-est du pays.
L'agence de presse officielle IRNA a déclaré mercredi que le nouvel oléoduc et le terminal aideraient Téhéran à «récupérer le marché pétrolier iranien des pays rivaux».
L'autre terminal pétrolier majeur de l'Iran est situé dans le port du Golfe de Kharg. Accessible par le détroit d'Ormuz, qui compte moins de 40 km de large à son point le plus étroit, il a été le théâtre d’affrontements entre les navires de guerre américains et iraniens dans le passé.
L'Iran est toujours sous le coup de sanctions américaines depuis que l'ancien président Donald Trump s'est retiré unilatéralement de l'accord historique sur le nucléaire iranien de 2015 en mai 2018, ce qui a eu un impact considérable sur les exportations d'énergie iraniennes.
«Nous avions un seul terminal pétrolier, et si un problème survenait, nos exportations de pétrole auraient été interrompues», affirme le président iranien Hassan Rouhani. «C’est un grand jour, un jour historique pour la nation iranienne».
«L'industrie pétrolière est très importante pour nous, et elle est tout aussi importante pour l'ennemi», déclare Rouhani lors d’une allocution télévisée.
Rouhani chiffre la valeur du nouveau projet à $2 milliards. Selon les médias iraniens, le chantier a duré environ deux ans.
Les États-Unis ont accusé l'Iran d'essayer de contourner les sanctions en exportant du pétrole vers des pays comme la Chine, le Venezuela et la Syrie.
Washington a annoncé à plusieurs reprises la saisie de pétroliers transportant du pétrole soi-disant iranien.
Selon des responsables iraniens, la République islamique vise finalement à pomper «un million de barils par jour» à travers le pipeline.
À en croire Téhéran, le projet lui permettrait pour le moment d'exporter 350 000 barils par jour (bpj).
L'Iran a produit 2,47 millions de barils par jour en juin, selon les derniers chiffres disponibles de l'OPEP.
«Le nouveau terminal est un impératif stratégique pour l'Iran, compte tenu de l'intensification des tensions dans le golfe avec l'Arabie saoudite et Israël», explique Herman Wang, analyste pétrolier chez S&P Global Platts. «Le contournement du détroit d'Ormuz fournira à l'Iran un débouché à l'exportation au cas où le passage sera fermé pour quelque raison que ce soit».
«Jusqu'à ce que les sanctions soient levées, le pipeline et le terminal resteront probablement bien en deça de leur capacité», ajoute Wang.
Face aux sanctions de Washington, Téhéran reste discrète sur ses livraisons de brut à la poignée de clients qui osent encore l'acheter.
Une entreprise de logistique chinoise est devenue un acteur principal dans l'approvisionnement en pétrole sanctionné de l'Iran et du Venezuela. Et ce, même après avoir été mise sur liste noire par Washington il y a deux ans pour avoir traité du brut iranien, confient à Reuters sept sources au courant de l’entente.
Le rôle plus important de China Concord Petroleum Co., également connu sous le nom de la CCPC, et son expansion dans le commerce avec le Venezuela mettent en évidence les limites du système de restrictions de Washington, indiquent des analystes.
Au cours de l'année passée, la CCPC a acquis au moins quatorze pétroliers pour transporter le brut d'Iran ou du Venezuela vers la Chine, ont indiqué deux des sources.
En 2019, Washington a ajouté la CCPC à une liste d'entités sous sanctions pour avoir enfreint les restrictions sur la manipulation et les transactions du pétrole iranien. L’entreprise n'a pas commenté publiquement les sanctions et Reuters n'a pas pu déterminer l'impact de la liste noire américaine sur la CCPC.
La CCPC approvisionne une demi-douzaine de petites raffineries chinoises en pétrole iranien, ont indiqué trois sources basées en Chine.
Des responsables iraniens proches du dossier confirment que la CCPC est un acteur principal du commerce pétrolier de Téhéran avec la Chine.
La Chine a reçu en moyenne 557 000 barils de brut iranien par jour entre novembre et mars, soit environ 5% des importations totales du plus grand importateur mondial, selon Refinitiv Oil Research, revenant aux niveaux observés pour la dernière fois avant que Trump ne réimpose les sanctions contre le régime iranien en 2018.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com