Attendu dans le nord de Chypre, Erdogan entend rester inflexible

Le président turc Recep Tayyip Erdoğan en conférence de presse au palais présidentiel à Ankara, le 21 septembre 2020. Photo d'archives Adem Altan / AFP
Le président turc Recep Tayyip Erdoğan en conférence de presse au palais présidentiel à Ankara, le 21 septembre 2020. Photo d'archives Adem Altan / AFP
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Publié le Dimanche 18 juillet 2021

Attendu dans le nord de Chypre, Erdogan entend rester inflexible

  • Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, se rend mardi à Varosha, ville-symbole de la division de Chypre, marquant sa volonté de rester inflexible sur une solution à deux Etats mais aussi son ambition de s'imposer en Méditerranée orientale
  • Le président turc, dont la venue coïncide avec le 47e anniversaire de l'invasion, «va certainement annoncer la réouverture de nouveaux pans de la ville», estime Giannis Ioannou, en allusion à la réouverture très partielle de Varosha en octobre

VAROSHA, Chypre : Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, se rend mardi à Varosha, ville-symbole de la division de Chypre, marquant sa volonté de rester inflexible sur une solution à deux Etats mais aussi son ambition de s'imposer en Méditerranée orientale.

Depuis 1974 et l'invasion de Chypre par l'armée turque en réaction à un coup d'Etat visant à rattacher le pays à la Grèce, cette ancienne cité balnéaire fuie par ses habitants chypriotes-grecs est devenue une ville-fantôme, zone militaire sous contrôle direct d'Ankara, inaccessible derrière les barbelés.

Elle est située dans la République turque de Chypre du Nord (RTCN) autoproclamée en 1983 -- établie dans le tiers nord de l'île et reconnue uniquement par la Turquie -- où M. Erdogan passera en revue mardi les soldats turcs qui y sont postés par dizaines de milliers.

Le président turc, dont la venue coïncide avec le 47e anniversaire de l'invasion, "va certainement annoncer la réouverture de nouveaux pans de la ville", estime Giannis Ioannou, fondateur du groupe de réflexion Geopolitical Cyprus, en allusion à la réouverture très partielle de Varosha en octobre.  "Son message est clair: (avec Varosha), il veut changer de paradigme pour les futures négociations". Or, pour le gouvernement chypriote-grec, rouvrir la ville "constitue une ligne rouge", explique l'analyste.

Les tensions sont déjà fortes, alimentées par un afflux de migrants sans papiers dans la partie sud de l'île, que le gouvernement chypriote-grec considère comme un moyen de pression de la part d'Ankara. Vendredi, un navire turc a tiré des coups de semonce en direction d'un bateau des gardes-côtes chypriotes-grecs menant une opération contre l'immigration clandestine depuis la Turquie au large de la côte nord de l'île -- un incident rare qui illustre selon le gouvernement chypriote-grec le "comportement agressif" d'Ankara envers Chypre. La Turquie, elle, a démenti tout tir.

Apre marchandage

En avril, l'ONU a réuni, en vain, Chypriotes-grecs et Chypriotes-turcs en vue d'entamer un nouveau cycle de pourparlers. "Erdogan en a tiré la conclusion que les Chypriotes-grecs ne veulent pas la paix mais préserver un statu quo qui leur est favorable" selon lui, explique M. Ioannou. "Alors il agite en représailles la carte Varosha", ajoute-t-il.

Lors de sa dernière visite à Varosha en novembre, M. Erdogan avait indiqué que "des compensations seraient payées" aux anciens habitants chypriotes-grecs pour la perte de leurs propriétés. Le président turc sait que cette proposition est inacceptable pour la majorité d'entre eux et ne l'avance que pour dénoncer ensuite leur "mauvaise volonté", estime Ahmet Sözen, un Chypriote-turc à la tête de Cyprus Policy Centre.

La visite du président turc marque l'amorce d'"une période d'âpre marchandage. Erdogan veut commencer le prochain cycle de négociation en position de force, en imposant la solution à deux Etats", dit-il. Si la République de Chypre, Etat souverain membre de l'Union européenne, s'étend théoriquement sur toute l'île, son gouvernement n'exerce son autorité que sur la partie sud de l'île, séparée de la partie nord par une "ligne verte", ligne de démarcation et zone tampon surveillée par des Casques bleus de l'ONU.

Peu avant la visite de M. Erdogan, l'UE a d'emblée prévenu la Turquie qu'elle "n'accepterait jamais, jamais, une solution à deux Etats".

Poker perdant

Au-delà du conflit chypriote, la venue de M. Erdogan à Varosha est scrutée pour ce qu'elle pourrait dire sur l'ambition turque de se positionner en acteur incontournable de la Méditerranée orientale, où la découverte ces dernières années de gisements gaziers a aiguisé l'appétit des pays voisins.

"La Turquie se débat contre le nouveau bloc formé autour de Chypre sur la problématique gazière", rappelle M. Sözen. "Elle se sent isolée et elle est prête à utiliser tous les moyens pour faire pression sur Chypre, comme Varosha", explique Kemal Baykalli, analyste chypriote-turc.

Avec l'accord EastMed (Grèce, Chypre, Israël) et d'autres accords bilatéraux, Nicosie fait désormais partie d'une alliance régionale, au grand dam d'Ankara. Les tensions sur la question de l'exploration des potentiels gisements gaziers ont atteint leur pic en août 2019 avec des manoeuvres militaires rivales entre la Grèce et la Turquie. "C'est une partie de poker. Les Chypriotes, notamment les anciens habitants de Varosha, en seront les grands perdants", résume M. Baykalli.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.