NATIONS UNIES, ETATS-UNIS : Des organisations non gouvernementales et plusieurs pays se sont élevés vendredi contre le « rétrécissement sans précédent de l'espace humanitaire » dans le monde et contre les violences croissantes visant les travailleurs humanitaires, lors d'une réunion ministérielle du Conseil de sécurité de l'ONU.
« Il est essentiel que les organisations humanitaires neutres et impartiales soient autorisées à procéder à des évaluations indépendantes des besoins et à l'acheminement de l'aide », a souligné le directeur du Comité international de la Croix-Rouge, Robert Mardini, lors de cette session organisée par la France.
« L'accès ne doit pas être illégalement refusé ou bloqué », a-t-il ajouté, en critiquant les « divisions » au sein du Conseil de sécurité, « notamment sur l'accès aux populations dans le besoin », qui « augmentent les souffrances ».
Représentant l'ONG Action contre la faim, Lucile Grosjean a rappelé que « 191 travailleurs humanitaires avaient été tués, blessés ou enlevés depuis le début de l'année ». « Le Conseil de sécurité doit passer à l'action et mettre fin à cette spirale meurtrière », a-t-elle aussi lancé.
Ces deux responsables ont demandé à l'ONU « d'adopter une exemption humanitaire systématique excluant l'action humanitaire impartiale du champ d'application des sanctions et des mesures contre-terroristes ».
« Partout dans le monde, les incidents de sécurité affectant les organisations humanitaires ont décuplé depuis 2001 », incluant « des fusillades, des agressions corporelles et sexuelles, des enlèvements et des raids », a déploré Amina Mohammed, vice-secrétaire générale de l'ONU. Elle a précisé qu'un poste de conseiller spécial allait être créé auprès du secrétaire général adjoint de l'ONU aux Affaires humanitaires sur la préservation de l'espace humanitaire.
A l'instar de plusieurs autres pays comme l'Inde, les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou le Vietnam, la France a dénoncé « un rétrécissement sans précédent de l'espace humanitaire ». « C’est d’autant plus préoccupant que nous n’avons jamais eu autant besoin de solidarité internationale face à la multiplication des crises et à la brutalisation du monde qui ne cesse de s’aggraver », a relevé le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian.
« La voie de la justice pénale internationale doit également être envisagée, dès lors que des crimes commis contre des travailleurs humanitaires relèvent de la compétence matérielle de la Cour pénale internationale », a aussi estimé Jean-Yves Le Drian.
Seule note discordante forte lors de la session, le représentant de la Russie Alexander Repkin s'est élevé contre « le concept d'"espace humanitaire" », qui revient, selon lui, « à donner une impunité aux travailleurs humanitaires ». « Le principe-clé c'est l'accord de l'Etat concerné à l'aide fournie » et la protection de « sa souveraineté nationale », a fait valoir le diplomate russe.