LONDRES : Une journaliste irano-américaine cible d'un complot d'enlèvement élaboré par le régime iranien affirme qu'elle refuse d'être réduite au silence, et qu'elle compte poursuivre son travail.
Téhéran avait prévu de kidnapper Masih Alinejad, une critique virulente du régime, à l'aide d'un hors-bord, mais le complot a été révélé et déjoué au début du mois.
Quatre Iraniens ont été inculpés de complot pour enlever la journaliste installée à Brooklyn. Un Irano-américain a été accusé d'avoir financé le complot.
Le régime iranien «est tellement proche de moi, même ici, à Brooklyn», a-t-elle déclaré à CBS News. «C’est dans la nature de la République islamique d'enlever des dissidents et de les exécuter».
Selon l’acte d'accusation, quatre agents secrets iraniens auraient engagé un enquêteur privé à New York pour suivre Alinejad, 44 ans, et sa famille. Ils envisageaient de l'enlever à l'aide d'un hors-bord et de l'emmener au Venezuela, un allié de Téhéran.
Lorsqu'on lui a demandé si elle compte continuer d’écrire, Alinejad a répondu : «Oh oui, je ne vais certainement pas abandonner». Elle estime que le complot prouve que ses propos perturbent le régime iranien.
«Le gouvernement iranien a peur de moi», martèle-t-elle. «Ceci me donne l'espoir que le gouvernement a peur de la voix du peuple, car je personnifie la voix du peuple».
Selon les procureurs, enlever Alinejad s’inscrit dans un plan plus large qui tente d’attirer, par la ruse, des individus vivants au Canada, au Royaume-Uni et aux Émirats arabes unis vers l’Iran.
Le complot du hors-bord a été élaboré après l'échec des tentatives d'attirer Alinejad vers un autre pays du Moyen-Orient.
La porte-parole du président américain Joe Biden, Jen Psaki, a déclaré: «Nous condamnons catégoriquement le complot dangereux et méprisable de l'Iran visant pour kidnapper une citoyenne américaine sur le sol américain».
Un porte-parole du régime iranien estime que les accusations sont «ridicules et sans fondement».
Téhéran n'a pas encore réussi à kidnapper des dissidents iraniens vivants aux États-Unis et en Europe, mais les tentatives régionales ont souvent abouti.
En 2019, Rouhollah Zam, un écrivain et dissident qui a fui l’Iran pour la France en 2011, est attiré par la ruse de son domicile vers l'Irak, où il est arrêté par la police irakienne et remis à des agents iraniens.
Il fait l'objet d'un simulacre de procès en Iran, et sera exécuté en décembre 2020.
Le dissident américano-iranien Jamchid Charmahd, alors porte-parole d'une organisation dissidente aux États-Unis, a été amené par la ruse à se rendre à Dubaï, pour être aussi kidnappé par des agents iraniens.
Charmahd reste à ce jour en prison en Iran, et à l’issue d’un procès qu'Amnesty International qualifie de «extrêmement inéquitable», il risque désormais d'être exécuté.
Son fils Chayan Charmahd a déclaré à l'Associated Press : «Nous recherchons le soutien de n'importe quel pays démocratique, n'importe quel pays libre. Vous ne pouvez pas simplement prendre quelqu'un dans un pays tiers et le traîner dans votre pays».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com