PARIS : L'alliance entre Canal+ et beIN Sports a pris du plomb dans l'aile: la chaîne qatarie a assigné jeudi Canal+ pour l'obliger à payer 332 millions d'euros pour les deux matches par journée de Ligue 1, ouvrant ainsi un nouveau front judiciaire dans le dossier des droits TV.
Est-ce le signe de la fin d'un mariage de raison qui durait depuis plus de 3 ans enre les deux diffuseurs? "Difficile à dire mais je crois qu'il faut bien comprendre que Canal et beIN Sport sont d'accord sur le fond, a priori pas sur la forme", estime une source proche des deux diffuseurs.
Le fonds est connu: depuis la mi-juin et l'attribution par la LFP de 80% des matches de L1 au géant américain Amazon Prime, Canal+ ne décolère pas. La chaîne cryptée se retrouve en effet à devoir débourser 332 millions d'euros pour deux matches par journée de L1 (ceux du samedi soir et du dimanche 17h00), alors qu'Amazon diffusera 8 matches par journée pour 259 millions d'euros.
«Tango dangereux»
"Une distorsion économique qui ne peut convenir à personne. La LFP le sait, les diffuseurs le savent", assure cette source.
Canal+ avait pourtant tout fait pour éviter de se retrouver dans cette situation en saisissant le tribunal de commerce et l'Autorité de la concurrence afin que le lot comprenant les deux matches (lot 3) soit remis en jeu lors de l'appel d'offres de la mi-juin suite à la défaillance de l'ancien diffuseur, Mediapro. Mais elle a été déboutée par deux fois.
Quelques heures après l'attribution des matches par la LFP à Amazon, Canal+ avait du coup annoncé avec fracas sa volonté de se retirer de la L1.
Sauf que Canal+ est liée avec beIN Sports, qui lui a sous-licencié en 2018 les deux matches qu'elle diffuse. Et c'est beIN Sports qui paie directement la LFP.
"Depuis la mi-juin, c'est un tango dangereux entre beIN et Canal, ou un jeu à trois avec la LFP très fluctuant", résume un expert du marché souhaitant rester anonyme.
Mardi, la chaîne du groupe Vivendi à envoyé un courrier à beIN Sports lui expliquant vouloir suspendre son contrat avec la chaîne qatarie. Mais Canal+ ne s'est pas contentée de ce courrier puisqu'elle n'a pas honoré la première traite du contrat avec beIN Sports de près de 500 000 euros.
"C'est marginal par rapport au contrat mais c'est une première défaillance", a précisé la source.
"C'est une situation compliquée pour Canal qui est en guerre contre la LFP, mais qui en refusant de payer met en porte-à-faux son partenaire", résume une source proche des instances sportives.
Une première entorse au contrat qui a en tout cas poussé la chaîne qatarie à réagir. beIN Sports a donc assigné jeudi en référé Canal+ devant le tribunal de commerce de Nanterre afin de l'obliger à respecter son contrat, selon une source proche des négociations.
«Catastrophe»
"C'est aussi une manière de faire comprendre à Canal+ que même si elle comprend son combat, beIN doit aussi défendre ses intérêts", analyse cette source.
Les tribunaux devraient donc donner une orientation de ce qui pourrait se passer à la reprise du championnat qui doit débuter le 6 août. La veille, Canal+ est censé verser près de 55 millios d'euros à beIN Sports. "Et si Canal ne paie pas, ce sera la catastrophe", prévoit cet expert du marché.
"Le but de Canal est de créer le maximum de chaos pour que cela bouge. Ils pourraient très bien ne pas payer et ne pas diffuser", avait assuré mardi une source proche du dossier.
Le risque d'un écran noir pour ces deux matches du lot 3 existe donc bel et bien. Tout comme celui d'un divorce féroce entre beIN Sports et Canal+ qui n'ont pas souhaité faire de commentaire.