PAPEETE: Près de 2 500 Polynésiens sont descendus vendredi dans les rues de la capitale, Papeete, à Tahiti, pour commémorer l'anniversaire du premier essai nucléaire, Aldébaran, exécuté le 2 juillet 1966 sur l'atoll de Moruroa.
Cette manifestation, qui se déroule chaque année sur ce territoire français du Pacifique où la France a effectué près de 200 essais nucléaires, a connu une affluence record alors que venait de se clore à Paris une table ronde sur les conséquences des essais nucléaires en Polynésie française.
« Alors ‘Manu’ tu assumes ? », demandait notamment une banderole, alors que le président Emmanuel Macron est attendu le 25 juillet en Polynésie. Selon le président de la Polynésie française, Edouard Fritch, le chef de l'Etat devrait notamment annoncer une ouverture des archives à cette occasion.
Les associations demandent toujours à la France qu'elle demande pardon pour les essais réalisés et ses conséquences sociales, sanitaires et environnementales.
Certaines espèrent même réactiver le mouvement en vue d'un dépôt de plainte pour crime contre l'humanité devant la Cour pénale internationale de La Haye, le 17 juillet à l'occasion de l'anniversaire du tir Centaure en 1974 qui, via des pluies, a contaminé l'île de Tahiti.
La ministre chargée de la Mémoire et des Anciens combattants, Geneviève Darrieusseq, a exclu jeudi tout pardon de la France, affirmant qu'il n'y avait « pas eu de mensonge d'Etat », sur les 193 essais nucléaires (dont 46 atmosphériques) réalisés en Polynésie française entre 1966 et 1996.
A Papeete, les manifestants répondaient à l'appel de l'association Moruroa e tatou qui œuvre localement pour la reconnaissance et l'indemnisation des personnels, civils et militaires, victimes de maladies radio-induites après les essais atmosphériques.
L'Eglise protestante Ma'ohi avait aussi appelé à la manifestation, tout comme le parti indépendantiste, le Tavini huiraatira ou encore Gaston Flosse, ancien président de ce territoire français, qui a pourtant soutenu ces mêmes essais lorsqu'il était au pouvoir.
Certaines associations envisage même de déposer une plainte pour crime contre l'humanité devant la Cour pénale internationale de La Haye.
Les associations demandent aussi que les frais engagés par la Caisse de Prévoyance sociale (l'assurance maladie d'Etat locale) pour soigner les personnes atteintes de maladies radio-induites soient remboursés par l'Etat, avec un effet rétroactif.
« C'est une demande qui nous paraît légitime pour les victimes ayant fait l'objet d'une indemnisation par le Civen », le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires, a indiqué vendredi à Paris le ministre de la Santé Olivier Véran.
Véran s'est également engagé à financer la recherche sur ces cancers, sans aller jusqu'à la création d'un Institut du Cancer à Tahiti, un projet qui serait toutefois en bonne voie selon Patricia Grand, Présidente d'honneur de la ligue contre le cancer en Polynésie.