Aujourd'hui en télétravail, demain sur une plateforme? L'avenir inquiétant du travail éclaté

Un juge newyorkais portant sa robe de magistrat lors d'une séance de travail depuis son appartement à Brooklyn. Le travail à distance a touché un nombre croissant de professions avec la pandémie. (Photo, AFP)
Un juge newyorkais portant sa robe de magistrat lors d'une séance de travail depuis son appartement à Brooklyn. Le travail à distance a touché un nombre croissant de professions avec la pandémie. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 18 juin 2021

Aujourd'hui en télétravail, demain sur une plateforme? L'avenir inquiétant du travail éclaté

  • La transformation profonde du travail inquiète, car la technologie qui promettait il y a quelques années un avenir radieux a pour l'instant fait émerger de nouvelles inégalités entre travailleurs
  • Une majorité de salariés disent aujourd'hui vouloir rester chez eux quelques jours par semaine, selon les enquêtes

PARIS : Combien d'étapes avant que l'essor du télétravail ne provoque la précarisation du modèle social, individualisé à l'extrême et régi par les plateformes? Selon des spécialistes, la numérisation des modes de production accélérée pendant la pandémie n'est pas exempte de risques.

Recrutement via une intelligence artificielle, réunions virtuelles à l'aide de la réalité augmentée, et des interfaces toujours plus perfectionnées: au salon européen de la technologie Vivatech à Paris, les exposants rivalisent d'ingéniosité pour inventer le futur du travail.

Pendant la pandémie de Covid-19, les messageries instantanées et logiciels de visio-conférence ont fait leurs preuves pour continuer à produire tout en maintenant une distanciation physique, et une majorité de salariés disent aujourd'hui vouloir rester chez eux quelques jours par semaine, selon les enquêtes.

Mais la transformation profonde du travail inquiète aussi, car la technologie qui promettait il y a quelques années un avenir radieux où l'essentiel des tâches ingrates serait effectué par des robots, a pour l'instant fait émerger de nouvelles inégalités entre travailleurs.

"Quand on multiplie les interfaces technologiques, le télétravail, ou le travail algorithmique, on isole les gens du collectif qui donne un espace de représentation pour obtenir des droits, et cela les rend plus corvéables", explique Gurvan Kristanadjaja, journaliste à Libération et auteur de "Ubérisation: piège à cons !"

Selon lui, "le télétravail seul ne précarise pas vraiment, mais il favorise l'émergence du statut de freelance, qui lui peut contribuer à précariser."

Son enquête parmi les chauffeurs de VTC, les livreurs et autres forçats des plateformes, montre que ces nouveaux tâcherons (qui travaillent à la tâche) manquent bien souvent de moyens pour se mobiliser face aux algorithmes qui les gouvernent.

«Ubériser le salariat»

"Quand vous avez des employés à distance, est-ce que vous avez besoin que ce soit des salariés? Ce pourrait être des auto-entrepreneurs, ou des personnes à l'étranger", confirme Alain Roumilhac, président de ManpowerGroup France, interrogé par l'AFP dans les allées de Vivatech.

"Chaque fois qu'on sera capable de découper un métier en tâches élémentaires et de les externaliser, cela va se développer dans une approche de plateforme. (...) Les impacts de cette tendance se verront sur trois, cinq ou dix ans", estime-t-il.

Même l'automatisation des tâches les plus basiques (retranscription de texte, catégorisation de fichiers, voire analyse visuelle d'une image médicale) nécessite souvent que quelqu'un entraîne la machine, rappelle Paola Tubaro, directrice de recherche au CNRS.

"Plus qu’à la robotisation, on assiste à la substitution de plein de fonctions sociales" par des processus automatiques et des tâches réalisées à l'étranger, estime la chercheuse qui a consacré plusieurs études aux plateformes de micro-travail.

"D'un côté, le travail à distance a permis à une minorité de salariés de déménager et de fuir un environnement de travail délétère, et de l'autre, une partie du patronat voit dans le télétravail à temps plein un levier pour ubériser le salariat", appuie Sophie Binet, co-secrétaire générale de l'UGICT-CGT.

"Il n'y a pas de déterminisme technologique, mais il faut un débat de société pour savoir ce qu'on automatise ou pas", suggère-t-elle.

"L'abus du statut d'auto-entrepreneur est devenu la norme, et tout le monde sait que ceux qui livrent désormais à Paris sont pour beaucoup des migrants qui louent des comptes à d'autres gens", dénonce de son côté Alexandre Segura, cofondateur et principal développeur de Coopcycle, une coopérative de livreurs qui tente de promouvoir un modèle alternatif à celui des géants du secteur.

Pour autant, ce passionné d'informatique ne veut pas renoncer à la technologie. "Il faut pousser jusqu'au bout les derniers développements du capitalisme. Les réseaux sociaux doivent appartenir aux gens, les plateformes aux travailleurs. Pourquoi on se priverait d'une manière efficace d'organiser la production?"


Droits de douane: l'UE veut négocier mais s'impatiente face à Trump

La décision du président américain, annoncée dans une lettre rendue publique samedi, a jeté un froid alors que les négociations commerciales étaient toujours en cours entre Bruxelles et Washington, avant la date butoir du 1er août. (AFP)
La décision du président américain, annoncée dans une lettre rendue publique samedi, a jeté un froid alors que les négociations commerciales étaient toujours en cours entre Bruxelles et Washington, avant la date butoir du 1er août. (AFP)
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  • "J'ai l'intention de m'entretenir à nouveau avec mes homologues américains dans le courant de la journée, car je ne peux pas m'imaginer en rester là sans effort véritable"
  • "Nous devons nous préparer à toutes les éventualités, y compris, si nécessaire, à des contre-mesures proportionnées et bien calibrées pour rétablir l'équilibre de notre relation transatlantique" a dit Maros Sefcovic

BRUXELLES: L'Union européenne espère toujours obtenir un accord avec les Etats-Unis après les nouvelles menaces de Donald Trump d'imposer le 1er août des droits de douane de 30%, mais la patience s'amenuise, ont indiqué lundi le négociateur en chef de l'UE et des ministres européens du Commerce.

"J'ai l'intention de m'entretenir à nouveau avec mes homologues américains dans le courant de la journée, car je ne peux pas m'imaginer en rester là sans effort véritable", a déclaré le commissaire européen chargé du Commerce Maros Sefcovic.

Mais, a-t-il ajouté, "nous devons nous préparer à toutes les éventualités, y compris, si nécessaire, à des contre-mesures proportionnées et bien calibrées pour rétablir l'équilibre de notre relation transatlantique".

La décision du président américain, annoncée dans une lettre rendue publique samedi, a jeté un froid alors que les négociations commerciales étaient toujours en cours entre Bruxelles et Washington, avant la date butoir du 1er août.

"Changer de méthode" 

"L'incertitude actuelle causée par des droits de douane injustifiés ne peut pas durer indéfiniment", a souligné M. Sefcovic.

"Évidemment, la situation depuis samedi doit nous amener à changer de méthode", a renchéri lundi à Bruxelles le ministre français chargé du Commerce extérieur Laurent Saint-Martin, avant une réunion des ministres de l'UE. Et il ne faut avoir "aucun tabou", a-t-il martelé, y compris en annonçant dès lundi de premières représailles.

"Nous voulons un accord, mais il y a un vieux dicton qui dit: +si tu veux la paix, tu dois te préparer à la guerre+", a déclaré de son côté le ministre danois des Affaires étrangères, Lars Lokke Rasmussen, dont le pays assure actuellement la présidence tournante de l'UE.

La présidente de la Commission européenne - qui négocie au nom des Etats membres de l'UE -, Ursula von der Leyen, a choisi pour le moment de temporiser, sous pression notamment de pays, comme l'Allemagne, dont les ventes vers les Etats-Unis représentent la part la plus importante du total des exportations de l'UE.

Elle a annoncé dimanche que l'Union européenne n'allait pas riposter pour l'instant aux droits de douane américains sur l'acier et l'aluminium, dans l'espoir d'obtenir un accord qui s'avérerait moins douloureux.

"Nous avons toujours été très clairs sur le fait que nous préférons une solution négociée. Cela reste le cas et nous utiliserons le temps dont nous disposons maintenant jusqu'au 1er août", a déclaré Mme von der Leyen.

Des diplomates ont néanmoins souligné qu'un paquet de mesures de représailles supplémentaires serait présenté aux ministres lundi, mesures qui pourraient être mises en oeuvre si Donald Trump optait effectivement pour des taxes de 30% sur les importations en provenance de l'Union européenne.

100 milliards d'euros

L'UE a déjà menacé en mai d'imposer des droits de douane sur des produits américains d'une valeur d'environ 100 milliards d'euros comprenant des automobiles et des avions, si les négociations échouaient - quand bien même un diplomate a laissé entendre que la liste finale avait été réduite à une valeur de 72 milliards.

Les pays européens essayent de rester unis dans cette affaire, bien que leurs économies ne soient pas exposées de la même façon aux foudres douanières du président américain.

Emmanuel Macron a exhorté samedi la Commission européenne à "défendre résolument les intérêts européens" et à "accélérer la préparation de contre-mesures crédibles".

Le chancelier allemand Friedrich Merz s'est dit dimanche d'accord avec le président français, précisant avoir discuté avec lui, avec Mme von der Leyen et Donald Trump ces derniers jours. Il assure vouloir s'impliquer "intensivement" pour tenter d'arriver à une solution.

La Première ministre italienne Giorgia Meloni a quant à elle mis en garde dimanche contre la perspective d'une "guerre commerciale" au sein du monde occidental.

"L'Europe dispose de la puissance économique et financière nécessaire pour affirmer sa position et parvenir à un accord équitable et de bon sens. L'Italie fera sa part. Comme toujours", a-t-elle dit dans un communiqué, tandis que son opposition l'accuse de manquer de fermeté face à Washington.

Depuis son retour à la présidence des Etats-Unis en janvier, Donald Trump a imposé des droits de douane fluctuants et généralisés à ses alliés et ses concurrents, perturbant les marchés financiers et alimentant les craintes d'un ralentissement économique mondial.


Les expatriés du CCG peuvent désormais investir directement sur le marché principal saoudien

Les mises à jour devraient renforcer l'attrait du marché des capitaux saoudien pour les investisseurs locaux et internationaux. Fichier/Reuters
Les mises à jour devraient renforcer l'attrait du marché des capitaux saoudien pour les investisseurs locaux et internationaux. Fichier/Reuters
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  • Cette mesure favorise l'ouverture du marché à l'échelle internationale.
  • Le projet a été soumis à la consultation publique pendant 30 jours.

RIYADH : Les résidents des pays du Conseil de coopération du Golfe, y compris les expatriés, peuvent désormais, pour la première fois, investir directement sur le principal marché boursier d'Arabie saoudite, en vertu d'une nouvelle réglementation annoncée par l'Autorité du marché des capitaux.

La réforme, dévoilée par le président de la CMA, Mohammed El-Kuwaiz, supprime les restrictions antérieures qui limitaient l'accès aux accords de swap ou obligeaient les investisseurs à passer par des intermédiaires agréés. Elle s'applique aux résidents actuels et anciens d'Arabie saoudite ou d'autres États du CCG, selon une annonce officielle.

Ces initiatives s'alignent sur les objectifs de diversification économique du Royaume dans le cadre de Vision 2030, qui vise à approfondir les marchés de capitaux et à attirer les capitaux mondiaux. En rationalisant les ouvertures de compte et en élargissant l'accès, la CMA vise à améliorer la liquidité, la transparence et la confiance des investisseurs.  

Dans un message publié sur X, M. El-Kuwaiz a déclaré que cette mesure "favorise l'ouverture du marché à l'échelle internationale, tout en établissant une relation d'investissement à long terme avec des segments plus larges d'investisseurs dans le monde entier, dans le cadre d'un environnement réglementaire plus souple et plus attrayant".

Dans une déclaration séparée, la CMA a déclaré que les mises à jour "amélioreraient l'attractivité du marché des capitaux saoudien pour les investisseurs locaux et internationaux, augmenteraient le niveau de protection des investisseurs et renforceraient la confiance des participants au marché".

Les amendements ont été approuvés suite à la publication par la CMA du projet le 20 novembre 2024, intitulé "Faciliter les procédures d'ouverture et de fonctionnement des comptes d'investissement pour diverses catégories d'investisseurs".

Le projet a été ouvert à la consultation publique pendant 30 jours calendaires via la Plateforme électronique unifiée pour la consultation du public et des entités gouvernementales, affiliée au Centre national de la compétitivité, et le site web de la CMA.

L'expansion des investisseurs du CCG fait partie d'une révision réglementaire plus large dévoilée par la CMA la semaine dernière pour moderniser le paysage des fonds d'investissement en Arabie saoudite.

Les réformes clés comprennent l'élargissement des canaux de distribution, permettant aux unités de fonds d'investissement d'être distribuées par le biais de plateformes numériques agréées et d'entreprises fintech approuvées par la Banque centrale saoudienne.

Des mesures de gouvernance plus strictes ont également été introduites, y compris de nouvelles garanties pour les transitions des gestionnaires de fonds, qui nécessitent l'approbation de la CMA et une période de transfert de 60 jours pour protéger les investisseurs.

Les FPI cotées sur le marché parallèle disposent désormais d'une plus grande flexibilité, puisqu'elles peuvent investir dans des projets de développement sans limites strictes d'allocation d'actifs, ce qui peut potentiellement améliorer les rendements.

Les derniers changements réglementaires représentent une autre étape stratégique pour accroître la liquidité, attirer les capitaux étrangers et positionner la bourse saoudienne comme un marché monétaire de premier plan dans la région.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Medef appelle les Européens à faire front commun face aux droits de douane américains

Le président du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), Patrick Martin, répond aux questions des journalistes après une réunion avec le Premier ministre français à l'Hôtel de Matignon à Paris, le 24 juin 2025, à la suite de l'échec de la conférence sur les retraites. (Photo : Alain JOCARD / AFP)
Le président du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), Patrick Martin, répond aux questions des journalistes après une réunion avec le Premier ministre français à l'Hôtel de Matignon à Paris, le 24 juin 2025, à la suite de l'échec de la conférence sur les retraites. (Photo : Alain JOCARD / AFP)
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  • Le patronat français appelle à l'unité de l'Europe face à l'annonce par le président américain Donald Trump de droits de douane de 30 % sur les produits issus de l'Union européenne,
  • Le locataire de la Maison Blanche a annoncé l'imposition de droits de douane de 30 % pour les produits de l'UE et du Mexique importés aux États-Unis, une nouvelle surenchère en pleine négociation qui sème l'inquiétude en Europe.

PARIS : Le patronat français appelle à l'unité de l'Europe face à l'annonce par le président américain Donald Trump de droits de douane de 30 % sur les produits issus de l'Union européenne, qui entreront en vigueur dès le 1er août.

« Dans cette période, l'unité de l'Europe est plus que jamais essentielle », a réagi samedi soir le président du premier syndicat patronal dans une déclaration à l'AFP, soulignant que « le Medef s'y emploie avec ses homologues européens ».

Samedi, le locataire de la Maison Blanche a annoncé l'imposition de droits de douane de 30 % pour les produits de l'UE et du Mexique importés aux États-Unis, une nouvelle surenchère en pleine négociation qui sème l'inquiétude en Europe.

Cette annonce a aussitôt suscité de vives réactions en Europe, où des secteurs essentiels de l'économie du continent pourraient être touchés, comme l'automobile, l'industrie pharmaceutique, l'aéronautique ou encore le secteur viticole.

« Nous avons encore trois semaines pour négocier et éviter que nos économies, de part et d'autre de l'Atlantique, subissent les contrecoups d'une décision irrationnelle », a estimé Patrick Martin.

« Une absence d'accord conduirait inévitablement à des mesures de rétorsion légitimes de la part de l'Europe », a-t-il ajouté, précisant que le Medef serait « extrêmement » vigilant « pour la sauvegarde de nos intérêts économiques et la pérennité de nos filières les plus exposées au marché américain ».