BEYROUTH: Une cinquantaine d'ONG libanaises et internationales, dont Amnesty et Human Rights Watch, ont réclamé mardi une enquête de l'ONU sur l'explosion du 4 août au port de Beyrouth, fustigeant les manquements de l'enquête libanaise qui n'a abouti à aucune conclusion en près d'un an.
En août dernier, les autorités libanaises avaient refusé toute enquête internationale, réclamée par des familles de victimes, mais aussi des organisations internationales et des pays occidentaux.
La gigantesque déflagration avait fait plus de 200 morts et 6 500 blessés, dévastant la moitié de la capitale. Elle avait été déclenchée par un incendie dans un entrepôt abritant des tonnes de nitrate d'ammonium « sans mesure de précaution » de l'aveu même des autorités, dont la responsabilité est pointée du doigt pour de possibles manquements et négligences.
Alors que le pays commémorera le 4 août le premier anniversaire de la tragédie, l'enquête libanaise n'a toujours pas rendu ses conclusions publiques.
Dans une lettre adressée au Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, 53 ONG réclament « une enquête ou une mission d'établissement des faits » pour déterminer « si le comportement de l'Etat a provoqué ou contribué » à l'explosion, « une tragédie aux proportions historiques ».
« Les dix mois depuis l'explosion ont été marqués par les obstructions, les élisions, les retards des autorités », dénoncent les ONG dans cette lettre.
Celle-ci cite « des ingérences politiques flagrantes, l'immunité des hauts responsables politiques, le manque de respect des normes d'un procès équitable et des violations de la procédure régulière ».
En février, un premier juge d'instruction chargé de l'enquête avait été récusé. Il avait auparavant inculpé le Premier ministre démissionnaire Hassan Diab et trois anciens ministres, provoquant une levée de boucliers dans les milieux politiques.
Le nouveau juge d'instruction Tarek Bitar doit prochainement entamer des interrogatoires dans le cadre de cette enquête. Fin mai, il a reçu un rapport technique rédigé par des enquêteurs français dépêchés à Beyrouth immédiatement après le drame.
L'enquête libanaise a pour objectif affiché de déterminer les causes de l'explosion, mais aussi de comprendre pourquoi la cargaison de nitrate d'ammonium a été déchargée au port de Beyrouth pour y être abandonnée plusieurs années.
« Les autorités libanaises ont eu plus de 10 mois pour prouver qu'elles avaient la volonté et qu'elles étaient capables de mener une enquête crédible », a rappelé Aya Majzoub, chercheuse à Human Rights Watch.
« Mais elles ont échoué à tous les égards », fustige-t-elle, demandant une « enquête internationale, indépendante sur les causes et les responsabilités de l'explosion ».