Créer la transition énergétique équilibrée dont le monde a besoin

Le projet Uthmaniyah de capture du carbone et de récupération assistée du pétrole a la capacité d’emprisonner 800 000 tonnes de CO2 par an (Photo fournie par Aramco).
Le projet Uthmaniyah de capture du carbone et de récupération assistée du pétrole a la capacité d’emprisonner 800 000 tonnes de CO2 par an (Photo fournie par Aramco).
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Publié le Vendredi 28 août 2020

Créer la transition énergétique équilibrée dont le monde a besoin

Créer la transition énergétique équilibrée dont le monde a besoin
  • Une transition énergétique efficace doit intégrer cet aspect crucial, en équilibrant croissance et durabilité
  • L'une des solutions les plus discutées du changement climatique propose l'interdiction des combustibles fossiles

L'Accord de Paris vise à « renforcer la réponse mondiale face à la menace du changement climatique, dans le cadre du développement durable et des efforts pour éradiquer la pauvreté ». Malheureusement, la pauvreté énergétique est souvent oubliée dans le débat mondial sur notre avenir énergétique.

Une transition énergétique efficace doit intégrer cet aspect crucial, en équilibrant croissance et durabilité. Un nouvel équilibre entre croissance économique, accès à l'énergie et préservation de l'environnement est nécessaire pour suivre la voie de la transition énergétique.

L'une des solutions les plus discutées du changement climatique propose l'interdiction des combustibles fossiles. Mais comme le pétrole constitue une part importante de la demande énergétique mondiale, les appels pour « le garder dans le sol » reflètent une perspective franchement irréaliste. Il est essentiel de comprendre que l'amélioration du niveau de vie et l'expansion de l'économie mondiale entraîneront également une augmentation de l'intensité énergétique – la quantité d'énergie utilisée par unité de produit intérieur brut.

Le World Energy Outlook 2019 de l'Agence internationale de l’énergie prévoit que « la consommation future d'énergie dans les pays développés diminuera, mais que la consommation totale d'énergie primaire augmentera considérablement, sous l'impulsion des pays en développement ». Ces pays sont limités dans le développement des infrastructures nécessaires pour les énergies renouvelables, car le développement de telles infrastructures est coûteux et génère de faibles rendements. Les besoins énergétiques croissants des pays en développement et les limites du financement et du développement des infrastructures signifient que ces pays doivent compter sur une énergie à haute densité – principalement le pétrole et le gaz.

La densité énergétique est essentielle pour comprendre le contexte de notre avenir énergétique. Elle nous offre des opportunités presque infinies au niveau des progrès du style de vie moderne. La densité énergétique de l'essence équivaut à environ sept fois celle d'une batterie au lithium. Même avec un changement technologique rapide, les avantages du pétrole en termes de densité énergétique, tels que les mécanismes de distribution bien développés et efficaces, ne seront pas surpassés.

Le fait de faire le plein d'un véhicule, en comparaison avec sa recharge, devrait également être envisagé dans le cadre des pays en développement, où les bornes de recharge et l'infrastructure du réseau doivent être développées. Un réservoir d'essence plein peut, en moyenne, permettre à une voiture moderne de parcourir entre 700 et 900 km avant de refaire le plein, ce qui ne prend que quelques minutes. La différence est encore plus flagrante lorsque l'on prend l'exemple du kérosène et du ravitaillement des avions en carburant. Aucune avancée actuelle de la technologie énergétique n'est en mesure de soutenir les voyages et les transports de manière aussi sûre, efficace et abordable que les carburants modernes.

Étant donné que l'économie mondiale est appelée à doubler de volume, et que l’on prévoit des milliards de consommateurs d'énergie supplémentaires d'ici à 2050, nous ne pouvons tout simplement pas arrêter les hydrocarbures d’une simple pression sur un bouton. Il est préférable d'utiliser une approche pragmatique pour garantir que les classes moyennes émergentes et les pays les moins développés aient accès à une énergie moderne, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'utilisation de combustibles fossiles. La clé de la lutte contre le changement climatique pour les entreprises énergétiques et les autres secteurs est de se concentrer sur la réduction des émissions.

De plus, les plastiques et autres dérivés de molécules d'hydrocarbures ont des applications vastes et essentielles, allant de l'électronique et de la construction aux soins de santé. La lutte actuelle contre le coronavirus nous a montré que les plastiques à usage unique jouaient un rôle essentiel pour assurer la sécurité tout au long de notre vie. De bonnes pratiques de gestion des déchets qui garantissent et récompensent l'élimination appropriée des plastiques aideront à relever le défi de la pollution liée à leur usage.

Aramco a récemment utilisé le concept de l'économie circulaire du carbone comme voie de transition énergétique dans laquelle sont employées des technologies de recyclage des émissions. Dans ce schéma, le carbone peut se déplacer dans un système à circuit fermé, similaire au cycle naturel du carbone. Un élément technologique clé de ce schéma est un groupe de technologies connues comme capture, utilisation et stockage du carbone (CCUS).

L'entreprise exploite également d'autres technologies qui peuvent offrir une réelle valeur économique, tout en protégeant l'environnement. Ces technologies peuvent être résumées selon les principes de l'économie circulaire du carbone de « réduire, réutiliser et retirer ».  

Réduire, c’est procéder à la réduction des émissions grâce à une efficacité énergétique accrue et une meilleure gestion des émissions. L’un des exemples est la réduction du torchage du gaz, lancée par Aramco, grâce à l’utilisation du Master Gas System – qui a contribué à la faible intensité en carbone de la compagnie qui se trouve être à la pointe de la recherche – (définie comme la quantité de dioxyde de carbone émise par baril de pétrole et de gaz produit). Aramco investit également dans le développement de technologies qui convertissent directement le brut en produits chimiques. Un autre domaine de réduction des émissions est l’utilisation de matériaux non métalliques fabriqués à partir du brut dans la construction de gazoducs et dans d'autres secteurs.

Réutiliser comprend la capture des émissions et leur réutilisation dans les procédés industriels ou le recyclage des émissions en produits utiles. Parmi les exemples figurent la récupération améliorée du pétrole de dioxyde de carbone et les applications de dioxyde de carbone supercritique, telles que la technologie de durcissement pour les matériaux de béton préfabriqués qui peuvent stocker jusqu'à 20 % en poids de dioxyde de carbone dans le béton, tout en offrant une résistance mécanique supérieure et en réduisant le temps de durcissement. Un autre exemple est la technologie de conversion qui utilise du dioxyde de carbone capturé pour créer des matériaux utiles, tels que les plastiques, avec seulement un tiers de l'empreinte carbone des matériaux conventionnels.

Retirer signifie capturer les émissions et les éliminer de l'atmosphère. Citons à titre d’exemple le projet Uthmaniyah d'Aramco pour la capture du carbone et la récupération assistée du pétrole, qui a la capacité d’emprisonner 800 000 tonnes de dioxyde de carbone par an, en le comprimant et en l'injectant dans un champ pétrolifère. Les solutions fondées sur la nature apporteront également une contribution importante, notamment les activités de reboisement – à l’instar d’Aramco qui plante un million d'arbres à travers le Royaume.

Un avenir énergétique durable nécessite aujourd'hui des recherches, une préparation, et des investissements substantiels. Les pays et les entreprises ont l'obligation d'être les défenseurs pragmatiques d'un mix énergétique qui équilibre la durabilité avec les forces de la croissance économique, les exigences futures de la société et la préservation de l'environnement.

La meilleure voie consiste à passer par une transition énergétique durable dans laquelle notre secteur continuera à s'adapter et à évoluer, à mesure que nous trouvons des solutions énergétiques essentielles pour l'avenir. Le pétrole et le gaz auront un rôle clé, avec les énergies renouvelables, dans le système énergétique du futur. Nous devons continuer à adopter la polyvalence du pétrole, tout en nous concentrant sur davantage de percées en matière de durabilité, telles que les technologies CCUS évoquées plus haut. Le pétrole est un catalyseur essentiel d'un système énergétique à faible émission de carbone qui est également en mesure de répondre à la demande énergétique mondiale croissante. Ce n'est qu'en intégrant le pétrole au mix énergétique que nous pourrons équilibrer croissance et durabilité dans le monde.

Yasser M. Mufti est vice-président de la stratégie chez Aramco.

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com