Le monde arabe peut-il envisager un avenir sans tabac?

Un homme fume devant un bureau de tabac à Riyad, la capitale saoudienne, le 11 juin 2017 (Archive/AFP)
Un homme fume devant un bureau de tabac à Riyad, la capitale saoudienne, le 11 juin 2017 (Archive/AFP)
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Publié le Mardi 01 juin 2021

Le monde arabe peut-il envisager un avenir sans tabac?

  • La Journée mondiale sans tabac est célébrée le 31 mai pour sensibiliser le public aux effets nocifs et mortels du tabagisme
  • Les États arabes du Golfe utilisent toute la gamme de mesures pour réduire la consommation de tabac

ABU DHABI: En ce qui concerne le tabagisme, les données sont connues, certes, mais elles ne sont pas le remède. Le tabagisme est une cause majeure de décès évitables et il fait plus de 8 millions de morts chaque année dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). 

Pour mettre cette donnée en perspective, la pandémie de Covid-19, qui a nécessité des confinements nationaux, a causé jusqu’à présent 3,56 millions de décès, un chiffre significativement plus faible. 

Les pays à revenu faible ou intermédiaire sont concernés à un niveau disproportionnellement élevé car ils représentent plus de 80% des 1,3 milliard de fumeurs au monde. 

La région de la Méditerranée orientale compte un nombre relativement élevé de consommateurs de tabac et ce nombre augmente rapidement. 

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Un jeune fume une pipe à eau (chicha) dans un café de Dubaï, le 31 mai 2008. La nicotine contenue dans le tabac crée une forte dépendance et le tabagisme est un facteur de risque majeur pour les maladies cardiovasculaires et respiratoires, plus de 20 types ou sous-types différents de cancer, et de nombreux autres problèmes de santé (Archive/AFP) 

La bonne nouvelle est que les États du Golfe utilisent toute la gamme des mesures pour réduire la consommation de tabac. 

L’Arabie saoudite, le plus grand pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) avec une population de plus de 34 millions d’habitants, a pris un certain nombre de mesures pour combattre ce fléau. Celles-ci incluent l’augmentation des taxes sur les ventes et des amendes, des campagnes anti-tabac, la création de cliniques de sevrage et l’introduction d’applications mobiles dédiées. 

«L’Arabie saoudite a mis en place un plan stratégique ambitieux pour réduire le taux de tabagisme de 12,7% à 5% d’ici à 2030», a déclaré en 2019 le Dr Tawfiq al-Rabiah, ministre saoudien de la Santé. 

En 2017, le Comité national saoudien de lutte contre le tabagisme a imposé une taxe de 100% sur tous les produits contenant du tabac et a interdit de fumer dans les espaces publics, y compris les centres commerciaux, les parcs et les lieux de travail. 

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Un artiste passe devant un Émirati alors qu’il allume une cigarette sur  le champ de course de Meydan avant le début de la Coupe du monde de Dubaï, le 27 mars 2010. La nicotine contenue dans le tabac crée une forte dépendance et le tabagisme est un facteur de risque majeur pour les maladies cardiovasculaires et respiratoires, plus de 20 types ou sous-types différents de cancer, et de nombreux autres problèmes de santé (Archive /AFP) 

En outre, le ministère saoudien de la Santé a étendu son réseau de cliniques spécialisées sur 900 sites dans tout le pays. 

Des mesures qui ont eu de l’effet: les données de 2019 montrent une augmentation des visites dans les cliniques de 213%, une baisse des importations de tabac de 54% et une hausse de 307% du nombre de personnes arrêtant de fumer. 

Les Émirats arabes unis voisins s’attellent à un défi tout aussi ambitieux. Les autorités se sont fixé comme objectif de réduire la consommation de tabac de 21,6% à 15,7% chez les hommes et de 1,9% à 1,66% chez les femmes d’ici à la fin de l’année. 

EN BREF

La Journée mondiale sans tabac est célébrée le 31 mai pour sensibiliser le public aux effets nocifs et mortels du tabagisme. 

La forme de loin la plus courante de consommation de tabac aux EAU est la cigarette (77,4%), suivi du midwakh (une petite pipe utilisée pour fumer du tabac) à 15%, des pipes à eau à 6,8% et des cigares à 0,66%. 

Le gouvernement a lancé des campagnes de sensibilisation sur les méfaits du tabac via des moyens réguliers ainsi que sur les réseaux sociaux, a déclaré le Dr Buthaina Abdallah ben Belaila, responsable des maladies non transmissibles au ministère émirati de la Santé et de la Prévention. 

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Un homme fume la pipe à eau (chicha) dans un café de Dubaï, le 31 mai 2008. La nicotine contenue dans le tabac crée une forte dépendance et le tabagisme est un facteur de risque majeur pour les maladies cardiovasculaires et respiratoires, plus de 20 types ou sous-types différents de cancer, et de nombreux autres problèmes de santé (Archive/AFP) 

«Le pays a commencé à imposer une taxe d’accise sur les produits du tabac qui a conduit à un doublement du prix pour les consommateurs, ce qui se traduira par une réduction de la consommation, selon les études», a-t-elle déclaré. 

«Les EAU ont également élargi l’offre de services de sevrage tabagique en augmentant le nombre de cliniques et en formant davantage de médecins à offrir de tels services, ce qui a entraîné une augmentation du nombre de personnes souhaitant arrêter de fumer.» 

Quelques chiffres

Taux de droit d’accise des EAU 

100% sur les produits du tabac 

100% sur les appareils électroniques pour fumer 

100% sur les liquides utilisés dans ces appareils et outils 

L’étude de l’Oman Medical Journal a révélé que le taux de prévalence du tabagisme aux EAU était plus élevé parmi les expatriés arabes (31,9%), suivis des expatriés non arabes (22,6%) et des Émiratis (21,6%).  

Selon le Dr Mohammed Anas Ayoob, spécialiste des maladies pulmonaires à l’hôpital spécialisé NMC d’Abu Dhabi, cela pourrait être dû au fait que le tabagisme est très répandu dans des pays tels que la Jordanie et l’Égypte, pays d’origine de nombreux expatriés arabes aux Émirats arabes unis. 

Le fait de vivre loin de ses proches ainsi que le stress lié au travail peuvent être parmi les raisons de la forte consommation de tabac par les expatriés. 

Parmi les pays du CCG, Oman possède le taux de consommation de tabac le plus faible, mais les prévisions suggèrent qu’il ne peut pas se permettre la complaisance. 

La prévalence du tabagisme chez les hommes à Oman (qui était de 17,9% en 2010) devrait atteindre 33,3% d’ici 2025, selon une étude publiée en 2017 dans l’Oman Medical Journal. Chiffre encore faible par rapport à ceux prévus pour d’autres pays arabes tels le Liban (45,4%), Bahreïn (48,8%) et l’Égypte (49,9%). 

L’étude précise que, avant l’année 1970, braver l’interdiction de fumer dans tous les espaces publics intérieurs et extérieurs d’Oman était passible de flagellation publique et de peines de prison. 

De nos jours, le gouvernement a une approche très différente: il a mis sur pied des cliniques pour le sevrage des fumeurs et imposé une interdiction complète de la publicité, de la promotion et du parrainage des produits du tabac. 

L’étude a également noté qu’Oman ne dispose pas d’installations de fabrication de produits tabagiques, de sorte que plus de 80% de la demande intérieure est satisfaite par des importations en provenance des Émirats arabes unis – suivis de l’Allemagne, la Suisse, la Pologne et la Turquie. 

Au Qatar, un rapport épidémiologique publié en 2021 sur le tabagisme indique que la Vision 2030 nationale du gouvernement et la stratégie du ministère de la Santé publique de 2018-2022 visent à réduire la prévalence du tabagisme à 5%.  

Le ministère de la Santé du Qatar s’est engagé à mettre en place un système de surveillance de la consommation de tabac et à mener des enquêtes régulières sur le tabagisme conformément aux recommandations du Système mondial de surveillance du tabagisme. 

Il a également l’intention d’offrir des services aux fumeurs qui veulent se débarrasser de cette habitude, y compris une ligne d’assistance et un site Web local. 

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Une femme fume la pipe à eau (chicha) dans un café de Dubaï, le 31 mai 2008. La nicotine contenue dans le tabac crée une forte dépendance et le tabagisme est un facteur de risque majeur pour les maladies cardiovasculaires et respiratoires, plus de 20 types ou sous-types différents de cancer, et de nombreux autres problèmes de santé (Archive /AFP) 

Le ministère a déclaré qu’il établira un modèle fiscal pratique et complet sur les produits contenant du tabac, y compris des droits de douane et des taxes sur la production et la vente de tabac. 

«Les données provenant de pays de tous niveaux de revenus montrent que les augmentations de prix des cigarettes sont très efficaces pour réduire la demande», a déclaré le Dr Ayoob, de l’hôpital spécialisé NMC. 

«Des prix plus élevés encouragent l’arrêt du tabac et empêchent le début de son usage. Ils réduisent également le risque de rechute chez ceux qui ont arrêté et font diminuer la consommation des utilisateurs assidus.» 

«Plusieurs examens ont démontré qu’une augmentation des prix de 10% entraîne une baisse de 2,5 à 5% de la consommation de cigarettes.» 

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Une photo prise le 28 septembre 2017 montre un homme en train d’organiser la présentation de paquets de cigarettes dans un magasin de Ras al-Khaimah. La nicotine contenue dans le tabac crée une forte dépendance et le tabagisme est un facteur de risque majeur pour les maladies cardiovasculaires et respiratoires, plus de 20 types ou sous-types différents de cancer, et de nombreux autres problèmes de santé (Archive /AFP) 

Quant à savoir si les cigarettes électroniques sont une alternative plus saine, le Dr Ayoob dit que fumer semble être plus nocif que le vapotage. 

«Cela ne signifie pas que le vapotage ne provoque aucun danger. En effet, les cigarettes électroniques produisent un aérosol en chauffant un liquide qui contient généralement de la nicotine, des arômes et d’autres produits chimiques qui aident à fabriquer l’aérosol. Les utilisateurs l’inhalent dans leurs poumons. Les personnes aux environs risquent également de l’inhaler lorsque l’utilisateur expire cet aérosol dans l’air», a-t-il expliqué. 

Le Dr Ayoob a souligné que la Food and Drug Administration des États-Unis n’a pas confirmé que le vapotage aide les gens à arrêter de fumer. Au contraire, de nombreux utilisateurs de cigarettes électroniques ne parviennent pas à se débarrasser de leur dépendance», a-t-il déclaré. 

«Selon un rapport, 58,8% des personnes qui ont récemment utilisé des cigarettes électroniques ont également continué à fumer des cigarettes», a-t-il déclaré.  

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


Un an après la chute d’Assad, les Syriens affichent un fort soutien à al-Chareh

Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
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  • Un sondage révèle un optimisme croissant et un large soutien aux progrès du gouvernement après la chute d’Assad
  • L’Arabie saoudite apparaît comme le pays étranger le plus populaire, Trump reçoit également un soutien marqué

LONDRES : Alors que les Syriens ont célébré cette semaine le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad, une enquête menée dans le pays révèle un soutien massif au nouveau président et place l’Arabie saoudite comme principal partenaire international apprécié.

L’ancien président avait fui le pays le 8 décembre 2024, après une offensive éclair de l’opposition jusqu’à Damas, mettant fin à 14 ans de guerre civile.

La campagne était menée par Ahmad al-Chareh, aujourd’hui président du pays, qui s’efforce de stabiliser la Syrie et de rétablir des relations avec ses partenaires internationaux.

Ces efforts ont été salués dans un sondage récemment publié, montrant que 81 % des personnes interrogées ont confiance dans le président et 71 % dans le gouvernement national.

Les institutions clés bénéficient également d’un fort soutien : plus de 70 % pour l’armée et 62 % pour les tribunaux et le système judiciaire.

L’enquête a été menée en octobre et novembre par Arab Barometer, un réseau de recherche américain à but non lucratif.

Plus de 1 200 adultes sélectionnés aléatoirement ont été interrogés en personne à travers le pays sur une large gamme de sujets, notamment la performance du gouvernement, l’économie et la sécurité.

Le large soutien exprimé envers al-Chareh atteint un niveau enviable pour de nombreux gouvernements occidentaux, alors même que la Syrie fait face à de profondes difficultés.

Le coût de la reconstruction dépasse les 200 milliards de dollars selon la Banque mondiale, l’économie est dévastée et le pays connaît encore des épisodes de violence sectaire.

Al-Chareh s’efforce de mettre fin à l’isolement international de la Syrie, cherchant l’appui de pays de la région et obtenant un allègement des sanctions américaines.

Un soutien clé est venu d’Arabie saoudite, qui a offert une aide politique et économique. Le sondage place le Royaume comme le pays étranger le plus populaire, avec 90 % d’opinions favorables.

Le Qatar recueille lui aussi une forte popularité (plus de 80 %), suivi de la Turquie (73 %).

La majorité des personnes interrogées — 66 % — expriment également une opinion favorable envers les États-Unis, saluant la décision du président Donald Trump d’assouplir les sanctions et l’impact attendu sur leur vie quotidienne.

Après sa rencontre avec al-Chareh à Washington le mois dernier, Trump a annoncé une suspension partielle des sanctions, après en avoir déjà assoupli plusieurs volets.

Le sondage montre que 61 % des Syriens ont une opinion positive de Trump — un niveau supérieur à celui observé dans une grande partie du Moyen-Orient.

En revanche, l’enthousiasme est bien moindre concernant les efforts américains pour normaliser les relations entre la Syrie et Israël.

Seuls 14 % soutiennent cette démarche, et à peine 4 % disent avoir une opinion favorable d’Israël.

Lors du chaos provoqué par la chute d’Assad, l’armée israélienne a occupé de nouveaux territoires dans le sud de la Syrie et a mené de fréquentes attaques au cours de l’année écoulée.

Plus de 90 % des Syriens considèrent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et les frappes contre l’Iran, le Liban et la Syrie comme des menaces critiques pour leur sécurité.

Dans Foreign Policy, Salma Al-Shami et Michael Robbins (Arab Barometer) écrivent que les résultats de l’enquête donnent des raisons d’être optimiste.

« Nous avons constaté que la population est pleine d’espoir, favorable à la démocratie et ouverte à l’aide étrangère », disent-ils. « Elle approuve et fait confiance à son gouvernement actuel. »

Mais ils notent aussi plusieurs sources d’inquiétude, notamment l’état de l’économie et la sécurité interne.

Le soutien au gouvernement chute nettement dans les régions majoritairement alaouites.

La dynastie Assad, au pouvoir pendant plus de 50 ans, était issue de la minorité alaouite, dont les membres occupaient de nombreux postes clés.

L’économie reste la principale préoccupation : seuls 17 % se disent satisfaits de sa performance, et beaucoup s’inquiètent de l’inflation, du chômage et de la pauvreté.

Quelque 86 % déclarent que leurs revenus ne couvrent pas leurs dépenses, et 65 % affirment avoir eu du mal à acheter de la nourriture le mois précédent.

La sécurité préoccupe aussi : 74 % soutiennent les efforts du gouvernement pour collecter les armes des groupes armés et 63 % considèrent l’enlèvement comme une menace critique.

À l’occasion de l’anniversaire de la chute d’Assad, lundi, al-Chareh a affirmé que le gouvernement œuvrait à construire une Syrie forte, à consolider sa stabilité et à préserver sa souveraineté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël mène une série de frappes contre le Hezbollah au Liban

Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • Israël a frappé vendredi plusieurs sites du Hezbollah au sud et à l’est du Liban, ciblant notamment un camp d’entraînement de sa force d’élite al-Radwan, malgré le cessez-le-feu conclu en novembre 2024
  • Ces raids interviennent alors que l’armée libanaise doit achever le démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah le long de la frontière israélienne d’ici le 31 décembre

BEYROUTH: Israël a mené une série de frappes aériennes contre le sud et l'est du Liban vendredi matin, selon les médias officiels, l'armée israélienne affirmant viser des objectifs du Hezbollah pro-iranien dont un camp d'entrainement.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe islamiste libanais, Israël continue de mener des attaques régulières contre le Hezbollah, l'accusant de se réarmer.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani), les raids de vendredi, qualifiés en partie de "violents", ont visé une dizaine de lieux, certains situés à une trentaine de km de la frontière avec Israël.

Dans un communiqué, l'armée israélienne a affirmé avoir "frappé un complexe d'entrainement" de la force d'élite du Hezbollah, al-Radwan, où des membres de la formation chiite apprenaient "l'utilisation de différents types d'armes", devant servir dans "des attentats terroristes".

L'armée israélienne a également "frappé des infrastructures militaires supplémentaires du Hezbollah dans plusieurs régions du sud du Liban", a-t-elle ajouté.

L'aviation israélienne avait déjà visé certains des mêmes sites en début de semaine.

Ces frappes interviennent alors que l'armée libanaise doit achever le démantèlement le 31 décembre des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord, conformément à l'accord de cessez-le-feu.

Les zones visées vendredi se trouvent pour la plupart au nord du fleuve.

Le Hezbollah a été très affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe.


Pluies diluviennes et vents puissants ajoutent au chaos qui frappe Gaza

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
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  • A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre
  • Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza

GAZA: Pelle à la main, des Palestiniens portant des sandales en plastique et des pulls fins creusent des tranchées autour de leurs tentes dans le quartier de Zeitoun, à Gaza-ville, rempart dérisoire face aux pluies torrentielles qui s'abattent depuis des heures.

Dès mercredi soir, la tempête Byron a balayé le territoire palestinien, bordé par la mer Méditerranée, inondant les campements de fortune et ajoutant à la détresse de la population, déplacée en masse depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le 7 octobre 2023.

A Zeitoun, le campement planté au milieu des décombres a des allures cauchemardesques, sous un ciel chargé de gros nuages gris et blancs.

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes.

Accroupis sur des briques posées dans la boue, un groupe d'enfants mangent à même des faitouts en métal devant l'ouverture d'un petit abri en plastique, en regardant le ciel s'abattre sur le quartier.

"Nous ne savions pas où aller" 

A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre.

"La nuit dernière a été terrible pour nous et pour nos enfants à cause des fortes pluies et du froid, les enfants ont été trempés, les couvertures et les matelas aussi. Nous ne savions pas où aller", raconte à l'AFP Souad Mouslim, qui vit sous une tente avec sa famille.

"Donnez-nous une tente décente, des couvertures pour nos enfants, des vêtements à porter, je le jure, ils ont les pieds nus, ils n'ont pas de chaussures", implore-t-elle.

"Jusqu'à quand allons-nous rester comme ça? C'est injuste", dit-elle en élevant la voix pour couvrir le bruit des gouttes frappant la toile.

Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza.

Le territoire connait généralement un épisode de fortes pluies en fin d'automne et en hiver, mais la dévastation massive due à la guerre l'a rendu plus vulnérable.

"La situation est désespérée", résume Chourouk Mouslim, une déplacée originaire de Beit Lahia, dans le nord de Gaza, elle aussi sous une tente à al-Zawaida.

"Nous ne pouvons même pas sortir pour allumer un feu" pour cuisiner ou se chauffer, déplore-t-elle, avant d'ajouter qu'elle n'a de toutes les manières ni bois, ni gaz.

Dans ce territoire dont les frontières sont fermées, où l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante selon l'ONU, malgré l'entrée en vigueur d'une trêve le 10 octobre, les pénuries empêchent une population déjà démunie de faire face à ce nouveau problème.

Lointaine reconstruction 

Sous les tentes, les plus chanceux bâchent le sol ou le recouvrent de briques pour empêcher que le sable humide ne détrempe leurs affaires. Dans les zones où le bitume n'a pas été arraché, des bulldozers continuent de déblayer les décombres des bâtiments détruits.

Beaucoup de gens restent debout, à l'entrée des abris, plutôt que de s'asseoir une surface mouillée.

"La tempête a eu un impact grave sur la population, des bâtiments se sont effondrés et une grande partie des infrastructures étant détruite, elles ne permettent plus d'absorber cet important volume de pluie", note Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile de Gaza.

Cette organisation, qui dispense des premiers secours sous l'autorité du Hamas, a affirmé que la tempête avait causé la mort d'une personne, écrasée par un mur ayant cédé. Elle a ajouté que ses équipes étaient intervenues après l'effondrement partiel de trois maisons durant les fortes pluies.

La Défense civile a averti les habitants restés dans des logements partiellement détruits ou fragilisés par les bombardements qu'ils se mettaient en danger.

"Les tentes, c'est inacceptable", estime M. Bassal, "ce qui doit être fourni maintenant, ce sont des abris qu'on peut déplacer, équipés de panneaux solaires, avec deux pièces, une salle de bain et toutes les installations nécessaires pour les habitants. Seulement à ce moment-là, la reconstruction pourra commencer".