En Russie, la légende intacte de Iouri Gagarine

L’astronaute Youri Gagarine, le 12 avril 1961 (Photo, AFP).
L’astronaute Youri Gagarine, le 12 avril 1961 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 07 avril 2021

En Russie, la légende intacte de Iouri Gagarine

  • L'immense popularité de Iouri Gagarine, 60 ans après son mythique vol spatial, reste un symbole central pour le Kremlin et sa politique de grandeur de la Russie
  • Un culte qui s'explique tout d'abord par le bond technologique qu'incarnent le cosmonaute et sa victoire à la régulière sur le rival américain

MOSCOU: Intacte. L'immense popularité de Iouri Gagarine, 60 ans après son mythique vol spatial, reste un symbole central pour le Kremlin et sa politique de grandeur de la Russie.

Chaque 12 avril, date de son envol réussi, les écoliers russes célèbrent la « Fête de la cosmonautique », ponctuée de lectures et de concerts. Et chaque année, des bouquets de fleurs sont déposés devant les nombreux monuments à la gloire de Gagarine, tandis que les médias racontent son épopée. 

« C'est une figure absolument consensuelle qui unit la Nation, un exemple très rare d'unanimité », note l'écrivain Lev Danilkine, qui lui a consacré une biographie.

Un culte qui s'explique tout d'abord par le bond technologique qu'incarnent le cosmonaute et sa victoire à la régulière sur le rival américain. Gagarine, c'est la destinée d'un homme qui a fait basculer l'Histoire.

« Il a fait passer l'être humain de simple être vivant à une forme d'intelligence allant au-delà de la Terre », résume l'historien Alexandre Jelezniakov. 

Décollage de la fusée Vostok-1, Iouri Gagarine à son bord, pour ce qui serait le premier vol humain dans l’espace, en avril 1961 (Photo, AFP).

Gagarine, fils d'un charpentier et d'une paysanne ayant subi l'occupation nazie, formé comme ouvrier-métallurgiste avant de devenir pilote, est donc l'incarnation du héros populaire.

Ce statut va de pair avec son grand sourire et son optimisme qui continuent de vivre à travers d’innombrables photographies, affiches, documentaires, vêtements, tatouages et souvenirs touristiques à son effigie.

S'y ajoutent les récits sur ses qualités humaines : camaraderie, courage et amour pour ses filles et sa femme, Valentina Gagarina, à qui il écrivit une lettre d'adieux poignante - longtemps gardée secrète - en cas de décès lors de sa mission :

« Si quelque chose tourne mal, je vous demande, à toi surtout, Valioucha, de ne pas mourir de chagrin. Car ainsi va la vie. »

En 2011, le cosmonaute Boris Volynov se souvenait d'un homme qui, jouissant de tous les privilèges, passait des heures au téléphone pour obtenir un médicament ou une place à l'hôpital pour un proche moins bien loti.

Du Spoutnik-1 au Spoutnik V: quelques prouesses scientifiques russes

Spoutnik et Gagarine

Son « bip bip » est le plus célèbre du monde. Le 4 octobre 1957, Spoutnik-1, sphère métallique agrémentée de quatre antennes, est placé en orbite autour de la Terre et l'URSS prend la tête de la course spatiale.

AK-47

Inventé en 1947 par l'ingénieur soviétique Mikhaïl Kalachnikov, le fusil d'assaut automatique Avtomat Kalachnikov 1947, AK-47 pour faire court, est l'arme la plus célèbre du monde. 

Peu coûteuse, extrêmement solide, simple et fiable, sous la neige comme dans le sable, elle a été adoptée par les armées, rébellions et gangs criminels du monde entier. Quelque 100 millions de Kalachnikovs seraient en circulation selon diverses ONG et études.   

Tetris

Le Tetris, casse-tête hautement addictif a été inventé en 1984 par le programmeur soviétique Alexeï Pajitnov, dont l'ambition proclamée était d'inventer des jeux pour rendre les gens heureux.

Dans ses différentes versions, Tetris garde son âme russe par sa musique, et certains graphismes incluant les bulbes de la cathédrale Saint-Basile sur la place Rouge de Moscou. 

Hypersonique

Selon Poutine, les scientifiques russes étaient parvenus en 2018 à construire des missiles supersoniques « Avangard », si rapides qu'aucun système de défense anti-missile ne peut leur résister. 

Ces nouveaux missiles apparaissent alors que Russes et Occidentaux sont engagés dans ce que certains considèrent comme une nouvelle course aux armements.  

Spoutnik V

L'invention en pleine pandémie du premier vaccin anti-Covid, le Spoutnik V, témoigne du message que Moscou veut envoyer au reste du monde : la Russie, honnie en Occident, est une superpuissance.

La fiabilité du produit a été établie dans les mois qui ont suivi. Près d'une soixantaine de pays l'ont homologué.

Propagande

Dès son retour sur Terre, Iouri Gagarine s'est retrouvé logiquement au cœur d'une intense propagande sur la supériorité du modèle soviétique, capable de transformer un plébéien en conquérant.

L'écrivain Lev Danilkine souligne qu'à ce titre une partie de l'intelligentsia anti-Kremlin considère Gagarine comme un « rouage de la gigantesque machine de violence » de l'URSS.

Car son exploit a servi à « inculquer à la population » que les victimes des répressions soviétiques et du Goulag « ne l'avaient pas été en vain », relève-t-il. 

Selon lui, le pouvoir de Vladimir Poutine entretient cette logique pour faire de la Russie d'aujourd'hui l'héritière des triomphes du passé.

« Le pouvoir actuel s'approprie méthodiquement les cultes populaires : d'abord celui de la victoire pendant la Seconde guerre mondiale, puis celui de la conquête de l'espace et de Gagarine », soutient l'écrivain, indiquant que l'Etat combat parallèlement toutes « interprétations alternatives » de ces événements.

La popularité de Gagarine était déjà immense de son vivant (Photo, AFP).

Cela étant, les Russes sont conscients que l'Union soviétique a finalement perdu la course vers l'espace après la conquête de la Lune par les Américains. Mais la vénération de Gagarine permet de « neutraliser » cette amertume, estime Lev Danilkine.

Comme tous les grands héros russes, notamment son égal en termes de prestige, le poète Alexandre Pouchkine, Iouri Gagarine est aussi un symbole tragique.

Sa mort à 34 ans, lors d'un vol à bord d'un avion d'entraînement en 1968, reste mystérieuse car les autorités n'ont jamais publié le rapport d'enquête complet sur les causes de l'accident.

Selon des archives partielles du Kremlin, la version « probable » du drame est une collision de son appareil avec un ballon météo.

Mais en l'absence de transparence, de nombreuses théories continuent à circuler. La plus connue veut que Iouri Gagarine ait été ivre aux commandes. D'autres affirment même qu'il a été éliminé par le Kremlin qui se sentait menacé par sa popularité.

Quoi qu'il en soit, sa mort reste un choc pour beaucoup de Russes. 

« Comment le premier cosmonaute, un homme aussi jeune et gentil, a-t-il pu mourir comme ça d'un coup ? », se demande l'historien Alexandre Jelezniakov. « En fait, les gens essayent encore de s'en remettre ».  


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.