RIYAD: Dans un monde plus connecté et mondialisé que jamais, le potentiel de propagation des maladies augmente ainsi que le risque de voir des épidémies se transformer en pandémies.
Paula Moraga est professeure adjointe de statistiques à l’université des sciences et technologies du roi Abdallah (Kaust) et chercheuse principale au sein du groupe de recherche GeoHealth. Son travail novateur dans le développement de la technologie des données pour la surveillance des maladies a pour but de détecter les épidémies de maladies infectieuses et il lui a permis de mettre au point une méthode efficace.
Son système de surveillance a récemment remporté le prix Letten 2023, qui récompense les jeunes chercheurs. Cette récompense a été créée en 2018 dans le cadre d’une collaboration entre la fondation Letten, instaurée en 1986 par le professeur Letten F. Saugstad et la Young Academy of Norway afin de mettre en lumière les contributions de jeunes scientifiques qui œuvrent à résoudre des problèmes mondiaux urgents.
«Le professeur Letten F. Saugstad, de Norvège, estime que la santé, l’environnement et l’égalité sont la clé d’un avenir meilleur pour tous. Recevoir un prix en hommage à sa mémoire est un privilège merveilleux», confie la lauréate.
Les gens s’intéressent désormais davantage à la surveillance des maladies et plaident pour une amélioration mondiale de la santé publique depuis la pandémie de Covid-19.
Elle ajoute: «Nous vivons dans un monde interactif. La santé humaine est liée à la santé animale et à l’environnement. Par ailleurs, les activités humaines et le développement sont à l’origine de l’émergence de nouvelles maladies infectieuses.»
L’université des sciences et technologies du roi Abdallah est l’un des meilleurs établissements du monde puisqu’elle met à votre disposition de nombreuses ressources et un soutien qui vous permettent d’atteindre votre plein potentiel et de faire la différence. C’est un environnement très stimulant.
Paula Moraga, professeure adjointe et chercheuse
«Les maladies qui surviennent généralement dans les régions tropicales et subtropicales du monde se propagent maintenant dans de nouvelles régions.»
La chercheuse développe un système de surveillance des maladies pour aider à la détection précoce des épidémies et améliorer la prise de décision en matière de santé publique.
Les systèmes de surveillance traditionnels ont des limites. Paula Moraga explique ainsi que l’information est retardée entre le moment où une personne tombe malade, celui où elle décide de consulter un professionnel de la santé, de faire une analyse au laboratoire, et celui où l’information est finalement ajoutée au système.
La méthode de Mme Moraga permet d’avoir accès aux données des réseaux sociaux, par exemple lorsque les gens discutent de ce qu’ils ressentent ou recherchent sur Google des traitements pour leurs maladies.
«Cette information n’est pas produite pour la recherche épidémiologique, mais nous pouvons l’utiliser pour comprendre les niveaux d’activité en temps réel», explique-t-elle.
Le système a également accès à la température, à l’humidité et aux précipitations, qui sont utiles pour la détection précoce des épidémies.
Il combine des données qui proviennent de plusieurs sources, y compris des informations officielles liées aux maladies, à l’environnement et au numérique, pour produire des prévisions probabilistes locales.
Elle précise que son système comprend un logiciel qui propose des rapports de visualisation interactifs destinés à alerter les responsables de la santé publique lorsqu’on prévoit des taux élevés de maladie, aider les décideurs à allouer des ressources dans les domaines qui en ont le plus besoin et concevoir des stratégies pour aider à contrôler les maladies.
Paula Moraga travaille à l’université depuis trois ans. «Je suis très heureuse. C’est l’un des meilleurs établissements du monde puisqu’elle met à votre disposition de nombreuses ressources et un soutien qui vous permettent d’atteindre votre plein potentiel et de faire la différence. C’est un environnement très stimulant», affirme-t-elle.
Son travail en tant que chercheuse principale consiste à diriger un groupe d’étudiants et de postdoctorants qui travaillent sur la méthodologie statistique et le développement de logiciels libres pour résoudre des problèmes de santé publique.
Elle a travaillé sur des méthodes pour comprendre les schémas spatiaux et spatiotemporels des maladies, comme le paludisme en Afrique. En outre, elle s’est penchée sur des progiciels de détection des foyers, de cartographie des maladies et d’évaluation des risques de voyage relatifs à leur propagation.
«Les progiciels que nous avons développés sont utilisés par de nombreux chercheurs dans le monde, y compris les responsables de la santé publique au Canada pour la cartographie du cancer», révèle-t-elle.
Comme la plupart des jeunes diplômés, la chercheuse n’était pas certaine du parcours professionnel qu’elle voulait suivre, mais sa passion et son intérêt pour les mathématiques l’ont menée là où elle est aujourd’hui.
«Quand j’ai commencé à étudier les mathématiques à l’université, je n’aimais pas ça autant qu’au lycée parce que c’était très théorique et je voulais davantage de pratique», se souvient-elle.
«Ensuite, j’ai découvert d’autres cours comme la programmation statistique. J’ai pris conscience du fait que grâce aux statistiques, vous pouviez analyser des données et obtenir des informations à partir d’informations qui pouvaient être utiles pour prendre des décisions et améliorer la société.»
Après avoir obtenu son diplôme en mathématiques, elle a travaillé pendant un certain temps sur le développement d’algorithmes avant de suivre des études en statistiques et de décrocher un doctorat.
Paula Moraga a ensuite travaillé sur le cancer en Espagne afin de créer des cartes des différents types de la maladie. Elle aimait appliquer les mathématiques à des problèmes, mais ressentait le besoin d’acquérir des compétences supplémentaires.
«Quand j’ai étudié les caractéristiques du cancer, j’ai compris que je n’avais pas assez de connaissances sur les concepts épidémiologiques et la biostatistique. J’ai alors postulé pour une maîtrise en biostatistique à Harvard.»
Depuis, elle est associée à plusieurs projets liés au cancer et aux maladies infectieuses. C’est une figure influente dans le domaine de la surveillance des maladies.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com