PARIS: Pap Ndiaye, tout juste évincé du ministère de l'Education nationale, sera désormais l'ambassadeur représentant la France auprès du Conseil de l'Europe, défendant une nomination "en droite ligne" avec ses "engagements de toujours" pour les droits de l'homme.
Moins d'une semaine après son départ très commenté de la rue de Grenelle, M. Ndiaye rebondit donc à Strasbourg. Une annonce surprise, entérinée mercredi matin en Conseil des ministres et officialisée discrètement en avant-dernière page du traditionnel compte-rendu envoyé par l'Elysée.
Remplacé par le jeune Gabriel Attal au ministère, où il n'est resté que 14 mois, M. Ndiaye, universitaire âgé de 57 ans, assure auprès de l'AFP qu'il s'agit d'une "nomination en droite ligne avec (s)es engagements de toujours".
"Je travaille depuis longtemps sur les questions de racisme et de discrimination. Et dans mes fonctions de ministre de l'Education nationale, j'ai aussi prêté grande attention à cela", assure-t-il.
L'arrivée au ministère de l'Education de ce spécialiste de l'histoire sociale des Etats-Unis et des minorités avait constituée l'un des principaux paris politiques du début du second quinquennat d'Emmanuel Macron. Mais faute d'expérience politique, il n'avait jamais vraiment réussi à s'extraire de l'ombre d'un président omniprésent sur la thématique de l'école.
«Homme de conviction»
M. Ndiaye, qui fut également directeur du Musée de l'histoire de l'immigration à Paris, veut ainsi battre en brèche l'idée que cette nomination serait un recasage de complaisance, après avoir été précocément débarqué du gouvernement. Ni même une manière pour l'exécutif de tempérer sa supposée amertume, après avoir essuyé des salves sur son action au sein même du camp macroniste: "Ce n'est pas de mon silence dont il s'agit", assure-t-il.
"J'ai toujours été un homme libre et j'ai toujours veillé à pouvoir exprimer ma pensée. On ne peut pas me considérer comme quelqu'un qui se tairait. Je reste un homme de conviction", martèle-t-il. Rappelant au passage ses récentes prises de position contre la branche média du groupe Bolloré, en particulier CNews qu'il a qualifiée, mi-juillet, de chaîne "d'extrême droite", propos pour lesquels il a reçu un soutien pour le moins timoré de l'exécutif.
A droite, l'annonce de l'envoi de M. Ndiaye à Strasbourg a immédiatement suscité une levée de boucliers, Les Républicains exhortant Emmanuel Macron à renoncer à cette nomination. "M. Ndiaye a été démis de ses fonctions ministérielles la semaine dernière pour incompétence. Est-ce l'intérêt de l'Etat de le nommer ambassadeur", s'interroge le parti d'Eric Ciotti dans un communiqué.
M. Ndiaye prendra ses fonctions à Strasbourg à partir du 1er août, au sein de cette organisation qui s'assure de la défense des droits de l'homme en Europe.
Il succède à Marie Fontanel, en poste depuis le 1er septembre 2020: cette ancienne conseillère d'Emmanuel Macron à l'Elysée doit s'envoler pour les Philippines où elle a été nommée ambassadrice.
La France fait partie des 46 Etats membres du Conseil de l'Europe. L'ambassadeur représentant la France siège chaque semaine au sein du "Comité des ministres" du Conseil, dont la fonction essentielle est d'assurer l'exécution par les Etats membres des arrêts et de certaines décisions de la Cour européenne des droits de l'homme.
"C'est un poste très important car les questions relatives aux droits de l'homme interpellent tous les pays, y compris la France", récemment épinglée pour des sujets de violences policières ou pour le traitement des personnes handicapées, souligne M. Ndiaye.
Mais il s'est aussi dit particulièrement intéressé par les travaux de l'Observatoire de l'enseignement de l'histoire en Europe, dépendant du Conseil de l'Europe et dirigé par l'ancien ministre français Alain Lamassoure.