BEYROUTH: La municipalité de Beyrouth utilise l'électricité fournie par les propriétaires de générateurs privés pour rétablir l'éclairage des rues de la ville plongées dans l'obscurité en raison de la crise économique qui paralyse le Liban.
L'éclairage des rues a été rétabli au cœur de la capitale mardi soir, après l’avertissement d'un chef d'entreprise qui a qualifié la capitale de «ville fantôme».
«Beyrouth aime la lumière et restera dans la lumière», a déclaré Bassam Mawlawi, le ministre de l'Intérieur, en réponse à cette initiative.
«L'éclairage de Beyrouth contribue à stabiliser la sécurité et aide les services de sécurité à mieux faire leur travail.»
La distribution d'électricité au Liban est devenue de plus en plus irrégulière au cours des trois dernières années en raison de la crise économique et financière que traverse le pays.
Ces derniers mois, l'alimentation en électricité a été limitée à trois ou quatre heures sur une période de vingt-quatre heures, ce qui a pratiquement vidé les rues du centre de Beyrouth, ainsi que ses magasins, ses restaurants et ses cafés.
Les passants sont également exposés au danger en raison de l'augmentation des vols et des braquages dans le contexte de la récession économique.
Nicolas Chammas, directeur de l'Association des commerçants de Beyrouth, déclare à Arab News: «Le centre-ville de Beyrouth a été touché par l'effondrement économique, la pandémie et l'explosion du port de Beyrouth, qui l'ont transformé en ville fantôme.»
Selon lui, l'initiative visant à rétablir l'éclairage dans les rues de la ville est une «très bonne chose» et montre que Beyrouth n'a pas été abandonnée, même si l'État manque à ses devoirs.
«Cette initiative a également une portée symbolique qui aura des répercussions dans toutes les régions, car les personnes qui ont abandonné le cœur de la ville reviendront, et les propriétaires de restaurants, de cafés et de magasins seront encouragés à réinvestir dans le quartier», précise M. Chammas.
Le gouverneur de Beyrouth, Marwan Abboud, a publié un communiqué en mars 2023 demandant à tous les propriétaires de générateurs électriques privés dans la ville d'éclairer les rues entourant les endroits où les générateurs sont concentrés.
M. Abboud a déclaré que les propriétaires de générateurs privés utilisaient les poteaux électriques de l'État pour s'approvisionner et qu'en retour, ils devaient assurer l'éclairage des rues, car il s’agit d’une «responsabilité nationale pour préserver les droits des résidents de Beyrouth et les droits de la municipalité, sur la base des nécessités de l'intérêt public et des exigences de la sécurité publique».
Selon Nicolas Chammas, seuls 20 % des institutions et des commerces du centre-ville de Beyrouth sont actuellement en activité, tandis que nombre d'autres ont quitté la zone, en particulier après l'explosion du port il y a trois ans.
Le propriétaire d'une boutique abandonnée dans le centre-ville estime que le réaménagement du lieu en restaurant de luxe coûterait plus d'un million de dollars (1 dollar = 0,89 euro).
«Tant que nous ne sommes pas sûrs que la ville s'est redressée et que nous pouvons lui faire confiance, ni moi ni personne d'autre ne fera d'investissement coûteux», précise-t-il.
Les signes de décrépitude au cœur de la capitale ne se limitent pas aux rues sombres.
Un fonctionnaire de la municipalité, qui a préféré garder l'anonymat, raconte: «L'état de la municipalité est déplorable. C'était la municipalité la plus riche du Liban, mais aujourd'hui elle ne peut attirer aucun entrepreneur pour réparer les nids-de-poule ou effacer les slogans et insultes écrits par les manifestants sur les murs, parce que l'État traite en livres libanaises, qui ont perdu de leur valeur, et non en dollars.»
Les contrats d'entretien de l'éclairage, des routes et des feux de signalisation n'ont pas été renouvelés depuis des années. La municipalité de Beyrouth avait déjà annoncé un appel d'offres pour un projet d'entretien de l'éclairage des rues et des tunnels de Beyrouth, mais il est resté lettre morte.
Par conséquent, selon la source, «les contrats ne sont plus rentables en raison de l'impossibilité d'importer les matières premières nécessaires en dollars et de l'incapacité de la municipalité à payer autrement qu'en monnaie locale. Si nous voulons payer les coûts selon le taux de change du marché, il ne restera plus d'argent dans la trésorerie de la municipalité.»
Dans le même temps, les voleurs s'emparent des plaques d'égout et même des câbles électriques et des fils de cuivre, ce qui accroît la pression sur les infrastructures de la ville.
Le rôle du secteur privé dans le réaménagement des rues de Beyrouth s'est déjà étendu à d'autres quartiers.
Dans le cadre de l'initiative «Light Your Street», l'université arabe de Beyrouth éclaire les zones autour de son campus en coopération avec l'association Rebirth Beirut et la société Medco, sous le slogan «From Our Energy to Our Region» («De notre énergie à notre région»).
La fondation à but non lucratif Makhzoumi contribue à l'éclairage de nombreuses rues principales de Beyrouth grâce à l'énergie solaire.
Selon M. Chammas, le secteur touristique libanais a prospéré cet été grâce aux expatriés et aux touristes égyptiens, irakiens et jordaniens.
Cependant, le nombre de visiteurs en provenance du Golfe reste faible, car les touristes ne fréquentent plus le centre-ville de Beyrouth comme auparavant et se tournent vers d'autres attractions au Liban.
Le Forum de la jeunesse arabe pour l'autonomisation économique et sociale est inauguré aujourd’hui à Beyrouth. Il s'agit de la première activité arabe organisée dans la capitale cette année.