New Delhi, Inde : Au moment où l'Inde est devenue le pays le plus peuplé du monde, cinq jeunes mères ou futures mamans indiennes ont fait part à l'AFP de leurs aspirations et de leurs craintes pour l'avenir de leurs enfants.
La croissance économique phénoménale de ces dernières décennies en Inde a eu un impact sur les familles, tel qu'une Indienne ne donne désormais naissance qu'à deux enfants en moyenne, contre six en 1960.
Mais la question des ressources nécessaires au pays pour satisfaire son immense population risque de devenir de plus en plus préoccupante au cours des prochaines décennies.
- Pas plus de trois enfants -
Sita Devi, mariée et mère de deux filles à 22 ans, est à nouveau enceinte et espère que son prochain enfant sera cette fois un garçon.
«Nous étions cinq soeurs et notre père était le seul à gagner de l'argent», se souvient Sita Devi dans son village du Bihar, l'Etat le plus pauvre de l'Inde, qu'elle n'a jamais quitté.
«Pauvre, à la tête d'une grande famille, il ne pouvait pas nous nourrir, nous vêtir ou nous éduquer», poursuit-elle, confiant être analphabète.
Son mari ouvrier gagne un maigre salaire. Elle passe ses journées à s'occuper de ses filles de deux et quatre ans et des tâches ménagères. La plupart de ses voisins ont entre trois et cinq enfants.
Mais la jeune femme est déterminée à n'avoir pas plus de trois enfants et à se faire stériliser, première méthode contraceptive de l'Inde patriarcale.
«Cette fois, que j'aie un garçon ou une autre fille, je me ferai opérer», affirme-t-elle.
«J'espère que nous pourrons apporter à nos enfants l'enseignement et l'éducation pour qu'ils prospèrent et vivent bien.»
- «Pas encore de maison» -
La centaine d'invités de Shobha Talwar pour le baptême de son petit garçon affluent, se régalent de biryani au poulet, de galettes et de sucreries. Sa soeur aînée murmure à son oreille «Shreyansh». C'est le nom de son premier enfant, âgé d'un mois à peine. Aussitôt son prénom ainsi prononcé, l'enfant est couvert de cadeaux par les femmes qui chantent autour de son berceau.
«Nous allons être confrontés à de nombreuses difficultés. Nous n'avons pas encore de maison et nous devons penser à la scolarisation de notre enfant», s'inquiète la jeune maman de 29 ans.
Le nouveau-né rejoint la maison familiale de Goa, qui abrite ses grands-parents, ses parents, son oncle, ses deux tantes et ses deux cousins.
«J'ai un garçon. Cela me rend heureux», déclare Siddapa Talwar, le père de l'enfant, désormais libéré de la pression sociale d'avoir un fils.
«Je ne m'inquiète pas pour son avenir», poursuit le jeune homme de 30 ans, qui tient un commerce de blocs de glace avec son père et son frère, «tant qu'il aura un toit au-dessus de la tête et que l'on s'occupera de lui, tout ira bien».
- «Gentille petite poupée» -
En Inde, une fille est généralement perçue comme un fardeau coûteux en raison de la dot que ses parents sont censés verser pour son mariage à la belle-famille.
Mais dans l'Etat montagneux de l'Himachal Pradesh (nord), Indu Sharma, qui à 25 ans attend son premier enfant, assure qu'elle sera heureuse quel que soit son sexe.
«En fait, mon mari veut une fille, une gentille petite poupée», dit-elle, en s'installant dans un fauteuil de sa grande maison de deux étages, au retour d'un examen prénatal, avant d'ajouter : «la société change».
«Chez moi, nous sommes trois sœurs. Cela n'a jamais tracassé mon père de ne pas avoir de fils», poursuit-elle, «il nous a élevées avec amour. Donc pas de pression pour mettre au monde un fils. Tout le monde sera heureux avec une fille».
Et puis, selon elle, les Indiens devraient faire moins d'enfants, arguant qu'«une petite famille est une famille heureuse».
- «Aucune disparité» -
Ecrivaine et journaliste, Shreyosi, 30 ans, était mariée depuis cinq ans, quand elle est tombée enceinte. Donner naissance à Aarya en mars a été pour elle «l'un des plus beaux voyages».
Cela «venait de mon sang, ma sueur, mes larmes», confie Shreyosi, dans sa maison de Bangalore.
Inquiète de la surpopulation et de ses conséquences, notamment pour le changement climatique, elle estime qu'«une restriction du nombre d'enfants» devrait être imposée.
Aussi, la trentenaire n'envisage pas de deuxième enfant à moins que sa «fille ait besoin d'un frère ou d'une soeur».
«Mais je devrai veiller à ce que mes deux enfants soient élevés de la même manière (...) Il ne doit y avoir aucune disparité».
- «Très bons parents»-
Parés de guirlandes de fleurs dans une salle de banquet à Madras, Saranya Narayanaswamy et son mari Sanjay livrent des offrandes de pétales et de noix de coco au bénéfice de leur enfant à naître lors d'un rituel hindou.
Amis et parents chantent autour d'un feu cérémoniel destiné à assurer le bien-être du bébé, explique Saranya, informaticienne dans l'Etat du Tamil Nadu (sud).
«Les sons, la fumée qui s'échappe du feu, tout est censé être bon pour le bébé et la future maman», dit-elle, heureuse de l'arrivée imminente de son premier enfant mais nerveuse face aux défis qui l'attendent.
«Nous espérons garantir que le bébé soit bien élevé», dit-elle, «nous voulons être de très bons parents».