Balkans: le changement climatique menace l'un des lacs les plus anciens d'Europe

Un pêcheur fait avancer son bateau sur le lac Prespa dans le village de Slivnica, près de Resen, en Macédoine du Nord, le 17 mars 2023. (AFP).
Un pêcheur fait avancer son bateau sur le lac Prespa dans le village de Slivnica, près de Resen, en Macédoine du Nord, le 17 mars 2023. (AFP).
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Publié le Samedi 22 avril 2023

Balkans: le changement climatique menace l'un des lacs les plus anciens d'Europe

  • A la frontière entre l'Albanie, la Macédoine du Nord et la Grèce, le lac Prespa, l'un des plus anciens d'Europe, abrite des milliers d'espèces végétales et animales dépendantes de ses eaux et son écosystème
  • Mais la hausse des températures a bouleversé le rythme des précipitations, asséchant les rivières et cours d'eaux vitaux pour l'alimentation du Prespa

RESEN : Encerclé par des sommets enneigés, bordé de vergers de pommes, un magnifique lac préhistorique du sud-est de l'Europe rétrécit presque à vue d'oeil, victime du changement climatique et de la pollution.

A la frontière entre l'Albanie, la Macédoine du Nord et la Grèce, le lac Prespa, l'un des plus anciens d'Europe, abrite des milliers d'espèces végétales et animales dépendantes de ses eaux et son écosystème.

Mais la hausse des températures a bouleversé le rythme des précipitations, asséchant les rivières et cours d'eaux vitaux pour l'alimentation du Prespa.

La baisse de la pluviométrie et des chutes de neige a provoqué le rétrécissement du lac, dont les rives ont par endroit reculé de trois kilomètres, selon des gardes chargés de surveiller une aire protégée créée par la Macédoine du Nord dans la région.

"Avant, on avait beaucoup plus de neige, un mètre ou un mètre et demi, mais ces dernières années, on n'a quasiment plus de neige", constate l'un de ces gardes, Goran Stojanovski, 38 ans, qui exerce son métier depuis une décennie.

Les spécialistes confirment la tendance constatée empiriquement par les habitants de génération en génération, détaillant les multiples manières dont le changement climatique conduit au rétrécissement du lac.

Selon une étude citée par la Nasa, le lac Prespa a perdu 7% de sa surface et la moitié de son volume entre 1984 et 2020.

"Les variations relevées sur les niveaux du lac sont liées au changement climatique", déclare à l'AFP Spase Shumka, professeur à l'Université agricole de Tirana, en Albanie.

«Action conjointe»

Il cite entre autres la hausse des températures qui accroît l'évaporation de l'eau, la baisse des précipitations annuelles et l'utilisation de l'eau pour l'agriculture.

"Vu la localisation du lac, la seule solution est une action conjointe" des autorités en Macédoine du Nord, Albanie et Grèce, souligne-t-il.

La pollution par les ruissellements agricoles provenant des vergers qui s'étalent à perte de vue ne font qu'ajouter au problème, via le phénomène d'eutrophisation qui favorise la croissance d'algues et appauvrit l'écosystème aquatique.

"Le lac a subi une pollution intensive durant des décennies", dit à l'AFP Zlatko Levkov, biologiste à l'université Saints-Cyrille-et-Méthode à Skopje. "Tout simplement, l'habitat de nombreuses espèces pourrait changer complètement et la population de ces espèces décroître, et potentiellement s'éteindre".

Les études divergent sur l'âge du lac, certains scientifiques expliquant qu'il a été formé il y a un million d'années, d'autres cinq millions. En tout cas, il abrite avec ses alentours quelque 2 000 espèces de poissons, d'oiseaux, de mammifères et de plantes.

Si Prespa devait se dégrader davantage, le non moins sublime lac Ohrid situé à peine dix kilomètres à l'ouest pourrait également essuyer les plâtres, préviennent les experts.

Ohrid, situé à une altitude inférieure, dépend en partie des eaux souterraines venant du lac Prespa en surplomb pour se maintenir.

Le lac Ohrid, menacé par la pollution et l'urbanisation sauvage, a failli voici deux ans perdre sa place sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité de l'Unesco et être rétrogradé dans la catégorie sites "en danger".

«Conserver la beauté»

Selon un rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), les agriculteurs locaux se servent d'environ 65 tonnes de pesticides chaque année, et Prespa est directement affecté par les ruissellements chimiques.

Ces pesticides et fertilisants sont largement utilisés dans les vergers qui abondent dans la partie de la zone située en Macédoine du Nord, des pommiers qui représentent environ 70% de l'activité économique locale.

"Le déversement de déchets biodégradables et la surutilisation de fertilisants et de pesticides" provoque le développement rapide d'algues et autres végétaux invasifs qui mettent en danger les espèces endémiques, ajoute le PNUD.

De multiples initiatives ont été lancées pour mieux gérer le secteur agricole.

Par exemple, huit stations météréologiques ont été construites afin d'optimiser l'usage des pesticides, permettant une réduction de 30% de leur utilisation.

"En diminuant les traitements, nous avons plus de bénéfices économiques et nous améliorons la protection de l'environnement", dit à l'AFP Frosina Gjorgjievska, agricultrice de 56 ans qui vit à Resen, localité de Macédoine du Nord.

Mais les spécialistes jugent qu'il faut en faire davantage pour protéger le lac, et pour commencer, mieux appliquer des accords signés par la Macédoine du Nord, la Grèce et l'Albanie en 2012.

Les défenseurs de l'environnement demandent aux fermiers de se mettre à l'agriculture biologique et aux autorités d'investir dans le tourisme durable.

"Nous voulons conserver l'authenticité de Prespa, sa beauté, tout en continuant à en bénéficier", dit à l'AFP l'écologiste Marija Eftimovska, 42 ans.


Israël devant la CIJ pour se défendre d'accusations de « génocide »

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
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  • Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah
  • Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante"

LA HAYE: Israël va répondre vendredi devant la plus haute juridiction de l'ONU aux allégations de l'Afrique du Sud selon lesquelles il aurait intensifié une campagne "génocidaire" avec son opération militaire à Rafah.

Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, essentielle selon Israël pour éliminer les militants du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante".

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui a juré d'anéantir le Hamas, est déterminé à lancer une offensive terrestre d'envergure à Rafah, où sont retranchés selon lui les derniers bataillons du mouvement islamiste palestinien.

Israël a annoncé jeudi que son armée allait "intensifier" ses opérations au sol à Rafah, malgré les mises en garde internationales contre une offensive d'envergure dans cette ville surpeuplée du territoire palestinien.

Les avocats de Pretoria ont déclaré jeudi devant la CIJ que "le génocide" commis par Israël "a atteint un niveau horrible", évoquant notamment des fosses communes, des actes de torture et un blocage de l'aide humanitaire.

"L’Afrique du Sud avait espéré, lors de notre dernière comparution devant cette cour, mettre un terme à ce processus génocidaire afin de préserver la Palestine et son peuple", a déclaré Vusimuzi Madonsela, le représentant de Pretoria.

"Au lieu de cela, le génocide d'Israël s’est poursuivi à un rythme soutenu et vient d’atteindre un nouveau et horrible niveau", a-t-il ajouté.

Nouvelles mesures 

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza.

Mais la cour n'est pas allée jusqu'à ordonner un cessez-le-feu. Or pour Pretoria, l'évolution de la situation sur le terrain – notamment l'opération à Rafah – nécessite une nouvelle ordonnance de la CIJ.

L'opération israélienne à Rafah "est la dernière étape de la destruction de Gaza et de son peuple palestinien", a déclaré Vaughan Lowe, un avocat de l'Afrique du Sud.

"C'est Rafah qui a amené l'Afrique du Sud devant la cour. Mais ce sont tous les Palestiniens en tant que groupe national, ethnique et racial qui ont besoin de la protection contre le génocide que la cour peut ordonner", a-t-il ajouté.

Les ordonnances de la CIJ, qui tranche les différends entre Etats, sont juridiquement contraignantes mais elle n'a aucun moyen de les faire respecter.

Pretoria demande à la CIJ trois nouvelles mesures d'urgence en attendant qu'elle se prononce sur le fond de l'affaire, l'accusation selon laquelle Israël viole la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948.

L'Afrique du Sud souhaite que la cour ordonne à Israël de cesser "immédiatement" toutes les opérations militaires à Gaza, y compris à Rafah, de permettre l'accès humanitaire et de rendre compte des mesures prises dans l'exécution de ces ordonnances.


Plus d'un tiers des zones humides de Méditerranée menacées par la montée des eaux

Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
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  • Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux,
  • Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris"

PARIS: Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique.

Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux, plus de la moitié d'entre elles dans le monde pourraient disparaître sous les eaux d'ici 2100, ont déjà montré de précédentes études.

Cette nouvelle étude, parue dans la revue Conservation Biology, a modélisé les futurs risques de submersion en fonction des différents scénarios du Giec (le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU) sur 938 sites côtiers du pourtour méditerranéen.

Elle révèle que 34,4% de ces sites, soit 320 zones humides côtières, sont menacées de disparition d'ici à 2100 par la hausse du niveau de la mer, même dans les scénarios climatiques les plus optimistes (avec un réchauffement de +1,8 degré).

Dans les scénarios pessimistes (jusqu'à +4,4 degrés), ce chiffre pourrait monter à 495, soit plus de la moitié.

Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris", indique un communiqué du Museum national d'histoire naturelle, qui a participé à l'étude avec l'Institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes de la Tour du Valat.

Parmi ces zones menacées, figurent entre 54,1% et 60,7% de sites d'importance internationale pour les oiseaux d'eau, comme les flamants roses, les avocettes élégantes ou le canard chipeau, notamment lors de la période d'hivernage ou de nidification. Ces oiseaux ne disposant pas d'habitat alternatif, ces menaces pourraient "affecter négativement" leur nombre et les écosystèmes qui y sont associés.

"Ces chiffres sont sans doute sous-estimés", notent les auteurs de l'étude, soulignant que de nombreuses zones côtières, notamment en Espagne, n'ont pas été incluses et que d'autres menaces (érosion côtière, salinisation, surtourisme...) n'ont pas été prises en compte.

Pour toutes ces raisons, ils recommandent "la mise en place urgente de mesures d'adaptation" dans ces sites, comme la construction de digues mais surtout, plus efficaces à long terme, la mise en place de solutions fondées sur la nature (fixation de dunes avec de la végétation) ou encore une extension des aires protégées pour lutter notamment contre une urbanisation non maitrisée.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
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  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.