PEKIN : La Chine annoncera mardi sa croissance pour 2022, qui devrait être l'une des plus faibles en quatre décennies, en raison des crises sanitaire et immobilière qui pénalisent lourdement l'activité.
Un groupe de 10 experts interrogés par l'AFP table en moyenne sur une hausse de 2,7% sur un an du produit intérieur brut (PIB) de la deuxième économie mondiale.
Il s'agirait de son rythme le plus lent depuis la contraction de 1976 (-1,6%), si l'on exclut 2020, première année de la pandémie (+2,3%).
L'an dernier, le PIB de la Chine avait progressé de plus de 8%. Pékin s'était fixé pour 2022 une croissance d'environ 5,5%.
Mais cet objectif a été mis à mal par la stricte politique sanitaire dite du "zéro Covid", qui a été durant l'essentiel de l'année un frein à l'activité et à la consommation.
Cette stratégie coûteuse reposait sur des tests de dépistage généralisés et quasi obligatoires pour la population, ainsi que le placement en quarantaine des personnes testées positives.
Ces mesures entraînaient fréquemment la fermeture d'usines et d'entreprises, ce qui a pesé sur l'activité, les déplacements et les chaînes d'approvisionnement, mais aussi découragé la consommation.
Face à l'exaspération de la population, la Chine a levé en décembre sans préavis ces restrictions. L'activité peine malgré tout à redémarrer depuis, en raison d'une explosion du nombre de malades du Covid.
Moteurs en panne
La Chine dévoilera également mardi son chiffre de la croissance pour le dernier trimestre 2022, avec une série d'autres indicateurs.
Il sera "à n'en pas douter" inférieur à celui du troisième trimestre (+3,9%) en raison de la "propagation rapide du virus" en décembre, après la levée des restrictions sanitaires, prévient Teeuwe Mevissen, analyste chez RaboBank.
D'autant que les "trois moteurs de l'économie chinoise" étaient à la peine au quatrième trimestre, souligne à l'AFP l'économiste Zhang Ming, de l'Académie chinoise des sciences sociales à Pékin.
Les exportations de la Chine ont connu en décembre leur plus gros plongeon depuis le début de la pandémie (-9,9% sur un an), tandis que la consommation a été dans le rouge en novembre et les investissements se sont tassés.
Par ailleurs, "les problèmes de l'immobilier continuent de peser sur la croissance", souligne M. Mevissen.
Ce secteur, qui représente avec la construction plus du quart du PIB du pays, est en souffrance depuis des mesures adoptées par Pékin en 2020 pour réduire l'endettement.
Ce durcissement réglementaire avait marqué le début des soucis financiers d'Evergrande, l'ex numéro un chinois de l'immobilier aujourd'hui étranglé par une ardoise abyssale.
Les ventes immobilières s'affichent depuis en repli dans de nombreuses villes et beaucoup de promoteurs luttent pour leur survie.
«Le pire est derrière»
Pour relancer un secteur essentiel de l'économie, le pouvoir semble adopter ces dernières semaines une approche plus conciliante. Des mesures de soutien au crédit pour les promoteurs ont notamment été annoncées.
Après trois ans de restrictions sanitaires, "la réouverture en Chine est en cours", relève l'analyste Jing Liu, de la banque HSBC.
"Mais cette phase de transition sera tortueuse" avec un risque de nouveaux rebonds épidémiques, prévient Mme Liu, n'excluant pas "à court terme" un nouveau ralentissement de la croissance.
"2023 sera l'année du retour aux certitudes" après des confinements inopinés durant l'épidémie qui ont déstabilisé l'économie, estime l'économiste indépendant Larry Yang.
Cette année, la Chine devrait voir son PIB rebondir à 4,3%, selon des prévisions de la Banque mondiale toutefois revues à la baisse le mois dernier.
Le groupe d'experts interrogés par l'AFP table pour sa part sur 5%.
Désormais, "le pire est derrière" nous, veut croire M. Yang.