Climat: l'UE adopte une «taxe carbone» à ses frontières

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors d'une réunion avec les responsables des sites industriels pour réduire les émissions carbone en France, à l'Elysée à Paris le 8 novembre 2022. (Photo de MOHAMMED BADRA / POOL / AFP)
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours lors d'une réunion avec les responsables des sites industriels pour réduire les émissions carbone en France, à l'Elysée à Paris le 8 novembre 2022. (Photo de MOHAMMED BADRA / POOL / AFP)
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Publié le Mardi 13 décembre 2022

Climat: l'UE adopte une «taxe carbone» à ses frontières

  • En pratique, l'importateur devra déclarer les émissions liées au processus de production, et si celles-ci dépassent le standard européen, acquérir un «certificat d'émission» au prix du CO2 dans l'UE
  • Le mécanisme, administré pour l'essentiel de façon centralisée au niveau de l'UE, visera les secteurs jugés les plus polluants (acier, aluminium, ciment, engrais, électricité), comme le proposait la Commission européenne

BRUXELLES: Verdir les importations industrielles en faisant payer les émissions carbones liées à leur production: l'UE a adopté mardi un mécanisme inédit à ses frontières, qui doit aussi signer la fin des "droits à polluer" gratuits alloués aux industriels européens.

Appelé communément "taxe carbone aux frontières" bien qu'il ne s'agisse pas d'une taxe proprement dite, ce dispositif sans précédent consistera à appliquer aux importations des Vingt-Sept les critères du marché du carbone européen, où les industriels de l'UE sont tenus d'acheter des quotas couvrant leurs émissions polluantes.

Avec l'envolée du prix de la tonne de CO2, l'idée est d'éviter un "dumping écologique" qui verrait les industriels délocaliser leur production hors d'Europe, tout en encourageant le reste du monde à adopter les standards européens.

Ce dispositif d'"ajustement carbone aux frontières" (CBAM en anglais) "sera un pilier crucial des politiques climatiques européennes (...) pour inciter nos partenaires commerciaux à décarboner leur industrie", explique l'eurodéputé Mohammed Chahim (S&D, sociaux- démocrates).

En pratique, l'importateur devra déclarer les émissions liées au processus de production, et si celles-ci dépassent le standard européen, acquérir un "certificat d'émission" au prix du CO2 dans l'UE. Si un marché carbone existe dans le pays exportateur, il paiera seulement la différence.

"Le message à nos industries est clair: inutile de délocaliser car nous avons pris les mesures nécessaires pour éviter les concurrences déloyales" en garantissant "un traitement équitable" entre producteurs européens et marchandises importées, a observé Pascal Canfin (Renew, libéraux), président de la commission Environnement au Parlement.

Voici les modalités de l'accord trouvé mardi matin entre les négociateurs des Etats membres et du Parlement européen après de longues négociations nocturnes:

Secteurs concernés

Le mécanisme, administré pour l'essentiel de façon centralisée au niveau de l'UE, visera les secteurs jugés les plus polluants (acier, aluminium, ciment, engrais, électricité), comme le proposait la Commission européenne.

Les eurodéputés ont obtenu d'y ajouter l'hydrogène, certains produits dérivés (boulons...), et Bruxelles devra étudier l'éventuelle extension à la chimie organique et aux polymères (plastiques).

Le dispositif tiendra compte des émissions "indirectes" (générées par l'électricité utilisée pour la production).

Les revenus attendus, qui pourraient dépasser 14 milliards d'euros annuels, alimenteront le budget général de l'UE.

Calendrier

Une période-test commencera dès octobre 2023, durant laquelle les entreprises importatrices devront simplement rapporter leurs obligations.

Le calendrier du démarrage effectif dépendra de pourparlers en fin de semaine sur le reste de la réforme du marché carbone européen.

Commission et Etats défendent une application progressive du mécanisme sur dix ans à partir de 2026. Les eurodéputés, eux, demandent une mise en oeuvre graduelle entre 2027 et 2032.

Quotas gratuits

Actuellement, les industriels européens se voient allouer des quotas gratuits couvrant une partie de leurs émissions, pour soutenir leur compétitivité face aux concurrents étrangers.

A mesure que montera en puissance l'"ajustement aux frontières", les quotas gratuits distribués aux secteurs concernés seront supprimés progressivement.

Un point crucial: en traitant à égalité importations et production locale, Bruxelles estime rester dans les clous des règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et contrer les accusations de "protectionnisme".

Mais le calendrier de suppression des quotas gratuits, âprement discuté, ne sera abordé que vendredi et samedi dans les pourparlers sur la réforme du marché carbone.

"La réglementation sur le CBAM ne pourra être formellement adoptée qu'après avoir résolu ces autres éléments", avertit le Conseil européen.

Aides à l'exportation

Autre point controversé restant à négocier: le Parlement veut que les sites industriels européens, sous certaines conditions, continuent de recevoir des allocations gratuites pour

leur production destinée aux exportations vers des pays hors-UE.

Les industriels européens s'alarment de voir leurs exportations perdre en compétitivité en raison du prix à payer pour leurs émissions et des lourds investissements pour se décarboner, alors qu'ils pâtissent déjà de la flambée des coûts de l'énergie.

Les Etats restent, eux, réticents à tout "rabais à l'exportation", qui risquent d'être incompatibles avec les règles anti-subventions de l'OMC.

Le CBAM est "l'aboutissement d'une idée vieille de trente ans, mais il n'a de sens qu'en supprimant toutes les allocations gratuites", observe Geneviève Pons, directrice-générale de l'institut Europe Jacques-Delors.

Alternativement, elle plaide pour que les recettes du mécanisme soit utilisées pour aider les pays en développement à se décarboner.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.