La France, une puissance active dans l’Asie et l’Indopacifique

Emmanuel Macron œuvre pour une «reconnaissance» des ambitions et de l’influence de la France. Toutefois, cette stratégie française indopacifique sera-t-elle couronnée de succès? (AFP).
Emmanuel Macron œuvre pour une «reconnaissance» des ambitions et de l’influence de la France. Toutefois, cette stratégie française indopacifique sera-t-elle couronnée de succès? (AFP).
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Publié le Mardi 22 novembre 2022

La France, une puissance active dans l’Asie et l’Indopacifique

  • «L’invitation au sommet de l’Apec valide la stratégie indopacifique lancée en 2018»
  • La tâche de la France n’est pas évidente pour s’imposer comme acteur régional et concilier l’alliance avec Washington, le dialogue avec la Chine et le partenariat avec l’Inde et l’Apec

PARIS: Le président français, Emmanuel Macron, a été le premier chef d’État européen invité au sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec) le 18 novembre, à Bangkok, après avoir participé au sommet du Groupe des vingt (G20) réuni les 15 et 16 novembre 2022, à Bali, en Indonésie. À travers cette activité diplomatique en Asie du Sud-Est, M. Macron œuvre pour une «reconnaissance» des ambitions et de l’influence de la France. Toutefois, cette stratégie française indopacifique sera-t-elle couronnée de succès dans une région hautement vitale pour les équilibres internationaux et théâtre d’une compétition sino-américaine de plus en plus tendue?

Les fondements de l’intérêt français pour l’Asie 

À l’occasion de la tournée asiatique d’Emmanuel Macron, l’Élysée se montre confiant: «L’invitation au sommet de l’Apec valide la stratégie indopacifique lancée en 2018.»

Cela paraît à première vue évident, car «la France est un pays de la région» (elle compte de nombreux territoires et espaces maritimes). Concrètement, la France détient dans cette région la majeure partie de sa zone économique exclusive (ZEE), la deuxième du monde, autour de sept territoires, de La Réunion à la Nouvelle-Calédonie et Tahiti, où vivent 1,65 million de ressortissants. Cependant, la position de cette zone à plus de 10 000 km de l’Europe, la modestie du poids économique de la France, ainsi que la faiblesse de ses moyens militaires déployés devraient inciter Paris à adopter une nouvelle approche médiane pour présenter des solutions.

Au cours de ses entretiens bilatéraux en marge du sommet du G20 (avec les présidents chinois et indonésien, et les Premiers ministres indien et australien), et lors de son discours au sommet de l’Apec, le président Macron a plaidé contre «l'hégémonie» et la «confrontation» et pour la «stabilité».

L’intérêt français porté à cette zone se justifie par son impact en tant que centre névralgique du commerce mondial qui détiendra 60 % de la population et du produit international brut (PIB) mondiaux en 2030. De plus, la priorité stratégique française à l’égard de cette zone allant des côtes Est africaines aux côtes Ouest américaines s’explique par un souci de défense des intérêts de souveraineté dans une région marquée par la montée de la Chine, la rivalité sino-américaine et de nombreux conflits et tensions.

Ainsi, au cours de ses entretiens bilatéraux en marge du sommet du G20 (avec les présidents chinois et indonésien, et les Premiers ministres indien et australien), et lors de son discours au sommet de l’Apec, le président Macron a plaidé contre «l'hégémonie» et la «confrontation» et pour la «stabilité» en Asie-Pacifique. Cette «troisième voie» a pour objectif de proposer des initiatives pour chercher des solutions aux défis sécuritaires, économiques, sanitaires, climatiques et environnementaux auxquels sont confrontés les pays de la région.

À la recherche d’équilibres

Cependant, la tâche de la France n’est pas évidente pour s’imposer comme acteur régional et concilier l’alliance avec Washington, le dialogue avec la Chine et le partenariat avec l’Inde et l’Apec.

En février dernier, un gros contrat d’armement a été conclu avec l’Indonésie, un grand pays de cette zone, et des liens sont noués avec Djakarta.

Les ambitions de la France dans cette zone ont été contrariées en septembre 2021 lors de l’annulation par Canberra d’un contrat d’acquisition de douze sous-marins français, au profit de sous-marins nucléaires américains. Ce revers pour Paris s’est produit lorsque l’Australie a été soutenue par les États-Unis et le Royaume-Uni en constituant ensemble l’alliance «Aukus», qui forme avec l’autre alliance «Quad» (États-Unis, Inde, Australie et Japon) une ceinture destinée à contrer l’influence de la Chine.

Face à ce développement, Paris n’a pas baissé les bras. En février dernier, un gros contrat d’armement a été conclu avec l’Indonésie, un grand pays de cette zone, et des liens sont noués avec Djakarta. De même, le partenariat avec l’Inde a été renforcé et renouvelé.

Dans le même temps, la relation avec Washington s’est réchauffée après l’amende honorable faite par la Maison-Blanche, et à la faveur de la guerre en Ukraine. Ainsi, un sommet américano-français est programmé à Washington au début du mois de décembre. 

Toujours dans ce contexte, la normalisation avec l’Australie est en cours avec le nouveau Premier ministre, Anthony Albanese. On laisse entendre que Paris pourrait même être de nouveau sur les rangs pour la vente de sous-marins à l’Australie en attendant ceux promis par les États-Unis.

Reste le plus grand défi incarné par le géant chinois qui compte faire de cette zone son pré carré dans le futur. Dans cette perspective, comme pour d’autres questions régionales et internationales critiques, Paris plaide pour un dialogue constructif avec Pékin qui l’interpelle sans susciter l’affrontement. Le sommet Macron-Xi Jinping à Bali devrait être suivi d’une visite du président français en Chine au cours du premier trimestre 2023.

La France ne reste pas inactive face aux déséquilibres du monde et pour éviter la confrontation, elle compte adopter une approche inclusive favorisant la stabilité régionale loin de la logique des blocs.

Avec son positionnement non aligné sur Washington et sa proposition de troisième voie, la partie chinoise pourrait considérer la France comme un interlocuteur privilégié. De surcroît , dans la stratégie française établie entre 2018 et 2021, les menaces chinoises sont présentes, mais la France a invisibilisé Taïwan dans sa communication diplomatique pendant des années; elle s’exprime désormais au sein des instances multilatérales (Organisation des nations unies, Union européenne, Groupe des sept) et bilatérales (avec le Japon et l’Australie) pour s’opposer à toute modification unilatérale du statu quo par la force dans le détroit de Taïwan.

Sans entrer dans les détails, la France ne reste pas inactive face aux déséquilibres du monde et pour éviter la confrontation, elle compte adopter une approche inclusive favorisant la stabilité régionale loin de la logique des blocs.

Cette action indopacifique de la France, non dénuée d’intérêts souverains, vise surtout la défense des intérêts stratégiques vitaux et des intérêts économiques immédiats en quête de croissance. En effet, cette région représente plus du tiers du commerce français de marchandises hors de l’Union européenne, et il a augmenté de 49 % en dix ans, soit le double de la moyenne mondiale.

De plus, la France, en tant que seul pays européen appartenant aussi à cette zone, ne compte pas décupler les objectifs français à travers une stratégie européenne pour le moment embryonnaire et hypothétique.

Paris compte sans doute développer son engagement dans la zone, sans omettre la nécessaire adéquation entre de grandes ambitions et des moyens qui restent limités par rapport aux énormes enjeux: sécurité et défense, économie et connectivité, multilatéralisme et État de droit, changement climatique, biodiversité et gestion durable des océans.

Malgré les revers et les défis, l’engagement français dans ce large espace maritime et démographique confère à la France une crédibilité et accroît sa stature internationale.


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".