CASABLANCA: Au Maroc, le Parti de la justice et du développement (PJD) est en chute libre. Depuis la débâcle que le parti islamiste a essuyée lors des élections de septembre 2021, au cours desquelles il a vécu une véritable bérézina, la crise ne cesse de s’approfondir. En effet, les sorties médiatiques de son secrétaire général, Abdelilah Benkirane, ainsi que plusieurs affaires décrédibilisent ce parti qui a été au pouvoir lors des deux derniers mandats.
Dans ses dernières sorties, jugées hasardeuses par de nombreux observateurs de la scène politique marocaine, le sulfureux Abdelilah Benkirane ne rate aucune occasion pour tirer à boulets rouges sur l’actuel chef du gouvernement et secrétaire général du Rassemblement national des indépendants (RNI), Aziz Akhannouch.
Tous ses discours taclent de manière très violente l’actuel gouvernement, remettant en cause l’ensemble de ses décisions, notamment celles qu’il a prises en faveur du maintien du pouvoir d’achat des Marocains en cette période de crise. Et tout est mis en œuvre pour attaquer la majorité gouvernementale. Des sommes importantes sont investies dans des campagnes digitales sur les réseaux sociaux, en plus de conférences et de manifestations menées notamment par le bras syndical du parti, l’Union nationale du travail au Maroc (UNTM).
En voulant se présenter comme le défenseur des valeurs morales et de la religion musulmane pour gagner la sympathie des Marocains, le PJD a perdu toute crédibilité, car son double discours a éclaté au grand jour à maintes reprises.
«Par ses prises de position exagérées, violentes et qui frôlent l’injure, le PJD démontre qu’il manque d’imagination et qu’il ne représente pas une véritable opposition constructive. Les militants du PJD sont dans la vengeance. Ils imputent leur échec à Aziz Akhannouch, qui a été derrière l’éviction d’Abdelilah Benkirane du gouvernement. Si ce dernier, qui a la réputation d’être un animal politique, était resté au pouvoir jusqu’en 2021, le PJD aurait sans doute réalisé de meilleurs scores lors des élections. Maintenant, ils veulent redorer leur blason, même aux dépens du peuple», déclare à Arab News en français, le politologue Saïd el-Akhal. Selon lui, l’opposition menée par le PJD défend les intérêts personnels des cadors du parti. Sensationnalisme, populisme et exploitation de la religion: tels sont les trois ingrédients qui composent l’ADN du parti.
«Les grandes figures du parti ont démontré à plusieurs reprises qu’ils ne sont intéressés que par l’argent et leur statut social. L’affaire de Jamaâ Mouâtassim, le bras droit de Benkirane, est éloquente. On a découvert que l’homme qui dénigrait à tout va l’actuel chef du gouvernement dans les meetings est en réalité un consultant auprès de la chefferie du gouvernement. C’est hypocrite et malsain», nous confie Saïd el-Akhal.
«C’est l’histoire du serpent qui se mord la queue. En voulant se présenter comme le défenseur des valeurs morales et de la religion musulmane pour gagner la sympathie des Marocains, le PJD a perdu toute crédibilité, car son double discours a éclaté au grand jour à maintes reprises. De plus, si le PJD gouvernait actuellement, la situation serait pire», estime notre interlocuteur. «Le gouvernement actuel a ouvert plusieurs chantiers qui étaient bloqués sous l’ère du PJD comme le dialogue social, la hausse des salaires et l’amélioration des conditions des retraités. Aziz Akhannouch aura ce mérite, et c’est ce qui frustre Abdelilah Benkirane. En revanche, si ce dernier était chef du gouvernement, cela aurait été catastrophique. Il a dit lui-même qu’il n’allait pas augmenter les salaires et qu’il allait supprimer les subventions des produits de première nécessité prévus par la caisse de compensation», souligne Aïd el-Akhal.