PARIS: Au lendemain d'un article-choc de Libération, la direction d'EELV a réaffirmé samedi sa confiance dans la cellule interne du parti chargée des violences faites aux femmes, après les accusations de violences psychologiques visant son ex-secrétaire national Julien Bayou.
Europe-Ecologie Les Verts, qui réunit ce week-end comme prévu son conseil fédéral -le parlement du parti-, avait rassemblé dans la matinée son bureau exécutif et la cellule interne, après un article de Libération révélant vendredi que Julien Bayou, qui a démissionné après des accusations de violences psychologiques sur une ex-compagne, était sous la surveillance de militantes féministes du parti.
"Les informations parues dans Libé confirment la nécessité de réfléchir à la meilleure façon de traiter ce cas particulier", a expliqué un cadre d'EELV à l'AFP. Selon une autre source, il était "normal que les informations dans cet article soient prises en compte et traitées politiquement".
A l'issue de cette réunion, le bureau exécutif a renouvelé sa "confiance" dans la cellule interne, dont le travail a été critiqué par l'avocate de Julien Bayou, et par plusieurs responsables politique extérieurs, dénonçant une "justice privée".
Le secrétaire national adjoint Jérémie Crépel, qui remplace temporairement, avec Léa Balage, Julien Bayou, a fait part de "notre fierté de recueillir la parole des victimes et de traiter avec sérieux les violences sexistes et sexuelles alors que d’autres choisissent de les ignorer".
Il a souligné que "la possible nécessité d'externaliser toutes ou une partie des enquêtes (était) sur la table", mais a salué l'abnégation" des membres de cette cellule, "instance disciplinaire de notre mouvement chargée de proposer des sanctions internes".
Il a aussi confirmé qu'un audit "par un organisme externe indépendant", prévu bien avant l'affaire, "sera fait".
L'ordre du jour ordinaire du conseil fédéral est de décider du calendrier du prochain congrès. Celui-ci devrait avoir lieu en décembre, car un référendum interne, visant à le décaler, n'a pas obtenu le nombre de voix suffisant pour être validé.
«Ce qu'elle peut»
Le parti connaît des secousses internes depuis la démission lundi de Julien Bayou, pour pouvoir selon lui se défendre des accusations auxquelles il fait face et qu'il dément, sans qu'il n'y ait de plainte ni d'enquête judiciaire.
L'article de Libération a accentué le malaise, en révélant que depuis trois ans, Julien Bayou vivait sous la pression d’un collectif féministe informel qui lui reprochait sa conduite et enquêtait sur ses relations avec les femmes.
Dans un communiqué, EELV a précisé que "toutes les personnes ayant un lien avec Julien Bayou se sont déportées du dossier" instruit par la cellule interne. Libération a indiqué que l'une des membres de cette cellule fait partie du groupe informel ayant ciblé la vie privée de Julien Bayou.
La cellule "n’a pas estimé qu’il y avait lieu de suspendre de manière conservatoire Julien Bayou et elle poursuit son travail et ces auditions", ajoute le texte.
"La cellule fait ce qu'elle peut. On est sur des sujets à propos desquels il n'y a pas de nomenclatures ni de procédures établies", mais "on ne peut pas réduire une stratégie de lutte victorieuse à des initiatives individuelles, parfois approximatives", expliquait dans la matinée un cadre du parti à l'AFP.
La cellule s'était autosaisie d'une enquête sur Julien Bayou en juillet après un courriel de son ex-compagne, dont il s'est séparé en novembre 2021.
L'affaire a pris un nouveau tour la semaine dernière, lorsque la députée Sandrine Rousseau l'a accusé de "comportements de nature à briser la santé morale des femmes" sur un plateau TV, racontant avoir "longuement" reçu l'ex-compagne de Julien Bayou.
Le bureau du groupe écologiste à l'Assemblée nationale avait alors suspendu Julien Bayou de ses fonctions de coprésident du groupe.
Cette décision a été prise "pour donner de la sérénité à la cellule d'écoute mais ça apparaît comme une sanction (...) et cette sanction-là, elle n'est pas normale", a critiqué vendredi l'ex-candidat à la présidentielle 2022, le député européen Yannick Jadot, qui avait pourtant demandé lui-même une mise en retrait de la tête du parti.
Dans un tweet, l'ex-candidate écologiste à la présidentielle, Eva Joly, a réagi à l'article de Libération: "La fin ne justifie pas les moyens. Ces agissements hors de tout cadre desservent la cause qu'ils sont censés faire avancer et sont dangereux pour celles-là mêmes qu'on prétend protéger".