Reconfinement: le "contexte glaçant" de l'attaque de Nice bouscule le débat au Parlement

Des policiers et des soldats français montent la garde dans une rue après une attaque au couteau à Nice. (ValeryHACHE/AFP)
Des policiers et des soldats français montent la garde dans une rue après une attaque au couteau à Nice. (ValeryHACHE/AFP)
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Publié le Jeudi 29 octobre 2020

Reconfinement: le "contexte glaçant" de l'attaque de Nice bouscule le débat au Parlement

  • Le débat sur le reconfinement à l'Assemblée a été bouleversé par le "contexte glaçant" de l'attaque de Nice
  • "Je ferai tout mon possible pour revenir dans cet hémicycle écouter vos interventions et essayer d'y répondre"

PARIS: Jean Castex était venu défendre sa stratégie de "responsabilité", l'opposition faire part de sa "colère" contre son "impréparation", mais le débat sur le reconfinement à l'Assemblée a été bouleversé par le "contexte glaçant" de l'attaque de Nice.

À 9H43, le Premier ministre quitte la tribune après son intervention sur le reconfinement. Au pied des marches, son collaborateur parlementaire, Julien Autret, lui glisse quelques mots à l'oreille sur la situation à Nice.

Jean Castex remonte quatre à quatre. Il échange avec Richard Ferrand, qui prend la parole, gravement. "Nous venons d'apprendre qu'un attentat d'une gravité extrême s'est produit à Nice", déclare le président de l'Assemblée nationale, avant une minute de silence dans l'hémicycle et une interruption de séance.

Le député niçois Eric Ciotti (LR) fait part de son "immense émotion", salle des Quatre-Colonnes, où se succèdent les parlementaires.

Outre la solidarité avec les familles des victimes s'exprime surtout une sourde inquiétude. "Il faut tout faire pour éviter l'engrenage", prévient Nicolas Dupont-Aignan (DLF). Le chef de file des députés LFI, Jean-Luc Mélenchon, se dit "secoué" par un "contexte glaçant", pense "aux catholiques", appelle à "ne pas tomber dans l'abîme", quand Marine Le Pen (RN) réclame une "législation de guerre". 

Pendant ce temps-là, Jean Castex a momentanément quitté l'Assemblée pour gagner la cellule de crise du ministère de l'Intérieur.

"Je ferai tout mon possible pour revenir dans cet hémicycle écouter vos interventions et essayer d'y répondre", assure-t-il aux députés, en appelant la représentation nationale "à l'unité et à la cohésion".

"On est dans un enchevêtrement de crises. Elles se cumulent et se confondent et jettent le pays dans un effroi absolu", commente le député de l'Essonne Francis Chouat (apparenté LREM). "Jamais en cinquante ans de vie publique, je n'avais connu une telle situation". 

À la tribune, la cheffe de file du groupe socialiste Valérie Rabault estime qu'il aurait fallu "interrompre" et "reporter" ce débat sur le reconfinement.

"Anxiété"

"J'ai pour ma part la conviction profonde que précisément parce que des terroristes attaquent notre démocratie, notre République, que c'est l'honneur de l'Assemblée nationale de continuer à faire vivre notre République", martèle Richard Ferrand (LREM) au perchoir. 

Mais, en raison du contexte, le patron des députés LR Damien Abad indique que son groupe ne "prendra pas part au vote en conscience et en responsabilité afin de ne pas ajouter des divisions dans notre pays". 

"Pas sûr qu'un vote qui montrerait des fractures dans la représentation nationale soit opportun", considère-t-il.

Bon an mal an, la discussion se poursuit. "Il est difficile de poursuivre ce débat", mais puisqu'il "faut poursuivre, poursuivons en serrant les dents, en serrant les poings, en pensant très fort à Nice", dit le LR Jean-Jacques Gaultier vers midi, alors que Jean Castex est de retour.

Entre-temps, Valérie Rabault (PS) a redit son "oui de colère" au reconfinement, un "oui de responsabilité" pour protéger les Français, mais une "colère" contre "l'impréparation" du gouvernement.

"Un homme décide de tout, tout seul, entouré de ce conseil de défense hors-sol", a lancé Jean-Luc Mélenchon à propos d'Emmanuel Macron et la gestion du Covid-19. "Nous n'avons pas confiance, nous avons de moins en moins confiance".

"Nous ne sommes pas prêts à affronter une deuxième vague", pointe également Damien Abad (LR).

Aurore Bergé (LREM) défend quant à elle le reconfinement, la "seule décision responsable": "certains préfèrent soigner des clientèles électorales que soigner les Français", dénonce-t-elle.

Près des Quatre-Colonnes, Hubert Wulfranc (PCF), ex-maire de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime) où en 2016 un prêtre a été égorgé lors d'un attentat jihadiste, confie "revivre une tragédie".  

"On est dans un tel état d'anxiété avec une peur exponentielle des Français pour leur santé, pour leur travail et pour leur vie. [...] Il y en a marre de partager cette réalité horrible". 

Jean Castex reprend la parole à 12H40 dans l'hémicycle. Il dénonce une attaque "aussi lâche que barbare qui endeuille le pays tout entier"  et porte le plan vigipirate au niveau "urgence attentat" partout en France.

Puis il fustige ceux qui ont décidé de ne pas prendre part au vote: "Quand la maison France est dans la difficulté, on doit prendre ses responsabilités, on ne détourne pas le regard."


Immigration : un conseil interministériel se réunit mercredi

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.
  • Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

PARIS : Le gouvernement français réunira un conseil interministériel de contrôle de l'immigration mercredi, alors qu'une attaque au couteau, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière, a fait un mort samedi à Mulhouse, a assuré dimanche le ministre des Affaires étrangères.

Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.

Au cours de l'entretien, le ministre a été interrogé sur les discussions avec ses homologues algériens concernant les obligations de quitter le territoire français (OQTF).

« Cette attaque terroriste nous appelle à amplifier encore la mobilisation qui est la nôtre pour mieux contenir et prévenir les conséquences de la présence de ce terroriste islamiste sur le territoire national », a estimé le ministre avant d'évoquer le conseil interministériel.

Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

Le Premier ministre, François Bayrou, a d'ailleurs convoqué un conseil interministériel de contrôle de l'immigration ce mercredi. « Nous devons faire plus et nous devons faire mieux », a-t-il déclaré.

M. Barrot a également affirmé avoir demandé « aux 19 ambassadeurs, dans les pays où nous rencontrons le plus de difficultés pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière, à me faire un rapport circonstanciel dont je présenterai les résultats ce mercredi au Premier ministre pour que nous puissions prendre des mesures fortes ».

« Il y a des pays vis-à-vis desquels il nous faut effectivement prendre des mesures fortes. Il y en a d'autres où, au contraire, il nous faut des mesures d'accompagnement », a-t-il ajouté. 


« La France doit produire plus pour manger mieux », affirme la ministre de l'Agriculture

Le président français Emmanuel Macron (G) s'adresse à la presse en compagnie de la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard  L'édition 2025 du SIA (Salon International de l'Agriculture) Agriculture se tient à Paris du 22 février au 2 mars 2025. (Photo par Thomas Padilla / POOL / AFP)
Le président français Emmanuel Macron (G) s'adresse à la presse en compagnie de la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard L'édition 2025 du SIA (Salon International de l'Agriculture) Agriculture se tient à Paris du 22 février au 2 mars 2025. (Photo par Thomas Padilla / POOL / AFP)
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  • la France doit affirmer sa souveraineté agricole comme un enjeu régalien et réarmer sa puissance alimentaire », a-t-elle déclaré, appelant à « sonner la mobilisation générale ».
  • « La France doit produire plus pour manger mieux. Produire plus pour reconquérir l’assiette des Français, produire plus pour importer moins et garantir les standards de production que nous exigeons de nos paysans », a-t-elle ajouté.

PARIS : « La France doit produire plus pour manger mieux », a affirmé dimanche, lors de l'inauguration du stand du ministère au Salon de l'agriculture, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard, livrant sa vision de la souveraineté alimentaire.

« Dans ce moment de grand bouleversement de l'ordre international (...), la France doit affirmer sa souveraineté agricole comme un enjeu régalien et réarmer sa puissance alimentaire », a-t-elle déclaré, appelant à « sonner la mobilisation générale ».

« La France doit produire plus pour manger mieux. Produire plus pour reconquérir l’assiette des Français, produire plus pour importer moins et garantir les standards de production que nous exigeons de nos paysans », a-t-elle ajouté, suscitant des applaudissements dans le public, largement composé de représentants du monde agricole (producteurs, interprofessions, syndicats, chambres d'agriculture, etc.).

« Produire plus pour pouvoir investir et ainsi produire mieux. Produire plus pour rester une puissance exportatrice et jouer dans la cour des grands alors que de nouveaux équilibres de la géopolitique agricole se dessinent », a-t-elle poursuivi, au côté de son homologue marocain, Ahmed El Bouari, dont le pays est l'invité d'honneur du Salon.

« Produire plus et tourner le dos aux partisans de la décroissance et du repli sur soi », a ajouté Mme Genevard.

Tout en estimant qu'il est « un non-sens » d'opposer agriculture et environnement alors que les agriculteurs travaillent « avec la nature », elle a déclaré se battre « chaque jour pour qu'on ne bride pas l'alimentation au nom de la planète, alors qu'il n’y a aucun bénéfice objectif à ces entraves administratives ou réglementaires ».

La ministre s'en est ensuite vigoureusement pris aux « idéologues », « les procureurs qui mangent du paysan à tous les repas sans en avoir jamais vu, pour entretenir le fantasme d'une France agricole productiviste ».

« On invoque souvent la dette environnementale que nous pourrions laisser à nos enfants. Mais je ne veux pas non plus leur laisser une dette alimentaire », a-t-elle encore affirmé. 


À Washington, Macron veut faire entendre la voix de l’Europe sur l’Ukraine.

Le président français Emmanuel Macron (C), le président élu des États-Unis Donald Trump (G) et le président ukrainien Volodymyr Zelensky posent avant une réunion au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 7 décembre 2024. (Photo de Sarah Meyssonnier / POOL / AFP)
Le président français Emmanuel Macron (C), le président élu des États-Unis Donald Trump (G) et le président ukrainien Volodymyr Zelensky posent avant une réunion au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 7 décembre 2024. (Photo de Sarah Meyssonnier / POOL / AFP)
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  • L’entretien prévu entre le président français Emmanuel Macron et son homologue américain Donald Trump, à Washington ce lundi, est des plus délicats.
  • Les européens s’inquiètent que Washington et Moscou, ne scellent un accord de paix au détriment de Kiev, au regard des concessions faites gratuitement et d’entrée de jeu par l’administration américaine.

PARIS : L’entretien prévu entre le président français Emmanuel Macron et son homologue américain Donald Trump, à Washington ce lundi, est des plus délicats, puisqu’il s’agit de faire entendre la voix de l’Europe et de l’Ukraine, écartées des pourparlers avec la Russie sur le dossier ukrainien.

Le président français a pris soin de se préparer à cette rencontre tout au long des jours précédents, en organisant deux réunions successives avec plus d’une trentaine de dirigeants européens sur le sujet.

Ces rencontres lui ont permis de contourner les divergences et de s’assurer d’une relative unité sur le dossier au sein de l’Europe.

Parallèlement, il a aussi convoqué en urgence à l’Elysée les représentants des forces politiques françaises, pour les mettre au fait des implications au niveau de la France et de l’Europe, de la démarche américaine, sur le dossier ukrainien.

Le chef de l’Etat s’est également adressé aux Français, à travers la presse régionale et les réseaux sociaux, pour évoquer une partie de son plan, en vue de cette rencontre qui coïncide avec le troisième anniversaire de la guerre menée par la Russie contre le territoire ukrainien.

Depuis l’annonce de Trump, de pourparlers avec la Russie sur ce dossier et la rencontre qui a eu lieu récemment à Riad à ce sujet, entre de hauts responsables américains et russes, la France et l’Europe s’efforcent de faire entendre leur voix sur ce chapitre.

Les européens s’inquiètent que Washington et Moscou, ne scellent un accord de paix au détriment de Kiev, au regard des concessions faites gratuitement et d’entrée de jeu par l’administration américaine.

Cette dernière, doute de l’objectif de l’Ukraine de rejoindre l’alliance Atlantique, et n’accorde pas d’intérêts à la restitution par les Russes des régions ukrainiennes qu’ils ont occupé depuis le début de la guerre.

Par ailleurs, l’administration américaine ne se fait aucun souci au niveau des défis sécuritaires qui peuvent guetter le continent européen, de la part du président russe Vladimir Poutine.

Partant de là, la France tout comme l’Europe s’opposent à tout règlement auquel ils ne seraient pas associés ainsi que les Ukrainiens, et Macron compte faire entendre cela à Trump, déployant à cette fin un atout principal.

Dans les propos tenus lors de son échange avec les Français sur les réseaux sociaux, Macron a affirmé qu’il dira à Trump « Tu ne peux pas être faible face au président Poutine. Ce n’est pas toi, pas ta marque de fabrique, ce n’est pas ton intérêt ».

Une manière de faire plier Trump en le ramenant à sa propre vérité, un pari à tenter sans garantie de réussite, tant les réactions et positions du président américains semblent échapper à toute logique.

D’où le sentiment que l’entretien de Macron avec son homologue américain relève d’un saut dans le vide, d’autant plus que ce dernier s’affranchi de toute sorte de limites ou garde fou.

Il s’est montré prêt à sacrifier l’Ukraine au profit de la Russie et à laisser à l’abandon ses alliées européens, et il s’est lancé dans une campagne de critiques personnelles et gratuites à l’encontre du président ukrainien Vlodomir Zelenski le traitant de « dictateur non élu ».

En dépit de cela, le Palais de l’Elysée préfère tempérer et mettre l’accent sur ce qui rapproche et uni, en soulignant à la veille de la visite présidentielle que « la France partage l’objectif du président Trump de mettre fin à la guerre en Ukraine ».

Le président français, toujours selon l’Elysée « Va à Washington dans l’esprit de soutenir cet objectif », et qu’il y va avec « des propositions d’action » et « le souci de travailler en soutien de l’Ukraine, et au renforcement de la sécurité en Europe ».